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Pourquoi cet été pourri en France, alors que l’Amérique du Nord bat des records historiques
de températures ?
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Pas juste

Les parapluies sont toujours de sortie dans la moitié nord de la France où la pluie, jour après jour, ne cesse de tomber. Au même moment, les États-Unis font face à une vague de chaleur historique : le premier semestre a été le plus chaud jamais enregistré dans le pays.

Frédéric Glassey

Frédéric Glassey

Frédéric Glassey est directeur des activités francophones de MétéoNews.

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Atlantico : Alors que la mi-juillet approche, la pluie tombe encore et toujours sur toute la moitié nord de la France. Comment expliquer que l’été ne soit toujours pas là ?

Frédéric Glassey : C’est une fausse impression. En météorologie, l’été commence par convention le 1er juin, pas le 23. Or, on a déjà eu des belles journées estivales sur la deuxième quinzaine de juin. On ne peut pas dire qu’on attend l’été, on en a déjà eu un aperçu.

Mais pour la plupart des gens, l’été commence au début des vacances... et effectivement, ces jours-ci, ce n'est pas vraiment ça : on a quasiment des averses tous les jours, il ne fait pas vraiment chaud… Pourquoi ? La réponse est très simple : le fameux anticyclone des Açores, au lieu de remonter vers chez nous, est resté aux Açores.Ce qui fait que la dépression sur les îles britanniques – on l’a d’ailleurs bien vu lors du tournoi de Wimbledon où de nombreux matchs ont été perturbés par la pluie – n’a pas beaucoup bougé depuis deux semaines et reste influente sur l’Europe occidentale, notamment sur la moitié nord de la France. Et elle nous apporte son lot d’instabilité, d’averses, et une situation où on a parfois de belles journées, mais qui ne durent jamais. Au bout d'un ou deux jours de temps agréable, ça se gâte à nouveau.

Cette position de l’anticyclone des Açores explique-t-elle aussi pourquoi la France apparaît coupée en deux, avec un beau temps dans le sud et des averses dans le nord ?

En partie, oui. Les situations régies par des vents d’ouest sont idéales pour générer un fort contraste entre le nord et le sud de la France. Ces jours-ci, on a du 17° en Bretagne et 20° à Paris, avec un ciel variable et des averses, alors que les nuages et perturbations n'arrivent pas sur la moitié sud, principalement sur la Provence et la Corse. Du coup, il fait beau et les températures y sont de 10 à 15 degrés plus élevées.

Ces jours-ci, la France est effectivement vraiment coupée en deux. Cette situation n’a pourtant rien d’exceptionnel en l’état. L’été, contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, n’est pas une garantie d’avoir du beau temps sur une longue période, du moins dans le nord de la France.

A partir de quand la situation pourrait-elle changer ?

A partir de lundi, l’anticyclone va revenir. On le sait. Mais on ne sait pas pour combien de temps : deux jours, trois jours, une semaine... En météorologie, il y a des situations qu’on peut appréhender à relativement long terme et d’autres qui sont instables et dont les modèles changent de jour en jour.

En tout cas, d'ici lundi, il n’y a rien à espérer dans le nord, les averses risquent même de gagner du terrain vers le sud et le sud ouest, surtout à partir de vendredi soir. L’anticyclone ramènera lundi à partir de l'ouest un temps plus agréable, plus ensoleillé, même s’il ne fera pas chaud tout de suite. Pour la chaleur estivale sur la moitié nord, il va falloir attendre encore.

Dans le même temps, des records de chaleur sont battus aux États-Unis. Comment expliquer cette différence ?

Il faut savoir qu’entre les États-Unis et l’Europe, il n’y a pas toujours cette théorie des vases communicants selon laquelle quand il neige là-bas, il fait doux en Europe occidentale, ou que quand on a un été pourri en Europe, il y a des vagues de chaleur aux Etats-Unis. Ça arrive, mais ce n’est pas une règle.

Le climat en Amérique du Nord est beaucoup plus continental que celui de l’Europe occidental, en particulier le climat français. Aux États-Unis, un été normal est un été chaud. Pas uniquement au Texas ou en Arizona, où il est logique de dépasser les 40 degrés, mais aussi sur New York, Détroit ou Chicago. Ces villes ont vécu un gros pic de chaleur, mais qui est passé depuis deux ou trois jours, puisqu'on a enregistré une baisse des températures. De 38-39 degrés ces derniers jours à Washington DC, on est redescendu vers 30°. Montréal et Québec, qui étaient monté à 28-29 degrés la semaine dernière, sont maintenant aux alentours de 21-23°.

Il n’y a pas de lien direct de cause à effet entre ce qui se passe là-bas et ce qui se passe chez nous. Dans certaines situations météorologiques bien précises, on hérite parfois avec quelques jours de décalage d’un ex-cyclone qui se serait engouffré dans le courant perturbé océanique, mais cette fois, il serait faux de dire que par effet de balancier, le temps humide de l’Europe occidental implique et explique la canicule aux Etats-Unis. C’est un raccourci trop simple pour qu’il tienne la route.

Parmi les autres explications potentielles, que penser de celle selon laquelle François Hollande apporterait la pluie partout où il passe ? Il est même surnommé "Rain Man" ("l'homme de la pluie") par la presse britannique...

Le changement, c’est maintenant ! Je ne sais pas s’il fait tomber la pluie, on n’a pas observé ça de manière statistique. Mais il est vrai qu’il pleuvait pour son investiture, et pour le 14 juillet, à part la Provence et la Corse, toute la France sera soumise à des averses. Pour ceux qui veulent faire partir des feux d’artifice, c'est finalement une bonne nouvelle car nous ne sommes plus dans une situation de sécheresse où tout feu est interdit. Bien au contraire. La sécheresse qui s’était accumulée en début d’année a été en grande partie éliminée.

Je rappelle simplement que l’été n’est pas terminé. Par exemple, l’année dernière, on a connu un printemps estival et vers la mi-juillet le retour de la pluie et de la fraicheur. En météo, tout peut aller très vite, la réalité de cette semaine n’est pas celle de la semaine prochaine. Bienheureux celui qui peut prévoir à quelle sauce on sera mangé en août.

Il existe certes les tendances saisonnières ; mais d’une part elles ne sont pas très fiables – on est à 50 ou 60 % de fiabilité, donc pas beaucoup plus que le pile ou face – et le problème de ces tendances, c’est qu’elles se basent seulement sur deux paramètres : les précipitations et les températures par rapport à la norme. Mais si on vous dit « il pleuvra plus en août que d’habitude », qu’est-ce que ça veut dire concrètement ? Aura-t-on cinq jours d’orages très violent qui élèveront le niveau pluviométrique, ou aura-t-on 20 jours de pluies faibles sur 30 ? C’est pareil avec la chaleur : il ne faut pas se réjouir lorsqu’on entend qu’on aura un mois de juillet ou août plus chaud que la normal. Chaud ne veut pas dire beau : on peut avoir un temps très lourd et orageux, avec des nuits très chaudes, et des journées où on ne dépasse pas les 27°. Sans compter qu’au niveau de la France, il y a tellement de contrastes entre les régions que quand certains se morfondent, d’autres profitent du soleil.

Propos recueillis par Morgan Bourven

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