Pourquoi il est absurde de considérer comme les Pinçon-Charlot que les riches font le malheur des pauvres<!-- --> | Atlantico.fr
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Le dernier ouvrage de M. et Mme Pinçon-Charlot dénonce "l’accaparement d’une grande partie des richesses" par les riches.
Le dernier ouvrage de M. et Mme Pinçon-Charlot dénonce "l’accaparement d’une grande partie des richesses" par les riches.
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Les riches, entre fantasmes et réalité

"La violence des riches", dernier ouvrage de Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, tire à boulets rouges sur le rôle des hauts revenus dans l'accroissement des inégalités. Une théorie aux relents passéistes et marxisants. Deuxième épisode de notre série "Les riches, entre fantasmes et réalité".

Nicolas Lecaussin

Nicolas Lecaussin

Nicolas Lecaussin est directeur du développement de l'IREF - Institut de Recherches Economiques et Fiscales. Il est aussi fondateur de Entrepreneur Junior

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Atlantico : Le dernier ouvrage de M. et Mme Pinçon-Charlot, "La violence des riches", revisite les théories des inégalités en dénonçant notamment une "violence de classe" et "l’accaparement d’une grande partie des richesses" par les riches. Quelles visions de la société ce livre révèle-t-il ? Pensez vous qu'elle soit lucide pour décrire les phénomènes sociaux d'aujourd'hui ?

Nicolas Lecaussin :Le livre « La violence des riches » s’inscrit dans la catégorie d’ouvrages marxisants écrits par des fonctionnaires et qui, au nom d’une soi-disant « justice sociale », dénoncent ceux qu’ils considèrent comme « riches » ainsi que les inégalités sociales. Thomas Piketty s’inscrit dans la même catégorie. En désignant à la vindicte populaire une catégorie sociale aux contours d’ailleurs assez floues. Les riches leur servent de boucs-émissaires comme autrefois les koulaks ou les juifs… Le comble c’est que ces idéologues ne savent pas vraiment qui sont les riches d’aujourd’hui. Leur analyse est faite en fonction de leurs croyances et non pas en fonction des réalités.

Lire aussi le premier épisode de notre série "Les riches, entre fantasmes et réalité" : "Comment les 0.01% des plus riches ont pu tout rafler pendant la crise"

On retrouve derrière cette argumentation l'idée que les revenus du capital impactent à la baisse ceux du travail. Partagez vous ce constat ?

Cette salade qui est servie régulièrement par une (très) grande partie de nos politiques – de droite et de gauche – a été plusieurs fois démentie autant en France que dans d’autres pays membres de l’OCDE. Même l’INSEE a publié en 2009 un rapport qui montrait que depuis 20 ans, on ne voit pas du tout une augmentation des revenus du capital au détriment des salaires. Mais ce mythe a encore la peau dure…. D’ailleurs, il faudrait que cesse cette nomenclature statistique entre travail et capital : on n’est pas obligé de se plier à l’idéologie marxiste. Les entrepreneurs individuels ne travaillent-ils pas ? Et les ouvriers n’ont-ils pas le droit d’avoir un compte rémunéré ?

Fraude et exil fiscal, malversations financières, justice de classe : les sociologues à l’origine de cet ouvrage vont jusqu’à évoquer « la délinquance des riches ». Ce phénomène est-il réel ou exagéré ?

Ce qui est quand même incroyable c’est que pour ces auteurs, le riche est un délinquant en puissance ! Faut-il donc rester pauvre ? Bien entendu, il y a des gens plus fortunés qui ont fraudé et aussi des gens moyens qui volent, ce n’est pas pour autant la majorité. Le terme de justice implique celui de vol. Si l’on est riche, cela veut dire qu’on a forcément volé quelqu’un ? Les Pinçon Charlot devraient savoir que les riches d’aujourd’hui ne sont plus les nobles d’hier : parmi les premières fortunes, on compte Bernard Arnault (1ère fortune de France avec 21.2 Mds d’euros), Gérard Mulliez (2ème avec 21 Mds) et Liliane Bettencourt (3ème avec 17.5 Mds d’euros) ou bien Vincent Bolloré (10ème avec 3.8 Mds d’euros). La plupart du temps on parle de ces riches avec mépris, en révélant leur fortune et en la comparant aux salaires des Français ou en les réduisant à des faits divers comme le conflit au sein de la famille Bettencourt, entre la mère et la fille. Pourtant, toutes ces fortunes représentent des entreprises, des centaines de milliers d’emplois et aussi des milliards d’impôt pour l’Etat. Faisons un calcul simple. Bernard Arnault, première fortune de France, c’est le groupe LVMH, c’est-à-dire 80 000 emplois. Gérard Mulliez, deuxième fortune, c’est aussi le groupe Auchan, donc 262 000 emplois. Liliane Bettencourt c’est L’Oréal (66 000 emplois). Parmi les 10 premières fortunes de France, nous trouvons, en plus de ceux déjà cités, Bertrand Puech (Groupe Hermès), François Pinault (PPR Distribution), Serge Dassault (Groupe Dassault), Margarita Louis-Dreyfus (Groupe Louis Dreyfus), Pierre Castel (Groupe Castel Frères), Alain Wertheimer (Chanel Luxe). Ils représentent plus de 700 000 emplois ! Rien que pour les 10 premières fortunes ! Si l’on compte les emplois créés par la totalité des 500 fortunes professionnelles du classement, nous arrivons à des millions d’emplois. 

Le ressentiment contre les riches progresse dans le système mondialisé actuel. Constituent-ils un bouc-émissaire facile alors que la classe politique semble à bien des égards démissionnaire ?

C’est toujours utile de trouver des boucs-émissaires. Lorsque l’économie va mal, c’est la faute à la mondialisation, aux Etats-Unis, à la Chine ou aux... riches. C’est facile car ce n’est jamais la faute des mauvaises politiques économiques mises en place par des décideurs qui ne comprennent rien à l’économie.

Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon considèrent que les riches ont une grande responsabilité dans le creusement des inégalités. Peut-on dire concrètement que l'accroissement des hauts revenus provoque une hausse mécanique des inégalités ? Sinon, quels autres phénomènes contribuent à les creuser ?

Il est d’abord faux de dire que les riches ne paient pas d’impôts. En France, en 2011, les 30 % des foyers déclarant les plus hauts revenus ont réglé 87% de l’impôt sur le revenu avant application des crédits et réductions divers et 95 % de l’impôt net, de leur côté les 10% des plus riches ont payé environ 70% du total de l’impôt sur le revenu. Ensuite, l’histoire montre qu’une plus forte taxation des riches n’augmente pas les rentrées fiscales. En 1936, le Front populaire instaure un taux supérieur de 40% pour les contribuables de la tranche la plus élevée. En 1981, les socialistes appliquent une tranche à 65 % assortie de majorations d’impôts applicables aux contribuables les plus riches. Dans les deux cas, après la hausse des taux, les rentrées fiscales des plus riches ont diminué jusqu’à 20%. La même situation s’est rencontrée aussi aux États-Unis. Lorsque le taux d’imposition des revenus comprenait une tranche de 91 % dans les années 1970 et par la suite de 70 %, les rentrées représentaient moins de 8% du PIB. Lorsque les taux ont été abaissés et le nombre de tranches diminué sous Reagan et Clinton, les rentrées fiscales ont augmenté, atteignant même 9,4% du PIB dans les années 1997-2002.

Une société qui favorise les hauts revenus est-elle forcément nocive tant sur le plan économique que social ? Au contraire, on a besoin de riches. Plus on a de riches, moins il y a de pauvres. 

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