Lutte contre le terrorisme : François Hollande crédible pour 70% des Français contre 69% pour Manuel Valls et Alain Juppé, 56% pour Nicolas Sarkozy et 49% pour Marine Le Pen<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
Lutte contre le terrorisme : François Hollande crédible pour 70% des Français contre 69% pour Manuel Valls et Alain Juppé, 56% pour Nicolas Sarkozy et 49% pour Marine Le Pen
©Reuters

Père protecteur de la Nation ?

Le vendredi 13 novembre, Paris était la cible de multiples attaques terroristes. L'exécutif a très vite réagi et déclaré l'Etat d'urgence, ainsi que de nombreuses mesures visant à améliorer la sécurité des Français. Dans un sondage exclusif pour Atlantico, l'Ifop fait le bilan de ce qui est ou n'est pas politiquement crédible en matière de lutte contre le terrorisme.

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet est directeur du Département opinion publique à l’Ifop.

Voir la bio »

Atlantico : Quels sont les enseignements de ce sondage ? Comment expliquer l'incroyable crédibilité de François Hollande et Manuel Valls quand ils sont habituellement raillés ?

Jérôme Fourquet : On constate que le couple exécutif bénéficie d'une très forte crédibilité sur ce registre très particulier dans ce contexte qui l'est tout autant. Cette spécificité est due d'abord pour des questions institutionnelles : ce sont eux qui sont aux responsabilités et en capacité de prendre les décisions qui s'imposent. Ils disposent donc à ce niveau là d'une prime institutionnelle. Les décisions qui ont été prises depuis les événements ont également rencontré quelque part les attentes des français tant sur le ton et le style employés par le Président de la république et le Premier ministre dès le vendredi soir. Leurs réactivité a également été récompensée tant sur la mise en place de l'état d'urgence, la convocation du congrès avec la présentation de toute une série de mesures renforçant l'arsenal sécuritaire : déchéance de nationalité pour les binationaux, prolongation de l'état d'urgence pour trois mois, annonces de création de nouveaux postes dans les ministères régaliens, réinstauration de contrôles immédiats aux frontières, etc. à cela s'ajoute l'intensification des frappes en Syrie. Il y a eu un style et un ton avec des annonces et des actes sur le théâtre extérieur et à l'intérieur du territoire avec les centaines de perquisitions administratives et les autres actions d'envergure. François Hollande et Manuel Valls bénéficient donc d'une très forte crédibilité en la matière ce qui n'est pas réellement le cas dans les autres domaines comme la fiscalité, le front économique et le chômage. à l'instar de ce qui a été observé en janvier ce climat d'inquiétude a été relativement bien géré ce qui se ressent en terme de popularité. Leur crédibilité générale est quant à elle sujette à caution.

L'opposition, après Charlie, a surfé sur une thématique du gâchis. Les français l'entendent-ils toujours ainsi aujourd'hui ?

Le procès intenté par Nicolas Sarkozy à l'exécutif sur une réaction tardive vis-à-vis du terrorisme ne fonctionne pas lorsque l'on voit les chiffres du sondage. Le fait de reprocher que les mesures prises actuellement n'ont pas été prises après le 7 janvier ne peut être une bonne tactique pour l'opposition. Dans le détail des 70%, il y a 84% d'opinion favorable au PS ce qui évidemment est massif. C'est quand même 65% chez les Républicains et 50% Front National. Une personne sur deux du FN  et deux tiers des Républicains ! Cela témoigne d'un climat d'appel à l'unité nationale.

Alain Juppé possède également une très bonne image en matière sécuritaire ce qui peut sembler surprenant. Comment l'expliquer ; quand Nicolas Sarkozy est si bas ?

Il n'a peut être pas une image autoritaire mais il a une image sécuritaire et rassurante. Cela s'explique parce que Nicolas Sarkozy et Alain Juppé ne disposent pas d'une même cote de popularité de manière générale. Juppé est plus populaire que Nicolas Sarkozy ça aide à être plus haut dans le classement. Néanmoins sur ce sujet là, la prime est habituellement accordée à Nicolas Sarkozy. Or là fort est de constater qu'Alain Juppé s'impose sur le pré carré de Sarkozy. C'est en partie lié à une structure d'image.Dans ces moments là, il incarne peut être mieux le Père de la Nation protecteur, un peu comme un François Hollande. Au contraire Nicolas Sarkozy a un dynamisme qui peut lui permettre de faire face à certaines crises mais qui peut dans également être un peu moins rassurant au moment d'unité nationale. L'attitude a également pu jouer. Alain Juppé et François Fillion ont tout de suite fait un communiqué expliquant que la France était attaquée et qu'ils se rangeaient derrière François Hollande. Pour l'instant, on n'a pas entendu de la part de Juppé ou de Fillion de critique virulente qui s'apparentait à une rupture de l'unité nationale. Sarkozy a dans un premier temps été dans l'union nationale mais il est très vite sorti du bois pour justement pointer du doigt les retards de son successeur et demander un changement drastique de la ligne conduite en la matière. à partir du moment qu'on est dans l'unité nationale tout ceux qui rompent ce moment sont moins bien appréciés. A partir du moment où celui qui est aux responsabilités prend des mesures qui sont soutenues par la population il devient difficile de le critiquer. Celui qui a donc "mieux négocié la séquence" est donc Juppé. Il creuse l'écart avec son concurrent à gauche avec 40 points d'écart avec le Front de Gauche et le PS.

Que dire de Marine Le Pen lorsqu'on constate qu'un Français sur 2, seulement, la juge crédible en la matière ?

Il est normal et attendu qu'elle soit dernière de ce classement puisqu'elle est sur des positions beaucoup plus radicales et beaucoup moins consensuelles. Elle a cependant un niveau très élevé. En relatif elle est dernière mais en absolu elle est à presque 49% de français qui la jugent crédible. Sur ceux qui la jugent la plus crédible elle est en tête du classement même si ça se joue à un point près. C'est assez spectaculaire. 95% dans son électorat c'est normal mais c'est 57 chez les Républicains et aux alentours de 20% à gauche. C'est évidemment l'un des domaines où elle est habituellement l'un des mieux notés. En matière économique il n'y aurait pas du tout ces scores là. Cela s'explique parce que le ton qu'elle a employé ainsi que son attitude ont été relativement républicains. Elle aussi a compris qu'on était dans un moment particulier d'union nationale et qu'il serait mal venu de fustiger l'incompétence de nos dirigeants à un moment où l'on espère qu'ils prennent les mesures adéquates. Elle a une communication qui a été soft.

De manières moins superficielle, si un français sur deux estiment qu'elle est crédible, un sur deux jugent que son diagnostic est fondé. C'est très important. Un certain nombre de menaces qu'elle dénonce, depuis quelques années et que son père dénonçait avant elle, se trouvent objectivement validées par les faits. Elle occupe le terrain depuis plusieurs années sur la problématique du retour des frontières ce qui lui valait le sarcasme de la part de la classe politique. Cette thématique des frontières est centrale depuis les attentats pensés en Syrie et en Belgique avec des mouvements dans tous les sens. Quand elle dénonce les risques d'infiltrations de terroristes dans les flux de migrants, là aussi il y a un certain nombre d'éléments objectifs qui sont venus amener de l'eau à son moulin. Quand elle parle de péril islamiste ou de sujets proches des termes de "5ème colonne" utilisés par Estrosi, il y a aujourd'hui tout une série de faits qui remontent à la surface de manière totalement crue qui viennent valider ce diagnostic et discours. Dans la période actuelle une personne sur deux pense qu'elle dit des choses crédibles (voire très crédibles pour 22% d'entre elles), c'est très significatif. Quand nous avions travaillé avec le sociologue Alain Mergier pour la fondation de Jean Jaurès après les attentats de janvier pour un petit livre intitulé "Le catalyseur". Ce terme était utilisé pour faire le lien entre la montée du djihadisme international et la montée du fondamentalisme en France dans certains quartiers. Tous ces éléments là qui étaient déjà en germe ont coagulé et se sont cristallisés en janvier. Toute une partie de la France ne se sent pas "Charlie" puisque pour elle cela nous pendait au nez. Même si l'on ne partage pas ses idées, force est de constater qu'elle avait raison. Les faits parlent pour elle. Le diagnostic du Front National est aujourd'hui mis sur la place publique et partagé par une partie de la population. Il s'agit des questions sur les frontières, le djihad, le va et vient entre ici et la Syrie, les zones de non droit en France où de la petite délinquance on bascule à la grande délinquance puis au djihadisme, les armes qui circulent dans les caves et les parkings, etc.

Méthodologie : 

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !