LR : comment Éric Zemmour leur fait perdre et la tête et les nerfs<!-- --> | Atlantico.fr
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Christian Jacob, président du parti Les Républicains, prononce un discours lors d'une réunion au siège du parti, à Paris, le 6 juillet 2021.
Christian Jacob, président du parti Les Républicains, prononce un discours lors d'une réunion au siège du parti, à Paris, le 6 juillet 2021.
©ALAIN JOCARD / AFP

Pire que l’islamisme, vraiment ?

Entre étalage de (petite) vertu morale et panique face à la poussée du polémiste, nombre de responsables LR en viennent à ignorer une réalité politique fondamentale : qu’ils envisagent ou non de voter pour lui, Éric Zemmour n’est pas perçu par les électeurs de droite comme le plus grand danger qui menace la société française.

Jérôme Besnard

Jérôme Besnard

Jérôme Besnard est journaliste, essayiste (La droite imaginaire, 2018) et chargé d’enseignements en droit constitutionnel à l’Université de Paris.

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Atlantico : Les LR semblent obnubilés par Eric Zemmour, plusieurs ténors du parti, Christian Jacob et Gérard Larcher en tête, répètent qu’ils ne partagent pas les mêmes valeurs, parfois jusqu’à l’outrance. Comment expliquer que LR soit à ce point à cran face au polémiste ?

Jérôme Besnard : Éric Zemmour est le révélateur de la crise ouverte en 2019 au sein du parti Les Républicains par la démission quasi-forcée de Laurent Wauquiez qui incarnait une volonté de refonder intellectuellement et idéologiquement le parti autour des valeurs du conservatisme. Cela faisait suite au mauvais score de la liste menée par François-Xavier Bellamy, dont la lecture des résultats fut beaucoup trop rapide et superficielle. Les amis de Nicolas Sarkozy, les anciens chiraquiens et les derniers centristes du parti se sont alors alliés pour faire élire Christian Jacob et marginaliser les conservateurs fillonistes et les souverainistes (regroupés autour de Julien Aubert). Le but était de lancer un candidat de rassemblement à leur sauce en 2022. Mais de candidat de rassemblement il n’y en eut point, d’où la panique en cours.

Cette agitation leur fait-elle oublier que leur électorat à moins peur du projet de société d’Éric Zemmour que de celui d’une partie de la gauche radicale ?

Certains élus parlent de cordon sanitaire autour d’Éric Zemmour comme jadis on en parlait pour Jean-Marie Le Pen. C’est oublier que Jean-Marie Le Pen était peu ou prou l’héritier du poujadisme et de l’Algérie française. Éric Zemmour, lui, c’est la droite « Figaro », l’aile droitière du Figaro, mais pour l’électorat de droite il incarne seulement un libéralisme corrigé par l’ordre et l’État régalien, dans une lignée qui passerait par Napoléon et le général de Gaulle. Rappelons d’ailleurs que le bonapartisme est un centre et non une droite comme le légitimisme monarchiste qui inspira en partie le général de Gaulle. Faute de références politiques, les barons de la droite modérée, qui sont profondément centristes, paniquent. Le seul programme de Xavier Bertrand et de Valérie Pécresse, c’est de dire qu’ils réaliseraient mieux le programme d’Emmanuel Macron. Que ce soit vis-à-vis des gilets jaunes ou de la pandémie, le noyau de l’électorat de droite juge sévèrement la gestion du pays par Emmanuel Macron, tout comme elle s’effraye des ravages de la culture « woke » venue des universités américaines, du sans-frontiérisme et de la déconstruction prônée par la gauche radicale. Sur tous ces sujets, l’idéal libéral-libertaire d’Emmanuel Macron est mal à l’aise car une partie de sa majorité, son aile gauche y adhère en partie. Le discours d’Éric Zemmour comble une attente à droite.

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Plutôt que de s’écharper en vain sur l’appartenance ou non de Zemmour à leur famille politique, et ne se positionner que par rapport à lui, Les Républicains ne devraient-ils pas se concentrer sur les valeurs qu’ils souhaitent défendre et l’électorat auquel ils veulent parler ?

Exactement, mais c’est impossible. Comme je le disais, Éric Zemmour est un révélateur, c’est aussi la poutre qui accélère la décomposition des LR, issus d’une UMP qui avait mixé les cadres du RPR et le programme de l’UDF. Il ne faut pas être grand devin pour penser qu’Édouard Philippe va convaincre une nouvelle frange d’élus LR de venir renforcer le centre macroniste. Seuls resteront à terme dans l’opposition des figures comme Laurent Wauquiez, Julien Aubert ou Éric Ciotti, ainsi que le dynamique président des jeunes LR, Guilhem Carayon. C’est eux qui pourront demain être les acteurs d’une recomposition de la droite, qui en incluant les électeurs du Rassemblement national, peut regrouper 40 % de l’électorat. 

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