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Pourquoi le problème de France Télévisions n’est pas un problème de moyens mais d’objectifs
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Changer de modèle

Ce mercredi se tiennent les Assises de l'audiovisuel, organisées par Aurélie Filippetti, la ministre de la Culture et de la communication.

Francis Balle

Francis Balle

Francis Balle est professeur de Science politique à Pantheon-Assas. Il est l’auteur de Médias et sociétés 18 ème édition, ed Lextenso et de Le choc des inculture , ed L’Archipel.

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Atlantico : Aujourd'hui mercredi se tiennent les Assises de l'audiovisuel organisées par Aurélie Filippetti, la ministre de la Culture et de la communication. Dans quelle situation financière se trouve actuellement France Télévisions ? Et comment l'expliquer ?

Francis Balle : France Télévisions a été soumis à une réduction budgétaire importante, mais en revanche le législateur a augmenté par sa loi de finance la redevance qui s’élève désormais à 131 euros pour la métropole. La redevance en France ne se trouve pas au niveau de celle en Grande-Bretagne ou en Allemagne. France Télévisions est face à un déficit de 250 millions d’euros, et ce n’est pas, contrairement a ce qui a été annoncé la diversification dans la voix du numérique qui constituera une solution. Le problème de France Télévisions existe depuis plus de 20 ans, il n’est pas nouveau et n’est pas de la seule responsabilité de Pflimlin. La chaîne France 3 est le parfait exemple de ces problèmes : il y a un réel manque de vision concernant les programmes.

Les gouvernements qui se sont succédés ont chacun voulu marquer de leur empreinte l’action des pouvoirs publics, sans pour autant penser à une continuité dans le cahier des charges. Il y a certaines obligations concernant les chaînes publiques qui n’ont pas été respectées. C’est au CSA et non pas au gouvernement de mettre en oeuvre la ligne éditoriale de l’audiovisuel public : or, les autorités compétentes donnent vraiment l’impression d’avoir démissionné. Les missions de service public, qui doivent assurer la légitimité de France Télévisions devraient plutôt être de faire autrement ce que les autres font déjà, ou bien de faire ce que les autres ne font pas. 

Rémi Pflimlin, le président de France Télévisions, a déclaré qu'il fallait  "moderniser et donner une nouvelle dynamique" à la redevance. Une augmentation et/ou un élargissement de la redevance est-elle envisageable ? Permettrait-elle une réelle amélioration de la situation financière de France Télévisions ? Dans quelle mesure ? 

La redevance finance les chaînes de télévision et de radio publiques. Elle permet de collecter plus de 2 milliards d’euros, soit environ 75 % des recettes de l’audiovisuel public. Cela représente donc une immense part des recettes de France Télévisions. L’augmentation de la redevance devrait d’abord faire l’objet d’une loi puisque c’est une taxe para-fiscale, et par conséquent il faut juridiquement modifier les statuts. Mais le Parlement sera toujours un peu réservé à l’idée d’augmenter la redevance. 

Rémi Pflimlin a une marche de manoeuvre extrêmement étroite en raison des statuts très rigides. Il ne dispose donc pas de l’argent dont disposaient ses prédécesseurs. D’autant plus que le marché publicitaire est depuis 2008 avec l’interdiction de la publicité après 20h beaucoup plus étroit qu’avant. Mais le problème n’est pas tant celui des moyens que celui des fins : c’est toujours facile de continuer à faire ce que l’on a toujours fait quand on en a les moyens. Quand les moyens sont limités, il faut redéfinir et recentrer davantage les missions de chaînes publiques : réduire le nombre des chaînes, faire mieux circuler les programmes. Il est illégitime de la part d’un gouvernement de donner des instructions à France Télévisions. 

France Télévisions a-t-il besoin de s'inscrire dans une véritable logique de rentabilité ? Comment ? 

On ne peut pas poser la question des moyens sans poser celle des fins. On  a parfois diffusé des programmes qui n’ont pas leur place sur les chaînes publiques et qui en plus coûtaient horriblement chers. France Télévisions est obligé de respecter la contrainte budgétaire qui est la sienne, le tout est de s’adapter selon ces contraintes.

France Télévisions, comme toutes les entreprises dont l’Etat est actionnaire à 100 %, de respecter les obligations qui sont les siennes, sans toujours demander plus d’argent. Il ne faut pas que le gouvernement s’amuse de l’arme de la législation sur l’audiovisuel dont il dispose, comme il l’a fait dans le passé notamment dans les années 90 avec Philippe Guillaume. La seule manière de dépasser les blocages est de ne pas fixer l’audience comme but premier mais plutôt les missions de service public, avec un cahier des charges strict déterminé par le Parlement et le CSA, qui doit lui être indépendant et professionnel. L’objectif de France Télévisions est de ne pas perdre d’argent, de respecter les contraintes budgétaires imposées par l’Etat et puis d’essayer d’accomplir le mieux possible les missions qui justifient son existence. Car si les chaînes publiques font ce que les autres font déjà, il est irréaliste de taxer le contribuable.

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