Théorie et pratique
Parité en France : réalité ou fiction ?
Des règles laissent de plus en plus de place aux femmes. Mais les clichés et les traditions ont la vie dure.
Certes le statut des femmes – de manière générale - a évolué de manière spectaculaire depuis le Code Napoléon. Les femmes ont accompli bien plus qu’elles n’auraient pu l’imaginer en 1804. Grâce aux combats menés par les féministes et aux convictions de parlementaires éclairés, les droits de la Femme ne sont plus de vains mots.
Néanmoins, comme de nombreuses études continuent de le démontrer régulièrement, les disparités restent une réalité - et particulièrement dans le monde du travail. Si les droits de la Femme sont reconnus, l’égalité hommes- femmes au travail reste encore un objectif à atteindre.
La France à la traîne
Le Forum économique mondial (WEF), dans son classement annuel 2010 de la parité, fait apparaître que la France est particulièrement à la traîne dans ce domaine, il n’y a que l’Italie, la Grèce et la République Tchèque qui fassent pire… En terme de salaire, les femmes gagnent en moyenne 22% de moins que les hommes à travail égal.
Pourtant, des études menées par l’OCDE ont confirmé que la réduction des inégalités entre les sexes augmente la productivité et la croissance et que les avantages économiques liés à un plus grand nombre de femmes dans les effectifs peuvent être considérables. Selon de récentes recherches, la diminution de l'écart d'emploi entre hommes et femmes auraient d'énormes répercussions pour les économies développées, renforçant le PIB américain, européen ou japonais de 9 à presque 16%.
Réduire les inégalités entre les sexes dans ces régions pourrait également jouer un rôle clé dans la résolution des problèmes à venir que posent le vieillissement des populations et le problème de financement des retraites. Ces problèmes permettront probablement de remodeler le monde du travail et d’amener les entreprises à se tourner de plus en plus vers les effectifs féminins.
«Une meilleure utilisation de la population féminine mondiale pourrait augmenter la croissance économique, réduire la pauvreté, améliorer le bien-être et contribuer au développement durable de tous les pays » affirme un rapport de l'OCDE en 2010.
Il est tout de même intéressant de constater qu’aujourd’hui, sur 600 entreprises interrogées dans 20 pays et 16 secteurs d’activité différents - employant entre 1000 et 30000 salariés - seulement 5% d’entre elles sont dirigées par une femme.
La Finlande (13%), la Norvège (12%), la Turquie (12%), l’Italie (11%) et le Brésil (11%) affichent le plus fort pourcentage de femmes PDG au sein des entreprises interrogées par le World Economic Forum dans son rapport The Corporate Gender Gap fin 2010.
D'où vient la ségrégation hommes-femmes au travail ?
La ségrégation femmes-hommes sur le marché du travail existe bel et bien. Les femmes n’ont pas les mêmes opportunités que les hommes, que ce soit en termes de salaires ou de perspectives de carrière. Cette disparité est-elle le fruit d’une construction sociale ? Du poids de la tradition culturelle ? Le résultat d’une scolarité orientée depuis toujours vers les mêmes filières ?
Selon plusieurs analyses menées sur une période de 10 ans et se basant sur des données INSEE - les inégalités de salaire entre les deux sexes, laissent apparaître un écart qui peut atteindre jusqu’à 15K€ par an entre une femme et un homme cadres de 50 ans, habitant en région parisienne et travaillant dans le secteur des services...
L’écart de rémunération entre les femmes et les hommes exerce également une incidence majeure sur les revenus des femmes non seulement durant leur vie professionnelle, mais également durant leur retraite. Une étude publiée en juillet 2010 par l’OFCE montre que les femmes qui n’ont jamais interrompu leur activité professionnelle sont pénalisées et gagnent 17% de moins en moyenne que les hommes. Une part de cet écart vient du fait que les femmes travaillent plus souvent à temps partiel, qu’elles évoluent dans des métiers moins rémunérateurs et qu’elles font moins d’heures supplémentaires, mais l’essentiel, soit 70% de cette différence, reste inexpliqué.
Réduire les inégalités salariales, faciliter l’accès à la formation professionnelle pour les femmes, faire en sorte que la maternité ne freine pas les évolutions de carrière, mettre fin au déséquilibre entre les hommes et les femmes lors des recrutements, beaucoup de mesures continuent d’être prises et de lois votées pour inciter les entreprises à la parité.
Mais au final, les lois adoptées en faveur de l’égalité hommes-femmes depuis des décennies n’ont eu que peu d’impact sur le terrain. C’est ce qu’avait révélé un rapport remis par Mme Grésy, Inspectrice des Affaires Sociales, en 2009 au Ministre du Travail, M. Xavier Darcos.
Avec 66% de femmes actives en 2009 - et ce taux ne cesse d’augmenter depuis les années soixante - il n’est que temps pour les entreprises d’œuvrer à réduire les écarts salariaux, à augmenter la représentation des femmes et à leur offrir plus souvent l’accès à des postes à responsabilité.
Les entreprises ont un vrai rôle à jouer pour favoriser la présence des femmes au travail. 78% des femmes ayant au moins un enfant de moins de 3 ans sont actives. Beaucoup d’entreprises ont réfléchi à cette situation et mettent progressivement en place des dispositifs permettant de les aider concrètement en aménageant les horaires, les conditions du congé maternité... mais, beaucoup d’autres sont encore à la traîne.
De nouvelles règles pour aller plus loin
Pour renforcer la place des femmes en politique, la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 a modifié l’article 1er de la Constitution, désormais ainsi présenté : « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales. »
Le 20 Janvier 2010, l'Assemblée nationale a adopté la proposition de loi relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance et à l'égalité professionnelle déposée par Jean-François Copé et Marie-Jo Zimmermann, en première lecture. Les principales dispositions de ce texte prévoient que la proportion des administrateurs de chaque sexe ne peut pas être inférieure à 40%. Un échéancier prévoit un quota de 20 % au terme d’un délai de 3 ans à compter de la promulgation de la loi, puis un quota de 40 % 6 ans après.
Selon une étude de l’INSEE parue le 2 mars 2011, il apparaît qu’1 Français sur 4 estime que les hommes doivent avoir la priorité en matière d’embauche en période de crise. La bonne nouvelle étant que seulement 10% des jeunes 20-24 ans sont d’accord avec cette idée.
Encore selon cette étude, 63% des Français pensent qu’une femme doit avoir fondé une famille pour être épanouie. Les clichés ont apparemment encore de beaux jours devant eux... mais les mentalités évoluent. L’Insee a noté - entre 2005 et 2008 - une augmentation de 6 points des opinions défavorables sur la question d’accorder en priorité les emplois aux hommes en cas de crise économique.
Au cours des prochains mois, la Commission Européenne et plusieurs gouvernements de pays de l’UE ont prévu de rencontrer les dirigeants des principales entreprises européennes pour que ceux-ci leur présentent leurs propositions pour intégrer davantage de femmes à des postes de responsabilité. Sans progrès notables, L’Union Européenne va, à son tour, imposer des quotas afin d’équilibrer la représentation hommes/femmes au sein des entreprises.
Des mesures ont été prises, d’autres suivront au fil des années, les principales lois ont été votées en France comme en Europe dont les textes veulent garantir une égalité de traitement entre hommes et femmes au travail. Les femmes devraient ainsi pouvoir justement occuper la place qui leur revient - à la seule condition que les entreprises jouent le jeu, qu’elles nomment plus de femmes à des postes à responsabilités et gèrent leurs effectifs équitablement.
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