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Les maires, derniers hussards de la République et derniers instituteurs de la démocratie ont pourtant de moins en moins de marges de manœuvre
©wikipédia

Bonnes feuilles

Dix élections au suffrage universel direct ont donné un président qui a tous les pouvoirs, mais aucun résultat. Omnipotent et en même temps impuissant. L'auteur propose de revenir au système qui a permis au général de Gaulle, en 7 ans, de 1958 à 1965, de redonner à la France le plein emploi, la croissance, la prospérité, et sa place au sommet. Il s'agit de l’élection du président de la République par les maires. Extrait de "Ma République des maires", de Jean-Claude Martinez, aux éditions JC Godefroy 1/2

Jean-Claude Martinez

Jean-Claude Martinez

Jean-Claude Martinez est professeur à l’université Panthéon- Assas, ancien directeur des études à l’ENA du Maroc et député au Parlement européen et à l’Assemblée parlementaire Euro-Méditerranée.

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Le maire ordinaire apparaît tout d’abord dans l’opinion générale comme un homme qui connaît la réalité du terrain : il vit certainement depuis longtemps dans sa commune et il est capable d’appréhender par lui-même la situation locale avec lucidité. Les noms des chemins vicinaux sont parfois connus de lui seul…

Le maire ordinaire connaît également personnellement les problèmes et les aspirations de la population sans avoir besoin d’intermédiaires ou d’une ribambelle de conseillers. Il n’a pas besoin de communicants, ni d’en passer par des chargés de mission ou des préfets. Le maire est aperçu quotidiennement par tous ses administrés, au moins dans sa voiture. Il ne peut donc échapper à leur contrôle, y compris physique, ce qui constitue évidemment un gage certain de sérieux, et une forme de démocratie directe.

Un bon maire n’est donc pas celui qui, tel le député, affi che de bons sentiments et de belles idées mais celui qui se place toujours en situation de faire le bon constat pour apporter les bonnes solutions. Le maire est un démêleur de problèmes. À lui de trouver toujours la solution, même pour des questions mineures, surtout pour des questions mineures, puisqu’il faut chasser le diable partout dans les détails.

Ainsi, à Gast, dans le Calvados en Normandie, le maire Yves Rondel, à la tête d’une commune de 250 habitants, confi e : « Être maire d’une commune de 250 habitants, c’est tout gérer. Il faut s’occuper des gens en diffi cultés, résoudre tous types de problèmes. C’est essayer d’être proche des gens et bienveillant, porter des petits projets comme l’agrandissement de la salle communale, la construction d’un logement communal, rendre accessible les bâtiments aux personnes à mobilité réduite, entretenir les routes, s’occuper des personnes âgées. J’ai parfois l’impression d’être une assistante sociale. L’année dernière, nous avons eu 50 centimètres de neige, les habitants étaient très pressés que tout soit dégagé, mais comment faire avec nos faibles moyens ? Ce que je fais au quotidien peut sembler dérisoire pour ceux qui habitent les grandes villes ! »

Et le maire rural ajoute encore : « Ce qui compte aujourd’hui pour l’exécutif, ce sont les métropoles, les gros bataillons d’électeurs… Nous, nous pouvons crever dans notre coin. Je ne me fais pas d’illusions, les territoires ruraux sont abandonnés. Les aides sont ponctuelles. L’État a repris 1,5 milliard aux collectivités locales cette année, il y a des choses que nous ne pourrons donc plus faire. »

En réalité, le quotidien du maire rural est fait de petites victoires le plus souvent invisibles : réussir à conserver un morceau de patrimoine, faire un aménagement touristique, numéroter les habitations pour que le repérage soit facilité dans le bourg et que les pompiers n’aient pas à chercher trop longtemps lorsqu’ils doivent intervenir, etc.

Lorsqu’il fait bien son travail, comme dans l’écrasante majorité des cas, le maire se consacre à la vie de sa commune tous les jours, même le dimanche pour un feu de grange, on sait où le trouver : il est au stade ou au goûter organisé chez les vieux… Quelles que soient ses motivations, un bon maire est un maire présent, disponible, ayant le sens de l’utilité publique et le désir d’aider ses électeurs. Élu sur son nom et sur sa capacité à fédérer une équipe, le maire se met personnellement en jeu : sa couleur politique importe bien moins que son goût pour l’action locale et son sens de l’empathie. En eff et, loin des projecteurs et de Paris, l’élu d’une ville de moins de 5 000 habitants prend en charge des demandes ou des démarches bien plus prosaïques que celles qui sont adressées aux députés ou aux ministres. Le maire œuvre, par exemple, et dans les limites de ses moyens matériels et humains, à l’amélioration de la vie quotidienne de ses administrés, à la conduite de projets, comme la construction d’une école, au suivi des personnes âgées isolées, ou encore à l’aménagement d’un terrain de football avec une association de jeunes ; il intervient en cas de trouble à l’ordre public pour tenter une médiation et il recherche des solutions pour conserver un commerce de quartier en préemptant par exemple un bail commercial.

Ainsi, pour réussir, être reconnu et apprécié, le maire ordinaire doit savoir écouter et s’acharner pour faire comprendre et prendre en compte les préoccupations des habitants de la commune. Il lui faut surtout accepter d’être disponible sans autre compensation que l’estime de ses électeurs.

Le maire ordinaire doit aussi montrer l’exemple sur le plan éthique et respecter des valeurs morales. La façon dont il mène sa vie privée a une importance réelle. On attend évidemment de lui qu’il soit avant tout honnête et qu’il fasse passer l’intérêt de sa ville avant son propre inté- rêt ou celui d’un clan.

Un maire doit être également capable de parler et de convaincre ses interlocuteurs ; mais ce qu’on lui demande surtout c’est d’être sincère. Mensonge et duplicité sont des défauts rédhibitoires qui tuent toute confi ance.

Le maire ordinaire est encore celui qui sait gérer, c’est- à-dire faire des choix et arbitrer entre plusieurs options jamais totalement satisfaisantes. On juge donc un maire à ses résultats et à son bilan.

Mais attention à trop regarder l’avenir et à trop risquer ! En effet, un maire qui aura creusé les défi cits retrouvera forcément ses électeurs avec un lourd handicap lorsque ses réalisations n’auront pas signifi cativement amélioré la vie de ses administrés dans un délai très court…

D’une façon générale, si le maire est si apprécié des Français c’est que, le plus souvent, dans les petites communes , le maire laisse volontiers son appartenance politique de côté. D’ailleurs, les Français ne sont que 17 % à signaler l’appartenance politique comme le principal critère de leur regard sur leur maire.

Malgré cette bonne opinion générale, les Français savent pourtant que les contraintes du quotidien limitent de plus en plus les marges de manœuvre de leur maire. Au point que les candidats qui annoncent qu’ils vont immédiatement améliorer le quotidien des gens avec leur programme sont automatiquement perçus comme des démagogues et des jeteurs de poudre aux yeux… L’idée que le maire pourrait avoir une influence décisive sur des sujets aussi essentiels que la qualité de vie ou l’attractivité de la commune pour des activités porteuses d’emplois et de richesse a fait long feu en notre époque pessimiste. Il semble que l’électeur contemporain demande à son maire de serrer surtout les comptes.

Bref, il lui faut désormais gérer en bon « maire » de famille !

Extrait de "Ma République des maires", de Jean-Claude Martinez, aux éditions JC GodefroyPour acheter ce livre, cliquez ici

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