Minecraft et autres jeux vidéo auxquels vous pouvez laisser jouer vos enfants sans danger<!-- --> | Atlantico.fr
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Tous les jeux video ne sont pas mauvais pour les enfants.
Tous les jeux video ne sont pas mauvais pour les enfants.
©Reuters

Les jeux vidéo bons pour les enfants

Les jeux vidéo ne sont pas mauvais pour les enfants, le tout est d'accompagner leur utilisation comme on le ferait dans le cadre de n'importe quelle activité. Ils apportent même bon nombre de compétences. Le véritable enjeu est de les transférer à la réalité.

Vanessa Lalo

Vanessa Lalo

Vanessa Lalo est psychologue clinicienne, spécialisée dans les addictions et les nouvelles technologies. Elle travaille sur tout ce qui touche « aux écrans » au sens large du terme : les usages généraux sociologiques, les effets sur la société et sur les personnes d’un point de vue subjectif.

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Atlantico : Minecraft passionne la jeunesse avec 50 millions de licences vendues. Au-delà de ses attraits pour les grands groupes comme Microsoft qui l'a récemment racheté, le jeu vidéo fait preuve de nombre d'atouts à même de séduire les parents des générations connectées. En quoi consiste Minecraft et quelles capacités ce jeu amène-t-il à développer chez l'enfant?

Vanessa Lalo : Minecraft fait partie des jeux bac à sable. On peut faire tout ce qu'on souhaite, mais il n'y a pas d'objectif de jeu. On est dans un environnement libre, où, comme le dit la phrase de Lavoisier : "rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme". Le jeu est entièrement évolutif et le joueur y agit à sa guise. Il recrée toutes les constructions qu'il souhaite, comme son école en cours de techno, ou le Louvre. Un groupe de 40 personnes a eu envie de le recréer : ça a demandé des semaines de travail, plan à l'appui, avec la mise à l'échelle… On peut aussi donner un thème aléatoire et se retrouver. Il y a une hiérarchie sociale qui va se mettre en place. On voit vraiment tous les reflets de la société qui se retrouvent sur de la créativité.

Il y a un aspect collaboratif et créatif et l'univers est libre. On peut casser un arbre, le récupérer dans son inventaire et le remettre où on veut. Au fur et à mesure qu'on acquiert des compétences, on peut casser des choses de plus en plus solides. Certains y vont pour construire une maison comme dans Les Sims. Ils vont rêver de maison dans les arbres ou de maison cachée et reproduire l'idéal d'ermite. L'important, c'est vraiment cet aspect collaboratif. Sinon, dans Minecraft, on s'ennuie vite tout seul. Une fois tout construit, détruit, c'est un peu comme les Légo. Sur Minecraft on garde la trace de ce qu'on a fait. Cet aspect est très important. Il fait qu'on se sent immortel.

Le succès de Minecraft vient aussi du retour aux valeurs anciennes. Les jeux aujourd'hui ont de plus en plus des graphismes hyper réalistes. Or, les enfants sont aussi intéressés par les choses "moches" avec lesquelles on peut tout faire. C'est rassurant parce que ça ne nous ressemble pas. Cela crée une distance supplémentaire entre soi et le jeu, ce qui permet de mieux se l'approprier.

Parmi la multitude de jeux vidéo, comment reconnaître ceux qui ont des effets positifs pour les enfants ? 

Il faut que l'on arrive avec le jeux vidéo à avoir la même réaction qu'avec le livre. Un parent ne demande pas à un expert quel type de livre faire lire à son enfant. Pour le jeu vidéo, il faut arriver à un réflexe similaire. Il faut neutraliser cet objet, arrêter d'être angoissé par rapport à des outils qui ne font rien seuls. Il faut se centrer sur soi-même, voir quelles sont ses propres limites face à ces objets, ces outils. Se poser des questions sur ce qu'on n'a pas envie de voir chez soi et à quel type de jeu on a envie de jouer avec son enfant.

Aujourd'hui, il y a un retour vers le rétrogaming parce que le jeu est un sujet de conflit (avec les parents, les élus). Les anciens jeux sont rassurants. Nous avons déjà pu prendre du recul historique sur nos vieux jeux. Minecraft, composé uniquement de cubes et de pixels, s'inscrit dans cette mouvance "retro". Beaucoup de jeunes sont heureux de s'approcher des jeux "de l'époque de leurs parents". Ils sont fiers d'avoir des jeux qui ont une valeur historique. il y a un vrai phénomène de société. Les enfants qui ne jouent pas à Minecraft à partir de la cinquième, quatrième, troisième sont un peu exclus.

Quels sont les meilleurs jeux, à la fois ludique et pédagogique, en fonction de l'âge ? 

  • Jeux "bac à sable"

Dans les jeux des gros éditeurs, nous pouvons citer SimCity, dont le but est de gérer une ville en tant que maire et de faire face à de nombreuses situations, tout en construisant sa ville. Ce jeu de simulation permet d'expérimenter beaucoup d'actions et leurs conséquences et développe tout particulièrement les capacités de gestion, de calcul, d'anticipation, de réactivité... Jouable dès 7 ans et tout au long de la vie.

Les Sims, sur les mêmes principes que Minecraft, est un jeu bac à sable dans lequel on peut faire entièrement tout ce que l'on souhaite. Ce qui est très intéressant avec les Sims, c'est de voir les interactions sociales et toute l'expérimentation qu'on peut mettre en place par rapport à son avatar (créé plus ou moins proche de soi) et sa manière d'avoir envie d'agencer soi-même sa maison, ses habits, soi-même à travers un jeu. Dans Minecraft, on est vraiment dans un univers libre où on construit, on déconstruit. Dans les Sims, on se construit une vie un peu parallèle et c'est ça qui est vraiment très intéressant. Toutes les interactions avec les différents personnages vont avoir un impact sur nous. Ca nous permet d'expérimenter au plus près certaines situations en dépassant éventuellement certaines limites, ce qu'on ne pourrait pas forcément faire dans la réalité. Les Sims c'est d'abord un jeu qui est beaucoup joué par les petites filles, car il a aussi beaucoup l'aspect de "maison de poupée virtuelle".

  • Jeu avec interactions sociales

Dans les jeux strictement non violents qu'on peut plébisciter sans aucun danger, on peut citer un jeu comme Journey qui a été développé par That Game Compagny. Cela se joue sur la Playstation 3 et c'est un jeu qui est totalement symbolique et poétique par rapport aux enjeux de la vie. On ne peut pas mourir dans ce jeu, on ne peut que persévérer et avancer vers de l'inconnu, quelque part. On ne sait pas vers quoi on est en train d'aller mais quoi qu'il en soit, on avance vers ce chemin. Le but du jeu, c'est de contempler, se balader, entrer en interaction avec d'autres joueurs sans avoir jamais de possibilité de les contacter autrement que par une touche qui fait du bruit. Ca développe tous les aspects communicationnels d'une manière inédite puisqu'on n'a jamais communiqué de cette manière-là avec une seule touche.

Quand vous voulez de l'aide, vous allez appuyer sur une touche qui va faire un bruit, si vous voulez gronder, remercier quelqu'un, vous allez appuyer sur la même touche. C'est uniquement en fonction de votre manière à vous d'appréhender cette touche que vous allez pouvoir vous comprendre, car on ne peut pas passer par des tchats écrits… On y trouve cette solidarité absolue qui fait que, comme on ne peut pas se tuer, dès qu'on rencontre quelqu'un, on est dans la solidarité, dans des enjeux positifs absolus. Il fait partie des jeux incroyables parce que visuellement il est beau, le son est très beau, on peut se balader dans un univers et être dans une contemplation fascinante. On peut surtout aller au bout du jeu en comprenant que dans la vie, on rencontre des échecs, des moments difficiles, mais on arrive toujours à les dépasser, à vaincre les éléments négatifs qu'on rencontre sur notre chemin. Il y a aucun autre jeu qui soit sur ce même plan que ce jeu-là.

  • Jeu "Tower defense"

Plants versus zombies. Dans un tower defense, le but est - comme son nom l'indique - de se défendre. Dans Plants Vs Zombies, des zombies viennent assaillir notre maison et on doit mettre des plantes qui se défendent contre eux. C'est très intéressants au niveau des conflits intérieurs, puisque le zombie, c'est un peu l'entre deux du vivant et du mort, de l'enfant à l'adulte, un peu l'adolescent, c'est l'entre deux du dedans, du dehors. Le zombie a une particularité métaphorique. De l'autre côté, les plantes, c'est quelque part une métaphore de nos défenses naturelles. C'est très intéressant de pouvoir jouer avec différents conflits en regardant comment la personne va structurer sa défense. Va-t-elle structurer sa défense de matière symétrique, préférer des plantes jolies avec moins de puissances ou aller vers des plantes tout de suite très puissantes parce que ses conflits sont trop violents intérieurement? Il fait partie des jeux qui développent beaucoup la notion de gestion, de concentration, ça rejoue toute notre organisation interne. Il développe notre dextérité, des mécanismes de gestion, de planification. A chaque fois qu'on va mettre une ligne de plantes, il va falloir recueillir de l'argent pour pouvoir mettre une deuxième ligne, donc c'est de la gestion à part entière.

  • Jeux "puzzle"

Fez, un jeu indépendant, un jeu de plateforme dans lequel on doit évoluer. C'est un jeu de puzzle puisqu'à chaque fois, il faut découvrir une porte pour en découvrir la suivante, puis la suivante, etc. Surtout, ce qui est génial dans ce jeu, c'est qu'on doit tout le temps changer le sens de cet univers en 3D pour pouvoir continuer à avancer. On travaille en permanence l'abstraction spatiale, puisqu'il faut réussir à se repérer dans l'espace pour pouvoir continuer à avancer. Pour réussir à aller de porte en porte et de monde en monde, il faut mémoriser où on a été, il faut réussir à se repérer dans l'espace et sur une carte. On ne meurt pas, c'est sans danger, inoffensif. Au niveau cognitif, il apporte énormément de compétences : planification, abstraction spatiale, logique, mémorisation.

Portal 2, un jeu un peu plus compliqué, à partir de douze ans. C'est encore du jeu de puzzle où on doit réussir à trouver comment aller d'un point A à un point B, sachant qu'on ne sera pas que sur de la logique physique puisqu'il faut ouvrir un portail à un endroit et ouvrir un autre portail ailleurs pour pouvoir continuer son chemin. Donc, il faut tout le temps réussir à comprendre les règles de la physique avec les lois de la gravité, de l'abstraction spatiale parce que si on ne se repère pas, on n'y arrivera jamais. La logique et la planification vont être au cœur de ce type de jeu puisqu'il faut réfléchir énormément pour savoir comment aller de l'autre côté, contourner les obstacles mis là par le jeu. C'est un jeu utilisé par les professeurs de physique pour montrer les lois de la gravité et autres.

Braid est un jeu dans lequel on ne peut pas mourir. Le jeu se présente comme un jeu de plate-forme classique, cependant, le héros dispose d'un pouvoir lui permettant de remonter le temps. Le joueur devra donc résoudre des énigmes en utilisant cette capacité spéciale, ce qui fait du jeu un mélange de plate-forme et de puzzle-game. C'est un jeu de puzzle de haut niveau, pas évident à mener à bien tout seul. D'où l'intérêt de jouer avec ses parents. Braid est un jeu de puzzle et de réflexion qui travaille sur la planification, la stratégie. On vit des expériences inédites avec ce type de jeu. Là, vous avez toute la liberté de faire n'importe quoi et de revenir en arrière. Vous allez avoir le droit de changer de possibilités de point de vue, d'élaborer de nouvelles stratégies.

  • Jeux pour les 4 ans

Il existe également des jeux éducatifs pour les petits, pour apprendre l'astronomie avec Star Walk Kids, s'amuser seul avec Little Chomp ou en famille avec Mucho Party et bien d'autres...

  • Jeux pour les 7/10 ans

Botanicula, Machinarium, Monument Valley sont des jeux extra à jouer dès l'enfance et géniaux pour les adultes également. Ils sont parfaits pour des enfants de 8/10 ans. Il y a aussi Paris 3D ou, pour ceux qui aiment la logique, Silly Family.

Tous ces jeux ont la même logique : jouer sur la persévérance, lutter contre la frustration et être dans un apprentissage inhérent aux jeux. On ne vous dit pas "tu vas apprendre telle ou telle chose", mais on apprend malgré soi. Ce ne sont pas des jeux bêtes et méchants sur lesquels on joue pour passer le temps. C'est vraiment des jeux qui ont une plus-value qui apportent énormément d'élément de réflexion, de planification. Tous ces jeux-là forcent à réfléchir au départ à toutes les suites d'actions logiques qu'on va mettre en place pour arriver à la fin.

C'est des jeux qui peuvent tous être joués avec les parents. L'enfant va savoir faire toutes les actions à l'écran, ce que le parent ne sait pas faire. Par contre, l'enfant ne va pas toujours avoir toutes les clefs de compréhensions pour réussir le puzzle. Le parent va pouvoir apporter sa compétence intellectuelle. On est sur un partage possible. Plus les enfants vont avoir besoin de leur parents pour réussir les jeux, plus on se retrouve dans une situation intéressante au niveau éducatif parce que ça crée du dialogue…

Après, c'est à chacun de se poser la question : "Qu'est-ce que j'ai envie de transmette ?" Il n'y a aucun jeu mauvais en terme pédagogique si les parents accompagnent le discours. Le jeu est un support d'échange. Quand on joue, on partage une expérience commune qui se fait de plus en plus rare dans notre société d'hyper consommation. A travers le jeu on partage une médiation. Angry bird, Mario Kart, Candy crush… tous les jeux apportent des compétences cognitives.

Quelles sont pour chacun d'entre eux les qualités qu'ils permettront de développer chez l'enfant ?

Tous les jeux permettent d'acquérir des compétences: planification stratégique, abstraction spatiale, psychomotricité, mémorisation, attention. Les jeux apportent un bienfait en termes de persévérance, de gestion de frustration, de tolérance, d'ouverture vers l'autre. Ils développent la curiosité intellectuelle. Les jeux vidéo peuvent amener un enfant à apprendre à faire du montage pour mettre sa vidéo sur Youtube, à utiliser Photoshop. Ils vont ouvrir sur tout un tas d'autres apprentissages qui vont se faire sans bruit.

Il faut après s'intéresser à la façon dont la compétence sociale que le jeune a acquis va pouvoir être accompagnée vers le réel. Le tout, ça va être de trouver les points de passage entre les valeurs des parents, les jeux et la réalité. Le jeu vidéo apporte beaucoup en anglais. Tout seul on se met à chercher, à apprendre. Après se pose le problème du transfert vers le réel.

Même lorsqu'un jeu est bien choisi, quels sont les conseils à dispenser ? 

Le premier conseil, c'est de regarder la signalétique PEGI (Pan European Game Information), classification sur l'âge auquel un jeu est adapté. Elle permet aux parent d'avoir une idée du type de programme et du contenu. La norme PEGI  est la seule norme commune actuellement sur laquelle s'appuyer.

Deuxièmement, on ne peut pas accompagner son enfant si on ne discute pas avec. Les parents doivent poser les questions pour savoir à quoi jouent leur enfant, avec qui et comment. Une fois commencé ce dialogue, tout se débloque. A travers les réponses, on va pouvoir adapter le type de jeux. Cela va être un support de médiation. Si on demande à son enfant de vous montrer son pseudo, son avatar, on va avoir des éléments de réponse. Un enfant adore parler de ses jeux vidéo. L'avatar est le reflet de son idéal. De même, les copains qu'il s'est fait dans le virtuel sont réellement présents. Les parents ne peuvent pas ne pas s'y intéresser.

Il n'y a pas de réponse globale, intéressez-vous à ce que font vos enfants. Il faut être dans l'accompagnement de la même manière qu'on le ferait avec un livre, un sport.

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