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Personnalités en danger, dissidences, Front national...
Les législatives de tous les dangers ?
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Majorité à l'arraché ?

Si les élections législatives ont toujours amplifié le résultat de l'élection présidentielle, celles de 2012 pourraient être plus serrées que prévu.

Frédéric Dabi

Frédéric Dabi

Frédéric Dabi est directeur général adjoint de l'Ifop et directeur du pôle Opinion et Stratégies d’entreprise.

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Atlantico : A deux semaines du premier tour des élections législatives, ce scrutin s'annonce comme celui de tous les dangers pour la droite. Comment s'annoncent les résultats ?

Frédéric Dabi : Depuis l'inversion du calendrier électoral, les élections législatives ont perdu beaucoup de leur autonomie. Les scrutins ayant lieu dans la foulée d'une élection présidentielle ont toujours amplifié son résultat. C'était le cas en 1981 pour la gauche, en 2002 et 2007 pour la droite, malgré le petit ressac pour la droite au second tour en 2007, pour cause de polémique sur la TVA sociale.

On a aujourd'hui un rapport de force qui est favorable à la gauche. On a sorti une enquête en milieu de semaine dernière pour Europe 1 et Paris Match, qui montre que l'UMP (33%) et le PS (34,5%) sont au coude à coude. Mais dans une élection législative il faut voir les blocs politique, et le bloc de gauche PS-Europe écologie Les Verts-Front de gauche est à 45 / 46% quand le bloc droite parlementaire UMP-Nouveau centre-divers droite est à peine à 34%. On est quand même sur un mouvement favorable à la gauche, avec une droite en reflux de 12 points par rapport au premier tour de 2007 et des Français qui semblent être dans une logique de cohérence, c'est à dire de donner à François Hollande les moyens d'appliquer sa politique. Pour l'instant, les Français sont dans une logique de confirmation et de cohérence entre le choix présidentiel et législatif.

Si on veut parler de la droite, il faut noter deux choses. Par rapport au scrutin précédent, les estimations pour l'UMP aux législatives sont honorables : elles sont plus élevées que le score de Nicolas Sarkozy au premier tour. Mais le problème est la question épineuse du Front national. Dans nos deux dernières enquêtes, il est à 16% : c'est moins que le score de Marine Le Pen le 22 avril 2012, mais avec ce score il pourra se maintenir dans de nombreuses circonscriptions et ainsi empoisonner l'UMP.

Cette configuration se répète de chaque côté : le PS peut être handicapé par le Front de gauche, l'UMP par le Front national. Cela peut-il avoir un impact significatif ?

Je ne ferais pas du tout ce parallèle là. Le Front de gauche est beaucoup moins un problème pour le PS que ne l'est le FN pour l'UMP.On sait bien que les candidats de gauche pratiquent la discipline républicaine : il n'y aura pas un candidat du Front de gauche qui va se maintenir face à un candidat du PS ; peut-être 1 ou 2 à la rigueur. Alors que Marine Le Pen et Florian Philippot l'ont clairement dit : le FN se maintiendra partout où il peut se maintenir, sauf pour des candidats de gauche ou de droite qui sont clairement disciples du Front national de Marine Le Pen. On est sur deux cas clairement différents. Mais il faut est prudent, il est difficile de dire dans combien de cas il y aura des triangulaires, car cela dépendra du maintien au second tour qui est indexé au taux de participation.

Mais le Front de gauche peut devenir un problème pour le PS, après les législatives, si ce dernier n'a pas la majorité absolue, s'il a une majorité relative, un peu comme Michel Rocard en 1988, qui avait dû composer parfois avec le Parti communiste, parfois avec les députés centristes.

Un autre phénomène de ces élections est la question des dissidences, dont on entend beaucoup parler. Est-ce un phénomène en augmentation ?

Ce qui est nouveau, c'est cet accord Europe écologie – PS qui fait que beaucoup de candidats socialistes ont dû céder la place. Certains ne l'ont pas fait. Il y a deux cas : d'une part les candidats PS qui passent outre les consignes de Solférino et se maintiennent sous une étiquette socialiste face à un candidat EELV. Mais il y a aussi des circonscriptions de droites où il y a des dissidences, on peut citer celle de Didier Jullia (2e circonscription de Seine-et-Marne) où Frédéric Valletoux part en dissidence contre Valérie Lacroute, ou Asnière-Colombes avec Rama Yade face à Manuel Aeschlimann.

Plusieurs ministres ont annoncé qu'ils ne seraient pas candidats, suite à la consigne selon laquelle tout ministre battu perdrait son portefeuille. Est-ce à cause des sondages plus serrés que prévu entre UMP et PS ?

Il y a actuellement deux ministres qui ont renoncé à se présenter : Christiane Taubira, qui a été élue sans discontinuer depuis 1993, et Najat Vallaud-Belkacem. Je ne connais pas leurs raisons, mais il est clair que la circonscription du Rhône de Dominique Perben est historiquement difficile. 

Cette annonce de Jean-Marc Ayrault n'était pas une surprise : ça avait été fait en 2007, en 2002, sous Michel Rocard... Un ministre a plus de mal à se présenter devant le Parlement s'il n'a pas reçu l'onction du suffrage universel. Et dans ce cadre, beaucoup de ministres partent à la bataille. Ca avait été le cas en 2007, et très peu - comme Alain Juppé - étaient restés sur le carré.

Cette fois, en 2012, plusieurs ministres sont en difficulté, en particulier Stéphane Le Foll, Aurélie Fillipetti et Marie-Arlette Carlotti face à Renaud Muselier. Mais ils ne sont pas sortants : leur seul référent est le score de François Hollande à la présidentielle et le rapport de force gauche-droite issu de l'élection. Il peut y avoir pour ces 3 ministres un mouvement d’implication de la tendance du 22 avril.

De manière générale, plusieurs ténors de droite comme de gauche semblent en difficulté. Comment expliquer que leur situation soit si fragile malgré leur renom ?

Je ne dirais pas que leur situation soit fragile, car c'est extrêmement divers. Il y a des ténors de gauche comme de droite qui n'auront aucun mal à se faire élire, à l'instar de François Fillon à droite et Jean-Marc Ayrault à gauche. Il y a aussi des gens qui auront des difficultés à se faire élire, notamment d'anciens ministres qui ont vu François Hollande faire de bons scores ou arriver majoritaire dans leur circonscription. C'est le cas de Xavier Bertrand, de Laurent Wauquiez, de Nathalie Kosciusko-Morizet.

Il y a vraiment deux logiques : d'une part l'effet de souffle de l'élection présidentielle, mais aussi une logique d'équation personnelle. C'est vrai que même si Hollande est arrivé en tête dans sa circonscription, Xavier Bertrand a un vrai lien personnel avec son fief de Saint-Quentin. Même chose pour Laurent Wauquiez, qui au niveau personnel est dans une logique de victoire. Ces deux logiques se font face, c'est vrai qu'un nom ne suffit plus, il faut faire campagne et on voit les ténors faire des campagnes très actives, d'autant plus qu'elle est courte.

L'Ifop a publié deux sondages ce dimanche dans le JDD qui prédisent une bataille difficile pour François Bayrou et Nathalie Kosciusko-Morizet. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Concernant François Bayrou : il est intéressant de voir que par sa relation personnelle à sa circonscription, il arrive un peu à corriger la tendance médiocre pour lui de la présidentielle, avec 29% au premier tour. Pour autant, ça ne suffit pas, et c'est pour cela qu'il a perdu la municipale en 2008. Et là, aussi bien en duel qu'en triangulaire – et on va plus vers une triangulaire – il serait battu. Il récolterait 33% au second tour en cas de triangulaire (41% pour le PS et 26% pour l’UMP) et 49,5% des voix en cas de duel avec le PS.

Pour Nathalie Kosciusko-Morizet, c'est une autre logique : c'est une sorte de précipité de la situation de la droite depuis 5 ans : elle fera un très bon premier tour, largement en tête avec 41%, mais elle risque de pâtir du problème qu'à connu la droite parlementaire à chaque élection depuis 2007 : la réserve de voix. Elle en a très peu, alors que le PS disposera sans doute de bons reports des candidats du Front de gauche et d'Europe Eécologie. Elle aura sans doute des reports insuffisants du FN et du Modem. Ca peut être une élection test de ce point de vue là.

Propos recueillis par Morgan Bourven

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