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Pourquoi le plan de la majorité pour flécher l’épargne vers les entreprises oublie totalement de prendre en compte… la réalité
©Reuters

Moulin à vent

Avec un taux de croissance tendanciel de 2,0%, la France engrange des succès positifs mais contrastés ( plus de recettes fiscales, un peu moins de chômage, de meilleures marges ) et il faut par conséquent souhaiter que 2018 vienne confirmer cette tendance.

Jean-Yves Archer

Jean-Yves Archer

Jean-Yves ARCHER est économiste, membre de la SEP (Société d’Économie Politique), profession libérale depuis 34 ans et ancien de l’ENA

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Parallèlement, nous restons avec des prévisions d'investissements situées autour de 1,3% pour 2018 (selon les instituts) et un commerce extérieur calamiteux ( plus de 64 milliards de déficit ) qui relance à l'infini la question de notre compétitivité et notre vive propension à importer.

Il ne s'agit plus seulement de la bataille du " made in France " mais du combat pour le " Buy French ".

S'agissant de l'investissement, il est fondamental de flécher l'épargne ( qui est abondante avec un taux autour de 14,6% ) vers les entreprises et particulièrement vers leurs projets à long terme.

Il y a en effet un sérieux hiatus entre la vigueur du taux d'épargne et l'aversion au risque qu'il reflète. Deux indicateurs viennent ici le démontrer : l'importance des sommes que nous laissons collectivement sur nos comptes à vue ( 370 milliards d'euros ) qui a, par construction, du mal à être transformée en ressources à moyen terme. Deuxième indicateur, le succès non démenti de l'assurance-vie, et singulièrement le financement obligataire de la dette d'Etat qu'elle représente. Le montant investi est de 36 milliards pour un encours total de plus de 1.600 milliards.

Or, clairement les tentatives d'orienter une partie de l'assurance-vie vers des placements actions sont restées dérisoires par rapport aux fonds Euros.

L'équation est simple en surface : il faut que les quotités d'épargne délestées de l'ISF aillent massivement vers des outils d'investissements en fonds propres des entreprises et particulièrement des PME puisque les grands groupes ont, quant à eux,  spontanément assez facilement accès à l'épargne internationale.

Pour moi, cela pose la question précitée de l'aversion au risque d'autant que les épargnants ont été refroidis – le mot est faible – par des épopées du type Eurotunnel, Natixis et plus récemment Altice.

Simultanément, cela pose la question insoluble de la rémunération d'une épargne longue par ces temps de taux d'intérêt bas : l'épargnant ne s'y retrouve pas et se doit de constater la faiblesse des rendements proposés et servis post-fiscalité.

La députée Amélie de Montchalin, " whip " de la Commission des finances de l'Assemblée nationale, a récemment déclaré que les professionnels devaient proposer des allocations d'actifs diversifiés ce qui est un joli vœu pieux pour qui regarde les écarts de rendements.

A cet égard, il est frappant de constater qu'un dirigeant qui a des liquidités a plus avantage à les inscrire en compte-courant qu'au sein d'une augmentation en capital. C'est cette inversion des rendements et la préférence pour la liquidité décrite par Keynes qui plombe l'essor de milliers d'entreprises.

Le cas atypique des start-up ne doit pas masquer l'évolution poussive des valorisations de bien des PME.

Le Gouvernement n'a pas – hélas - voulu créer de nouveaux produits d'épargne et se contente de bousculer les professionnels par des slogans sans portée crédible : "  Nous demandons aux intermédiaires financiers d'arrêter d'être des conseillers en optimisation fiscale. " ( A de Montchalin ).

Il est toujours surprenant de devoir lire de telles positions si éloignées des réalités des marchés et des segments d'épargne concernés.

Face à une telle tirade, on ne peut que relire posément la décision
du Conseil constitutionnel. ( n° 2013 – 685 du 29 décembre 2013 ) qui énonce : " Tout contribuable peut légitimement être amené à chercher à minorer sa charge fiscale et tout avocat fiscaliste cherche à minorer la charge fiscale de ses clients, sans que pour autant cette démarche soit constitutive d'une fraude ".

D'évidence, un avis du Conseil l'emporte sur un propos hâtif d'une députée en cours d'acquisition d'expérience.

Sur le fond, certains se souviennent certainement de l'efficacité du réseau des SDR ( Sociétés de développement régional ) dans les années 1980 ( notamment en Bretagne sous la présidence d'Yves Sabouret ) et ne peuvent donc que regretter qu'un outil régionalisé n'ait pas été créé aux côtés des dispositifs actuels de BpiFrance.

L'épargne de proximité et les PME, cela fait sens et représente un tandem gagnant à condition de le vouloir !

Ce qui aurait aussi fait sens, c'est de lancer un grand plan de facilitation des conditions de transmission d'entreprises. D'ici 2025, plus de 500.000 entreprises seront cédées et plus de 150.000 seront liquidées faute de projet de reprise ou d'adossement.

Une politique fiscale incitative s'impose. Attendons le PLF 2019….avec espoir ?

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