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Pourquoi la réforme de l’ISF peut déboucher sur une usine à gaz
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Edito

Il est bien connu qu’en France on ne fait jamais simple quand on a le loisir d’agir de manière compliquée. La réforme de l’impôt sur la fortune en porte témoignage.

Michel Garibal

Michel Garibal

Michel Garibal , journaliste, a fait une grande partie de sa carrière à la radio, sur France Inter, et dans la presse écrite, aux Échos et au Figaro Magazine.

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Il est bien connu qu’en France on ne fait jamais simple quand on a le loisir d’agir de manière compliquée. La réforme de l’impôt sur la fortune en porte témoignage. Au lieu de supprimer purement et simplement  l’ISF, et de s’attacher à une  reconstruction rationnelle de la fiscalité dans notre pays on a appliqué le fameux principe d’Emmanuel Macron du » en même temps » en séparant le capital financier désormais affranchi de la taxation, de l’immobilier qui resterait soumis au régime actuel dans toute sa rigueur. Au risque de multiplier les polémiques sur un sujet particulièrement sensible et qui de surcroît pourrait faire l’objet de sérieuses critiques de la part du conseil constitutionnel auquel il sera soumis.

La gauche réclame le maintien pur et simple de l’impôt qui est pour elle le symbole  de la justice fiscale,  tandis qu’une partie de la droite revendique son abolition totale, pour éliminer l’un des freins à la croissance de l’économie. Par son refus de trancher entre ces deux positions extrêmes, le  gouvernement  a choisi la difficulté, car la délimitation des frontières entre les deux sources de propriété s’avère souvent délicate et peut donner  lieu à des contournements.

Première difficulté : évaluer le manque à gagner pour le trésor public. Le produit de l’impôt était évalué à cinq milliards d’euros, une somme approximative, car elle tenait compte à la fois du mécanisme du plafonnement à 75% des revenus  et représentait grosso modo  un milliard  d’euros,  mais aussi des sommes  récoltées par la cellule de régularisation des avoirs fiscaux à la suite de transactions avec des évadés fiscaux repentis, dont le fonctionnement sur plusieurs années a rapporté huit milliards. Par ailleurs, il faudrait pouvoir estimer  le manque à gagner qui résulte  depuis la naissance de cet impôt  de l’exode régulier des hommes et des biens vers d’autres cieux, en créant  une hémorragie lente  mais permanente, préjudiciable à la bonne santé  de l’économie.

Deuxième difficulté : déterminer l’impact de l’exonération du capital mobilier : il représenterait 64% de l’assiette, contre 36% à l’immobilier,  mais l’absence de caractère proportionnel  en  raison de la progressivité de l’impôt a un impact sur le rendement difficile à évaluer avec précision.  Dans ce contexte, la réforme projetée pourrait faire perdre trois milliards par an au fisc, alors que le rendement  de l’immobilier pur ne dépasserait pas 850 millions selon les dernières estimations les plus crédibles. Encore que ce dernier chiffre pourrait même être revu à la baisse, dans bien des cas. Qu’adviendra-t-il par exemple des actifs fonciers détenus par des sociétés qui étaient jusqu’ici exonérées de l’ISF ? Quel sera le sort des foncières cotées en Bourse ? Comment seront évalués  les actifs liquides des entreprises à prépondérance  immobilière ? Le gouvernement devra établir des garde-fous pour éviter une  certaine évasion engendrée par d’inévitables tentatives  de contournement du  nouveau système.

Dans les milieux d’affaires, la prudence reste de mise. On suit pas à pas l’impact dans l’opinion des transformations  déjà amorcées à commencer par le code du travail. On  redoute aussi  l’influence des grêves des routiers notamment , de l’agitation  étudiante à venir dans un pays prompt  à  réclamer des réformes, mais qui refuse  généralement celles  qu’on lui propose, ce qui peut à tout moment, comme on l’a vu à plusieurs reprises dans le  passé interrompre le processus de rénovation pour revenir à l’éternel  statu quoi.  Et l’ISF n’échappe pas au doute que certains  éprouvent  encore sur son sort. 

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