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Les experts de la crise sanitaire ou la confusion gouvernementale entre les dangers et les risques…
Les experts de la crise sanitaire ou la confusion gouvernementale entre les dangers et les risques…
©Thibault Camus / POOL / AFP

Difficultés de l'exécutif

La théorie du crocodile, les errances d’un exécutif dans la tourmente médiatique.

Jean-Pierre Marongiu

Jean-Pierre Marongiu

Jean-Pierre Marongiu est écrivain, conférencier, ingénieur, expert en Management et Directeur général et fondateur du thinktank GRES : Groupe de Réflexions sur les Enjeux Sociétaux.Perpetuel voyageur professionnel, il a parcouru la planète avant de devenir entrepreneur au Qatar où il a été injustement emprisonné près de 6 ans, sans procès. Il a publié plusieurs romans et témoignages dont : Le Châtiment des Elites, Qaptif, InQarcéré, Même à terre, restez debout ! Aujourd'hui conférencier et analyste societal, il met son expérience géopolitique au service d'une approche libérale-souverainiste de la démocratie.

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Les spécialistes de l’analyse de risques connaissent tous, sous diverses formes, la théorie du crocodile.

Quand survient une crise, quelle qu’en soit la nature, il convient de faire la part du danger à savoir la capacité d’une situation à causer un dommage et celle du risque, c’est-à-dire la probabilité que ce danger se réalise.

Dans un espace clos, en télétravail par exemple, en France, en hiver, loin de tout fleuve, il est peu probable de rencontrer un crocodile. Ce risque est donc proche de zéro à moins qu’un voisin de palier fasse commerce d’animaux exotiques. Et même dans l’improbabilité de ce cas extrême le risque demeure faible, le saurien ne possédant pas les clés de votre appartement.

La procédure habituelle des analystes des risques consiste à identifier, évaluer, isoler, se prémunir et enfin éliminer.

Dans une société civile, nous sommes continuellement exposés à divers dangers. Dangers qui ne deviennent pas obligatoirement des risques nécessitant la mise en œuvre de procédures particulières afin d’en diminuer la potentialité. Pour autant, les gouvernants éclairés se doivent d’établir des stratégies pragmatiques et mesurées de gestion des risques.

Une situation de risque « 0 » n’existe pas, et n’est pas même souhaitable dans une démocratie libérale.

Afin d’établir des stratégies de protection d’une population, les experts dressent des matrices de risques et des méthodologies statistiques.  

Ces matrices devant permettre de dresser une cartographie factuelle des situations et faciliter la prise de décision. Les méthodes de traitement des risques devant être adoptées pour diminuer au maximum, les pertes humaines et les accidents tout en préservant la structure économique vitale et stratégique d’une société.

Les situations examinées sont évaluées en fonction de plusieurs critères.

Une situation peut donc être :

  1. Très dangereuse et très risquée. Exemple : traverser un champ de mines dans une zone de guerre.
  2. Dangereuse, mais peu risquée. Exemple : rencontrer un crocodile dans les rues de Paris.
  3. Peu dangereuse, mais très risquée. Exemple : arriver en retard à un rendez-vous en utilisant les services de la SNCF.
  4. Peu dangereuse et peu risquée. Exemple : Sortir sans parapluie par une journée ensoleillée.

La crise sanitaire qui secoue le monde depuis plus d’une année semble, en France, échapper à l’expertise des spécialistes de l’analyse des risques.

En effet, un paramètre peu présent sur les sites industriels, militaires ou scientifiques a soudain atteint une influence sociétale prépondérante : l’émotion.

Il s’agit d’un paramètre irrationnel qui ne s’appuie sur aucune statistique fiable, mais sur un ressenti. La psychologie des foules, la confiance ou la défiance sont venues percuter les matrices de rationalité.

Les tranchées se sont creusées entre les défiants, qualifiés de complotistes et les confiants, affublés de l’appellation de moutonistes, sur des bases rarement factuelles et rationnelles. Au travers de la lentille grossissante des médias, tout devient insupportable ou au contraire obligatoire.

Dans le cas qui nous préoccupe, la pandémie du Covid19 en France, nous connaissons le danger à savoir la mortalité et le risque quantifié statistiquement à 2,5% des personnes contaminées soit 95 000 décès. 

Dans la continuité de l’analyse de risque se situe la gestion de ceux-ci.

Nous savons évaluer les conséquences sanitaires, économiques, sociales, sociétales, civilisationnelles, politiques aussi bien à court terme que sur les trente années à venir.

Fort de ces connaissances un gouvernement devrait pouvoir définir des stratégies efficaces de sortie de crise, or ce n’est pas le cas. Et cela en grande partie pour des raisons politiques. Les décisions de santé publique sont désormais prises par le passage au travers des trois tamis communicants que sont l’émotion, la médiatisation, les intérêts électoraux.

Trois tamis qui n’ont rien de rationnel et qui ne participent pas à la gestion des risques, mais davantage à la manipulation de masse.

Dernier exemple en date, la suspension du vaccin Astra Zeneca. Si l’on prend en considération en France les notions de danger et de risque, la suspension même provisoire ne se comprend pas.

Danger : effets indésirables pouvant entraîner des thromboses. Risque : 0,6 %

Alors même que ce vaccin est scientifiquement considéré comme étant efficace à 70 % dans la lutte afin de diminuer le risque de mortalité de 2,5 % du Covid 19.

De même que l’autorisation, sans faits nouveaux, seulement après 24 heures démontre une décision prise sous influence. La panique préside aux décisions gouvernementales dans la plus totale inconséquence.

Emmanuel Macron apparemment sans concertation avec ses ministres a pris le risque de la certitude de nouveaux décès pour parer à un danger assez faible. Il s’agit là d’une décision incohérente en matière d’analyse de risque.

Autre exemple significatif, la décision de fermeture des remontées mécaniques ne s’est pas appuyée sur des données scientifiques, mais sur une volonté politique de paraître.

Décision prise sans fondement scientifique en dépit des statistiques concernant la prolifération du virus sur les pistes de ski qui faisaient apparaître des risques très faibles. Ces statistiques ont depuis été confortées par les résultats obtenus par l’Autriche et la Suisse. L’ouverture des stations de ski n’a eu aucune influence sur l’épidémie dans ces deux pays.

Le confinement, qui n’en est pas un, de 16 départements paraît d’autant plus ubuesque que la population est encouragée à rester de dehors le plus longtemps possible.  Pire, les habitants des zones considérées à haute prolifération du virus ont été invités à se rendre en masse dans les zones réputées moins touchées avant fermeture des « frontières départementales », à seule fin sans doute de contaminer au plus vite le reste du pays.

Les attestations de circulation incompréhensibles établies par un panel de technocrates surmenés mises en circulation la veille sont soudainement devenues caduques dans la matinée remplacée par un justificatif de domicile.

La liste des commerces autorisés s’allongeant au gré des revendications syndicales, avec les journées printanières sans que l’on sache pourquoi il est possible d’acheter des chocolats ou des fleurs, mais pas un pantalon.

Si nous en revenons à la théorie du crocodile. Imaginons qu’une circonstance inattendue lâche dans les rues de Paris une centaine de sauriens affamés, la bonne décision serait-elle d’enfermer les Parisiens pour assurer leur sécurité ou bien d’isoler les crocodiles dans une zone appropriée ?

Probablement les deux options, à savoir un confinement provisoire le temps nécessaire pour repérer et isoler les crocodiles et d’informer la population des zones à risque.

Que penser d’un gouvernement qui déciderait, afin de ménager l’émotion des uns et la liberté des autres, de laisser déambuler les crocodiles dans les rues et doter la population d’armures médiévales pour éviter les morsures ?

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