Mais pourquoi Ursula Von Der Leyen s’obstine-t-elle à maintenir autant de secret autour des contrats européens sur les vaccins ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Ursula Von der Leyen.
Ursula Von der Leyen.
©Kay Nietfeld / dpa / AFP

Jusqu'à quand ?

Cela fait plus de deux ans que le New York Times a révélé l’affaire dite des SMS, en référence aux soupçons qui pèsent sur des textos échangés entre Ursula von der Leyen et le PDG de Pfizer Albert Bourla.

Clara Bauer-Babef

Clara Bauer-Babef

Clara Bauer-Babef est journaliste à EURACTIV France depuis février 2021 et couvre l'actualité de la santé depuis Paris. Elle a fait ses études à Paris, Manchester et Toronto. Clara est titulaire d'une licence en langues étrangères appliquées anglais/espagnol et de deux masters en journalisme/journalisme bilingue.

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Atlantico : À quel point Ursula Von Der Leyen s’obstine-t-elle à maintenir du secret autour des contrats européens sur les vaccins ?

Clara Bauer-Babef : Cela fait plus de deux ans maintenant que le New York Times a révélé l’affaire dite des SMS, en référence aux soupçons qui pèsent sur des textos échangés entre Ursula von der Leyen et le PDG de Pfizer Albert Bourla à propos de la négociation du plus gros contrat de doses de vaccins (1,8 milliard) contre le Covid-19 d’une valeur de 35 milliards d’euros.

Depuis, la Commission européenne ne cesse tant bien que mal de se justifier. En janvier 2022, la commissaire à la transparence Věra Jourová avait déclaré que la recherche de SMS entre Mme von der Leyen et M. Bourla n’avait donné aucun résultat.

Le 26 octobre dernier le vice-président de la Commission Margaritis Schinas avait lui assuré que personne ne pouvait négocier la complexité de ces contrats, par SMS ou seul et qu’il s’agissait d’une procédure très bien structurée entre les Etats membres et la Commission. 

Plus récemment, c’est la Commissaire européenne à la Santé Stella Kyriakides qui a pris la défense d’Ursula von der Leyen, en martelant que la présidente de la Commission n’avait jamais été impliquée dans aucune négociation de contrats. 

Depuis le début de l’affaire, tous les membres de la Commission européenne font front commun sur ce dossier et démentent toute opacité dans les contrats avec Pfizer. 

Comment expliquer cette réticence persistante, malgré les remarques de nombreuses personnalités, y compris de l’ombudsman européen ?

Clara Bauer-Babef : Selon la Commission européenne, il n’y a aucune réticence puisqu’il n’y a pas eu d’échange de SMS à propos du contrat des vaccins. Mais selon les eurodéputés et des ONG qui militent pour la transparence, les réponses de la Commission ne sont pas satisfaisantes, et ne reflètent pas la réalité. 

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Deux camps s’affrontent et la situation semble se trouver dans une impasse. Cependant, cette affaire suscite un fort intérêt de la part des citoyens et la pression monte. L’affaire est donc loin d’être classée et la Commission européenne risque d’être de nouveau questionnée sur cette affaire. 

À quel point cela nuit-il à la confiance envers les institutions européennes ?

Clara Bauer-Babef : L’affaire des contrats Pfizer ébranle un peu plus la confiance des citoyens envers les institutions de l’UE dans une période où, déjà, la méfiance envers l’UE ne cesse de prendre de l’ampleur depuis plusieurs années.  

Selon une enquête d’Eurofound, la confiance des Européens envers les institutions a diminué de plus de 13% depuis 2020. La pandémie de Covid, la guerre en Ukraine, mais aussi la prolifération des fake news sur les réseaux sont en partie responsables.

Dans le cas de l’affaire des SMS, les doses de vaccin ont été achetées par les Etats membres et la Commission européenne, avec de l’argent public donc, d’où le vif intérêt des citoyens à savoir comment a été dépensé cet argent. 

L’eurodéputée Michèle Rivasi (EELV/Les Verts) a elle-même estimé que cette affaire était une remise en question de la transparence concernant les institutions européennes.

De plus, l’affaire nourrit beaucoup de fantasmes autour des Big Pharma et du vaccin contre le Covid. Durant la pandémie, de nombreuses fake news sur le vaccin ont émergé et l’opacité sur les contrats Pfizer alimente des théories complotistes qui pullulent sur les réseaux sociaux. 

Plus récemment, l’affaire du Qatargate n’a fait que renforcer ce sentiment de défiance. 

Frédéric Baldan, lobbyiste et militant pour la transparence a déclaré que la présidente de la Commission avait "clairement violé les dispositions" du code de conduite contraignant de la Commission, (et il demande à la Cour de suspendre Mme Von der Leyen et ses collègues commissaires pendant la durée de l'enquête). Qu’en est-il exactement ?

Clara Bauer-Babef : Frédéric Baldan considère que cette affaire porte atteinte à la moralité publique, à la confiance légitime des citoyens dans les institutions européennes et à la transparence, selon ses déclarations. 

Il estime également que Mme von der Leyen aurait le pouvoir de détruire ces SMS, qui, s’ils existent, pourraient être perçus comme preuves au yeux de la justice. C’est pourquoi le lobbyiste a engagé à deux reprises des poursuites judiciaires contre Ursula von der Leyen, qui pour l’heure sont au point mort. 

Si la justice donne raison à M. Baldan, et estime que Mme von der Leyen ne respecte pas le code d’éthique de l’UE, alors elle pourrait être effectivement démise de ses fonctions, notamment le temps de l'instruction. 

Comment faire la lumière sur ces enjeux ?

Clara Bauer-Babef : Il est peu probable que la Commission européenne ou Pfizer apportent des réponses. Depuis le début de l’affaire, Mme von der Leyen et M. Bourla sont régulièrement visés par des ONG, des eurodéputés ou encore des journalistes pour rendre public les contrats des vaccins et les SMS, sans que jamais cela n'ait abouti. 

En revanche, le Parquet européen (EPPO) s’est saisi de l’affaire en octobre 2022 et une enquête est en cours. Les résultats de l’investigation permettront peut-être de faire la lumière sur cette affaire.

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