Mario Draghi, probable seul et grand vainqueur des élections européennes<!-- --> | Atlantico.fr
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Mario Draghi pourrait être le grand gagnant des élections européennes.
Mario Draghi pourrait être le grand gagnant des élections européennes.
©JOE KLAMAR / AFP

Atlantico Business

Les élections européennes vont sans doute confirmer la montée d’une extrême droite partout en Europe, mais ne faciliteront pas la gouvernance de l’UE. Mario Draghi est donné comme successeur probable d'Ursula von der Leyen.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Ursula von der Leyen s’est déjà portée candidate à la présidence de la Commission européenne, mais il est peu probable que les dirigeants de l’Union européenne la renouvellent. Ses chances paraissent très faibles. L’extrême droite du Parlement européen lui est farouchement opposée. Et elle s’est coupée de la gauche lorsqu’elle a récemment émis l’idée d’un rapprochement de son propre parti avec celui d’extrême droite de Giorgia Meloni, cheffe du gouvernement italien. Ajoutons à cela que son travail à la tête de la Commission suscite beaucoup de commentaires négatifs, y compris chez les Allemands. Ses chances sont donc très minimes.

En revanche, une majorité des membres de l’UE travaillent pour que Mario Draghi prenne cette présidence qui s’annonce difficile.

D’abord, parce que la situation géopolitique est très compliquée avec cette guerre en Ukraine qu’il faudra bien arrêter, à condition que les États de l’Europe s’équipent d’un potentiel de défense capable de compenser le recul des Américains et donc de l’OTAN.

Ensuite, parce qu’il faudra bien définir le rôle de l’Union européenne dans ce monde bipolaire entre les USA et la Chine.

Enfin, parce qu’il faudra, qu’on le veuille ou non, approfondir l’union européenne, rapprocher les États membres, s’inventer un projet commun, bâtir un budget commun et trouver des ressources.

De l’avis de la grande majorité des dirigeants européens, Mario Draghi a toutes les qualités qui devraient lui permettre d’accéder au pouvoir et celles qui lui permettraient d’exercer son mandat. Ce qui est assez rare chez les professionnels de la politique quand ils avancent dans leur carrière. Ils ont plutôt tendance à multiplier les promesses avant, sans pouvoir délivrer les résultats après. C’est classique, malheureusement, dans toutes les vraies démocraties.

Alors, la chance de Mario Draghi est en fait de n’avoir jamais été obligé de faire une campagne électorale et populaire. Cela limite quand même les risques de tomber dans la démagogie. Par son expérience et son parcours, il jouit d’une grande notoriété, et il est même respecté dans toutes les couches de la société européenne.

Mario Draghi qui a 76 ans, a trois raisons pour être favori dans la course à la Commission européenne :

  1. Expertise : Sa formation d’économiste acquise à l’université de Rome puis au MIT (Massachusetts Institute of Technology) de Boston lui a ouvert les portes d’une longue carrière dans la banque. Il a fait ses classes à la Banque mondiale à Washington, puis il a été gouverneur de la Banque d’Italie, et surtout président de la Banque centrale européenne, après un passage comme patron de Goldman Sachs.
  2. Sauveur de l’euro : En tant que président de la BCE, il laissera l’image de sauveur de l’euro, une première fois pour sortir de la crise financière, une seconde fois quand il s’agira de trouver les moyens financiers d’affronter la crise du COVID. Son talent aura été d’interpréter les statuts de la BCE de façon à ce qu’elle fasse preuve de grande souplesse dans la gestion de la politique monétaire. Les Allemands, pourtant très prudents, l’ont laissé faire, et il a réussi à éviter les naufrages du système.
  3. Proximité avec le pouvoir politique : Bien qu’il n’ait pas été élu, il a approché de très près le pouvoir politique qui, en Italie, est souvent plus compliqué qu’en France. Sa dernière charge politique officielle aura été comme chef de l’exécutif à Rome, et c’est à ce titre qu’il a relancé l’économie, obtenant plus de 10 % de croissance sur deux ans, le meilleur score depuis le «miracle italien». Son côté grand commis de l’État ne la pas empêché de gouverner sans rien céder aux pressions politiciennes.

Pour les milieux européens, Mario Draghi porte aujourd’hui l’image d’un chef dont ils ont sans doute besoin, celui d’un sauveur de l’Europe 2024, mise à mal. Un rempart contre les démons de l’intérieur et les forces extérieures.

En politique étrangère, il est évident que c’est un atlantiste convaincu et qu’il l’assume, un défenseur indéfectible de l’Ukraine et de ses objectifs contre la Russie. Mais il serait sans doute un des meilleurs remparts contre les excès de Donald Trump, tout en étant un fin négociateur capable de dialoguer avec Xi Jinping.

Comme beaucoup d’économistes, c’est un pragmatique habité par une obligation de résultats dans un monde politique qui se préoccupe plus de ses ambitions que des effets. Pour beaucoup de chefs d’État et de gouvernement, il devrait savoir nous protéger de nos propres démons. C’est un peu ce qu’il a dit, en creux, du rapport sur la compétitivité qu’il a réalisé pour la Commission européenne sur les moyens de sortir de cette crise qui menace l’UE. Pas d’idéologie, le monde a besoin de prospérité parce que c’est la prospérité partagée qui asphyxie les démons de l’intérieur.

Son programme est simple et direct : changer l’Union européenne sur la transition écologique, la mutation digitale, la crise démographique et migratoire et la défense commune.

Alors qui le soutient :

Les pays de l’Europe du Nord, réputés frugaux, l’aideront, l’Allemagne se forcera et le laissera faire parce que la machine économique allemande a besoin de confiance et de productivité. L’Italie avec Giorgia Meloni restera neutre. Ses rapports avec celle qui a guidé ses premiers pas en arrivant au pouvoir sont devenus compliqués. La proximité avec celui que les Italiens appellent «Super Mario» lui a permis dapprendre le métier et les responsabilités mais la un peu écartée de sa base électorale. Sauf que tout le monde reconnaît qu’elle obtient des résultats. Et que derrière ses résultats il y avait les logiciels de Draghi

Son plus grand avocat sera sans doute Emmanuel Macron, ce qui dans la conjoncture actuelle n’est peut-être pas le meilleur.

Cela étant, Mario Draghi pourrait au lendemain des élections européennes être le plus capable de réconcilier les Européens entre eux et surtout leur permettre de retrouver la confiance en l’avenir parce qu’à la veille de ces élections, la confiance est très abîmée.

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