Edito
Pourquoi la France garde le bonnet d’âne de la croissance en Europe
L’Europe caracole sur un sentiment d’euphorie économique. La commission de Bruxelles additionne les bulletins de victoire. Jamais depuis dix ans, la croissance n’est apparue aussi robuste.
L’Europe caracole sur un sentiment d’euphorie économique. La commission de Bruxelles additionne les bulletins de victoire. Jamais depuis dix ans, la croissance n’est apparue aussi robuste. Et les perspectives pour les deux années à venir demeurent optimistes, avec des performances sans cesse revues à la hausse. Ainsi, pour l’année qui s’achève, l’expansion atteindrait en moyenne 2,2% dans la zone euro selon des chiffres qui viennent d’être publiés, alors qu’en début d’année, la commission avait envisagé une progression de 1,6% seulement. Dans tous les domaines, les voyants sont au vert : la consommation des ménages est en forte hausse, le chômage recule et l’investissement redémarre. Le déficit public de la zone va tomber au-dessous d’un pour cent. Cette situation positive devrait se prolonger au moins pendant deux ans, d’autant que la conjoncture mondiale est à la même enseigne, à condition que la situation géopolitique ne se dégrade pas, en raison des nombreux conflits en cours ou qui couvent. Le moment serait donc propice pour amorcer une nouvelle étape dans la construction européenne, comme le souhaite officiellement la France, en surfant sur les atouts offerts par une conjoncture particulièrement flatteuse.
Mais c’est justement là que le bât blesse, car les initiatives font cruellement défaut du côté de Bruxelles. Le moteur franco allemand, indispensable pour réaliser des progrès , parait grippé, parce que le doute s’est réinstallé du côté de Berlin sur les capacités de Paris à engager en profondeur les réformes indispensables. Pour jouer les locomotives, il ne faut pas apparaitre comme le wagon de queue, qui peine à s’aligner sur les autres. La France est aussi engagée dans le mouvement général de croissance, mais elle revêt, selon certains experts, le bonnet d’âne, en bonne dernière place pour la plupart des performances. L’expansion sera comprise cette année entre 1,6 et 1,8%, très inférieure à la moyenne européenne, le commerce extérieur enregistrera un déficit abyssal, témoignant d’un manque de compétitivité inquiétant. Le gouvernement a toutes les peines du monde à contraindre l’impasse budgétaire. Il déploie tous les efforts pour maintenir le déficit en deça de la ligne rouge symbolique des trois pour cent. Mais il reste de nombreux foyers d’incertitude, comme la recapitalisation d’ Areva ou l’incidence de la taxe sur les dividendes invalidée par le conseil constitutionnel qui pourraient alourdir l’addition. L’impression prévaut aussi chez nos partenaires européens qu’un certain laxisme pourrait à nouveau prendre le dessus, en misant sur les dividendes attendus de la croissance pour s’épargner les efforts indispensables au redressement des comptes publics. Une récente information a aussi provoqué une douche froide : un sondage auprès des chefs d’entreprises indiquait que ceux-ci n’envisageaient pas d’accroître leurs investissements cette année ni même l’an prochain, en les laissant ainsi au même niveau insuffisant. Mais c’est le sentiment que le gouvernement a renoncé à tailler à la hache dans les dépenses publiques qui mine aujourd’hui la confiance dans les réformes. Emmanuel Macron a pourtant averti qu’il fallait prendre en compte la durée du quinquennat pour juger de l’action publique, alors que nombreuses sont les voix qui s’élèvent pour souligner que c’est au début du mandat qu’il faut agir, car, au fil des mois les résistances au changement s’organisent et deviennent de plus en plus fortes. D’autant que l’horizon géopolitique est loin d’être serein et que les marchés boursiers , emportés par un emballement vertigineux, notamment aux Etats-Unis deviennent de plus en plus nerveux.
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