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Une étude de l’OCDE, menée à partir des données PISA, a tenté de déterminer quel serait le mois de naissance qui favoriserait les meilleurs résultats scolaires.
Une étude de l’OCDE, menée à partir des données PISA, a tenté de déterminer quel serait le mois de naissance qui favoriserait les meilleurs résultats scolaires.
©Lionel BONAVENTURE / AFP

Heureux capricornes et verseaux

Au Royaume-Uni, ce sont à l’inverse ceux conçus en janvier et nés en septembre qui obtiendraient les meilleurs résultats. Le tout n’a rien à voir avec les astres mais beaucoup avec…

Pauline Givord

Pauline Givord

Pauline Givord est une ancienne analyste de l’OCDE.

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Atlantico : Pour l’OCDE, vous avez mené une étude à partir des données PISA pour déterminer quel serait le mois de naissance qui favoriserait les meilleurs résultats scolaires. Quelles étaient vos conclusions ?

Pauline Givord :Notre étude revient sur les systèmes scolaires. Nous avons regardé si l’âge relatif à l’entrée à l’école dans une même classe avait un impact sur la réussite sur le long terme. Dans tous les pays, il y a des règles administratives pour déterminer à quel âge on peut entrer à l’école et quels sont les élèves concernés. En France, le mécanisme est lié à l’année civile. La rentrée s’effectue en septembre en CP lorsque l’on a eu 6 ans dans l’année civile (jusqu’en décembre). Les enfants de janvier sont donc les plus « vieux » par rapport aux élèves de leur classe quand ils rentrent à l’école et ceux de décembre sont les plus jeunes. Dans d’autres pays, en Allemagne ou aux Etats-Unis, cela va plutôt être lié à la rentrée scolaire. Les enfants du mois d’août seront les plus jeunes, et ceux de septembre seront les plus âgés.

Du fait de cette règle administrative, à l’entrée à l’école, les enfants ont une différence de maturité qui peut être assez importante car à six ans, un écart de presque un an peut être constaté entre certains enfants. Cela représente presque 20% d’écart d’âge entre les enfants au tout début de scolarité. Cet écart relatif de maturité  se réduit avec le temps.

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Avec l’enquête PISA qui mesure les performances des élèves à 15 ans, on observait encore des différences liées à l’âge relatif à l’entrée à l’école. Lee fait d’être le plus jeune au moment où on entre en primaire a un impact sur les performances et le niveau que l’on atteint à 15 ans, tel que mesuré dans PISA.      

Dans certains pays, ce phénomène est plus fort qu’ailleurs. Mais il s’agit d’un phénomène assez généralisé. D’autres études dans beaucoup de pays montrent cet effet de la maturité relative à l’entrée à l’école et qui peut avoir des conséquences à long terme. En France, Julien Grenier avait déjà montré cet effet. Aux Etats-Unis, beaucoup d’études confirment ce phénomène.

En France, ce n’est pas quelque chose que l’on a forcément en tête. Il y a plutôt une tentation pour les élèves du mois de janvier de les faire rentrer plus jeunes à l’école car on a l’impression qu’ils vont s’ennuyer sinon car ils seront trop en avance ou trop « vieux ». Ce que j’ai découvert à l'occasion de cette étude, c’est que dans beaucoup de pays comme l’Allemagne, les Etats-Unis, l’Australie, il y a plutôt le mécanisme inverse. Les parents ont tendance à retarder si c’est possible l’entrée à l’école avec cette idée que les enfants ne sont pas assez prêts et qu’ils vont avoir un désavantage comparatif par rapport à leurs camarades.

Des statistiques britanniques estiment que ce sont les enfants conçus en janvier et donc naissant vers septembre qui seraient ceux qui ont le plus de chances de réussir leurs études. Comment expliquer cette analyse différente ?

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Une étude britannique montre des écarts entre les enfants nés en septembre et ceux nés en août parce que justement la règle n’est pas la même au Royaume-Uni et pour entrer à l’école en primaire, la règle administrative n’est pas par rapport à l’année civile comme en France où nous sommes dans un âge scolaire jusqu’en décembre mais plutôt par rapport à la date de la rentrée, au 1er septembre.

Au Royaume-Uni, les enfants nés en septembre sont les plus vieux de leur classe d’âge. Ils ont effectivement un avantage par rapport à ceux qui sont les plus jeunes et qui sont nés en août. Il y a toute une littérature au Royaume-Uni sur les « summer babies » qui seraient désavantagés par rapport aux enfants qui sont nés plutôt à l’automne. Cela correspond au même mécanisme. Les enfants les plus jeunes à l’entrée à l’école ont un désavantage au début qui persiste avec le temps. Cela ne se voit pas sur les mêmes mois de naissance avec les pays étrangers et notamment le Royaume-Uni car les règles administratives en vigueur ne sont pas les mêmes. Des théories avancent l’hypothèse que le fait que la grossesse ait lieu pendant l’hiver, le printemps ou l’été puisse avoir une incidence sur la maturité. Mais le fait que l’on observe ces écarts relatifs entre les élèves quelles que soient les différences dans les règles de mois d’entrée, on l’observe sur d’autres mois en fonction des pays, cela  renforce plutôt l’idée qu’il s’agit d’une question de maturité relative par rapport aux autres élèves à l’entrée à l’école. Ce mécanisme, le fait que cela perdure avec le temps, a pu être constaté dans l’enquête PISA, qui mesure les performances scolaires à 15 ans, ou dans les chances d’’entrée à l’université.

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Quels sont les facteurs qui peuvent expliquer ces différences de performances scolaires selon le mois de naissance ? S’agit-il d’un véritable enjeu de QI ?

Cette étude ne permet pas de répondre à cette question-là. Dans les toutes petites classes, cela s’explique en grande partie par des questions de maturité. Le cerveau mûrit. A 7 ans, les enfants savent déjà plus de choses qu’à 6 ans. Finalement, cette règle administrative fait qu’il y a un écart relatif qui est assez important.

Dans l’enquête PISA, on a des indicateurs sur la confiance en soi et la persévérance. On constate que les enfants les plus vieux à leur entrée à l’école, vis-à-vis des autres élèves, ont plus souvent des indicateurs positifs en termes de confiance en eux. On peut penser que ces enfants ont pu acquérir plus d’assurance dans les petites classes. Cela leur donne un avantage pour la suite en termes de confiance en eux et qui aboutit à des effets persistants de cet avantage initial.  

Une étude américaine montre que la question de l’écart des mois de naissance joue beaucoup et peut être constatée pour les Sénateurs, pour les dirigeants d’entreprises. De nombreuses études renforcent cette hypothèse selon laquelle le fait d’avoir été relativement plus mûr par rapport à ses camarades à l’école et donc d’être plus à l’aise aux débuts renforce la confiance en soi et la capacité à construire et à progresser directement. A l’inverse, d’autres études montraient que les élèves les plus jeunes d’une classe avaient un risque plus élevé d’être diagnostiqués pour un trouble de l’attention, alors que cela pourrait ne provenir, pour certains, que d’une difficulté de ces élèves plus jeunes à se concentrer aussi longtemps que leurs camarades de classe plus âgés. Il est important de précise que toutes ces études cela mettent en avant des résultats statistiques. Ce n’est pas quelque chose qui s’applique à tous les enfants : tous les enfants nés en janvier ne font pas de brillantes études, et tous les enfants nés en décembre ne sont pas voué à l’échec. Et l’écart initial n’est pas irréversible – et il serait difficile de faire un lien avec le QI, notion par ailleurs complexe à mesurer.

Y a-t-il une difficulté de l’école à gérer la question de la maturité émotionnelle ? Cela peut-il expliquer pourquoi selon le mois de naissance, et donc l’entrée à l’école, il y ait des variations ?

Dans le cadre de cette étude OCDE, nous avons pu regarder de nombreux travaux. En fonction des systèmes scolaires, il y avait certaines pratiques qui pouvaient renforcer d’une certaine manière le désavantage des élèves les plus jeunes par rapport aux élèves les plus âgés. Certaines pratiques, qui sont plus ou moins adaptées, peuvent avoir tendance à renforcer cet écart entre les élèves selon le mois de naissance. Une étude américaine montrait ainsi que quand ils sont jeunes, des rythmes trop intensifs dans les petites classes auront tendance à renforcer le désavantage relatif des plus jeunes

Ces derniers peuvent avoir plus de difficulté à se concentrer longtemps.    

Dans les pays dans lesquels il y a une sélection précoce comme en Allemagne, cela a tendance à renforcer cet effet. Si les enfants sont orientés très jeunes, le fait d’avoir un désavantage par rapport à leurs camarades d’une même classe à 10 ans, l’écart de maturité lié au mois de naissance peut être assez conséquent et conduire à s’orienter vers des voies moins académiques, entraînant un effet à long terme.

Cela est variable selon les systèmes scolaires. Des évolutions sont possibles.  Dans certains pays où il y a des tests de sélection, justement pour le tracking, l’Irlande par exemple avait mis en place des corrections pour ses tests pour l’entrée dans des écoles sélectives.

Quelles autres explications sont possibles ?

L’idée était de mettre en évidence une certaine régularité dans ce dispositif et de voir dans quelle mesure on l’observait dans tous les pays. Les hypothèses et les pistes peuvent être liées à la confiance en soi. Le fait d’être attentif aux rythmes d’apprentissage de l’ensemble des enfants peut jouer sur ce phénomène. 

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