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Pour les milieux d’affaires, E. Macron doit retrouver une majorité politique et fabriquer un consensus social. C’est la quadrature du cercle
©AFP/Ludovic MARIN

Atlantico Business

Les chefs d’entreprises ne veulent pas payer les factures d’une réforme des retraites qui ne plait à personne. Mais demandent surtout au chef de l’État de restaurer les conditions de la prospérité économique.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Les chefs d’entreprise sont un peu effrayés à l’idée que le chef de l’Etat ressorte le carnet de chèques pour calmer le climat social qui hypothèque les conditions d’un retour durable à la croissance. Ils se souviennent de la façon dont Emmanuel Macron a convaincu les gilets jaunes de dégager les ronds points et de se remettre au travail. Beaucoup de discussions dans des grands débats interminables et beaucoup de gros chèques pour améliorer les trésoreries, mais aucune réforme en profondeur pour éviter une nouvelle grogne sociale.  

Les chefs d’entreprise se souviennent aussi de la façon dont le chef de l’Etat a géré la crise du Covid qui a touché le monde entier. Ils s’en souviennent et se félicitent du quoi qu’il en coute, parce que les sommes colossales engagées (minimum 250 Milliards d’euros ) ont permis de protéger les actifs de production et les contrats de travail. Ils s’en félicitent parce qu’il y a eu un retour sur investissement avec une reprise de la croissance, de l’emploi, de la consommation… Donc d’une certaine façon, le quoi qu’il en coute a été autofinancé.

Ils savent aussi la façon dont il a fallu gérer les conséquences inflationnistes de la guerre en Ukraine. Mais sur ce dossier, les chefs d’entreprises sont plus nuancés. Les aides à l’Ukraine sont malheureusement inévitables, elles feront, elles aussi, l’objet d’un retour sur investissement en protégeant les valeurs propres aux grandes démocraties. Donc inévitables. 

Mais le financement des boucliers anti-inflation (sur l’énergie et les biens de première nécessité) sont certes très généreux socialement, mais beaucoup moins vertueux parce qu’ils reviennent à dispenser la population dans son ensemble de payer sa quote part du maintien de l’ordre géopolitique. 

Maintenant, si la situation économique nationale n’est pas catastrophique, elle porte à terme des risques. 

Elle n’est pas catastrophique parce que les fondamentaux du système sont protégés par l’État.  Les moteurs de la consommation, de l’investissement tournent bien. Les entreprises qui travaillent sur le marché mondial tournent bien mais elles ne sont pas assez nombreuses  ( le luxe , l’énergie , l’aéronautique et l’agroalimentaire).

Cette situation macroéconomique porte des risques liés au poids de l’État, à l’endettement de la sphère publique  ( presque 120% du PIB),  à des dépenses publiques et sociales excessives ( plus de 60 % du PIB ), à un déficit public trop lourd.  Toutes ces charges expliquent que la compétitivité externe soit plombée avec des exportations insuffisantes. Le modèle économique globale n’est pas sécurisé. 

Cette situation en risque de permet pas à la gouvernance française de tenir sa promesse de retrouver la prospérité économique. On ne peut pas raconter que la génération suivante vivra mieux que la précédente. Sauf à faire des réformes de structure qui permettraient de restaurer la charpente du modèle français pour qu’il retrouve dans 20 ans ; la force qu’il avait pendant les Trente glorieuses. 

L’exemple du débat sur la réforme des retraites est symptomatique du mal français. Tout le monde est d’accord pour reconnaitre que le système paritaire doit être renforcé mais cette réforme gène tellement de monde que personne n’en veut. Les problèmes rencontrés face à la retraite ressortiront dès qu’on touchera à l’organisation de l'État, à la réduction des dépenses publiques… Puisque le contrat de confiance entre la gouvernance et la population est cassé. 

Les chefs d’entreprises considèrent qu’il faut tout faire pour réécrire ce contrat de confiance sinon la gouvernance reviendra à des expédients qui ne feront qu’alourdir les dépenses de fonctionnement pour calmer le jeu.  C’est un peu ce qu’ont fait les présidents Chirac et Hollande à leur manière, ils ont éteint la plupart des conflit sociaux en évitant des dossiers qui dérangent.  Le revers de la médaille est que pendant ces périodes, on n’a pas fait beaucoup d’investissements structurants pour l’avenir. 

Si Emmanuel Macron veut tenir sa promesse de modernisation et retrouver les chemins de la prospérité économique, il doit absolument retrouver une majorité politique autour de son programme…et restaurer un consensus social.  

C’est compliqué mais ça n’est pas impossible.  

-Sur le terrain politique, rien de ce qu’il a fait jusqu’alors était anticonstitutionnel. Il a utilisé le chemin démocratique un peu tortueux mais légal avec une majorité relative.  Et pour une grande partie de la population, ce chemin escarpé et pavé de 49.3 n’était pas pour autant légitime. Les spécialistes de sciences politiques ont beaucoup de solutions pour améliorer l’utilisation de la constitution.  C’est une légitimité de la violence ou de la puissance qui ne peut que conduire à des formes révolutionnaires dont la majorité populaire ne veut pas davantage. D’où le blocage. 

La seule façon de donner une légitimité forte et indiscutables aux partenaires sociaux serait d’accroitre leur représentativité.  Les manifestations de rue regroupent au maximum 1 million de personne, et les mouvements syndicaux pèsent moins de 11% des salariés. La solution serait de rendre obligatoire la syndicalisation dans le privé comme dans le public et dans ce cas, la parole syndicale aurait du poids. Sans rendre l’adhésion obligatoire, on pourrait l’inciter très fortement et c’est aux syndicats de le faire. 

Mais globalement, le pouvoir politique pourrait travailler à l’amélioration de cette représentativité. Les chefs d’entreprises ne sont pas contre, ils ont besoin des contre-pouvoirs puissants, responsables, co-gérants du modèle social et des conditions de travail. Le problème c’est que jusqu’à maintenant, Emmanuel Macron a beaucoup affaibli les corps intermédiaires et assez peu considéré les syndicats comme des partenaires.  

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