Les 3 raisons de la colère allemande contre la France<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Les 3 raisons de la colère allemande contre la France
Les 3 raisons de la colère allemande contre la France
©Reuters

Pas content !

La presse allemande est vent debout contre la France. Parce que l’opinion publique allemande n’accepte plus l’immobilisme de la gouvernance française, son double langage et une étonnante capacité à donner des leçons d’économie…

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Voir la bio »

La presse allemande cette semaine n’a jamais été aussi violente contre la France que cette semaine. Le Frankfurter Allgemeine Zeitung, Die Welt et même le Wirtschaftsblatt sont à peu près à l’unisson. En gros, ils écrivent cette semaine que la situation française devient dangereuse pour l’ensemble de la zone euro, que la gouvernance française raconte une fois de plus des histoires quand elle vient à Berlin présenter son budget  et enfin que les réformettes annoncées sont à côté de la plaque… Pour couronner le tout, ils commencent à s’étonner de la patience de Mme Merkel  et  du fait qu’elle fasse semblant de croire François Hollande ou Manuel  Valls  quand ils viennent en visite… Visite est un bien grand mot pour les observateurs allemands. Les Français viennent surtout demander des cautionnements.

En fait, les Allemands ont trois grandes raisons d’être en colère.

1ère raison

Ils considèrent que la France n’a fait aucun effort pour redresser ses comptes publics et réduire ses déficits. L’Europe tout entière souffre d’un déficit de compétitivité, la plupart des pays européens ont fait un effort pour diminuer les frais généraux et les dépenses sociales, la plus part des pays, sauf la France. Les Allemands ont fait de gros efforts de compétitivité, les salariés ont accepté une modération salariale au profit des investissements, lesquels ont irrigué beaucoup de pays de la zone euro… Les salariés et les syndicats allemands ont signé ces accords en contrepartie d’un maintien de l’emploi… L’Allemagne aujourd hui est une zone de plein emploi.

Les mêmes syndicats, ceux de la métallurgie par exemple, acceptent mal que pendant ce temps, les pilotes d’Air France infligent au transport aérien une grève archaïque et meurtrière ; ils acceptent mal que les gouvernements français qui se succèdent protègent davantage les chômeurs que la création d’emplois, que le départ à la retraite soit toujours aussi prématuré et que l’administration française coûte 100 milliards de plus que l’administration allemande, pour une qualité de service équivalente. Pourquoi accepter que la sphère publique française dépense chaque année 20% de plus que ce qu’elle reçoit en impôts et en contributions ?

Pour les Allemands, qui se serrent la ceinture, c’est incompréhensible. Il y a donc un problème sérieux… Ce problème est resté dans des limites acceptables tant que l’Allemagne a pu écouler certains produits. Le fournisseur a, depuis dix ans, financé son client. Aujourd hui le fournisseur, en l’occurrence le contribuable allemand, considère que cette solidarité dans la zone euro lui coûte plus cher que ce qu’elle lui rapporte. Le plein emploi, choix collectif allemand, c’est bien, mais pas à n’ importe quel prix, surtout quand à ses portes, les pays du club Med profitent du soleil .

Donc la presse d’outre Rhin reflète un début de ras-le-bol que l'on avait déjà senti à la veille du plan de sauvetage de la Grèce, de l’Espagne et de l’Italie en 2011.

2e raison

La deuxième raison tient au mécanisme des garanties qui fonctionnent à l’intérieur de la zone euro. Ces mécanismes sont très simples. La France seule ne pourrait pas financer ses déficits de fonctionnement à des taux ridiculement bas qu’on lui accorde.

La France qui emprunte la bagatelle de 1 milliard d’euros par jour ne les trouverait pas, si l’Allemagne refusait de signer le contrat de solidarité. Du coup des voix  de gauche comme de droite commencent à s’élever en Allemagne pour expliquer que ça n’est pas rendre service à la France que de  lui permettre des financements aussi faciles. D’une certaine façon ça nous dispense de gérer et de réformer. Pourvu que ça dure, disait la mère de Napoléon...

D’autant qu'un tel laxisme risque de mettre à nouveau la zone euro en péril ; c’étaient cette semaine les grands titres de la presse allemande. Ces facilités de paiement exceptionnelles  nous sont accordées parce que les marchés sont convaincus que la zone euro (donc l’Allemagne) évitera que la France se retrouve en défaut de paiement.

Too big to fail… La France ? Of course ! Il y aurait évidemment des risques systémiques. Donc  faut tenir… Too big to fail… On disait cela aussi de certaines banques américaines quand elle se droguaient a l’euphorie monétaires. En septembre 2008 l’une d’entre elles est tombée et le monde entier a financièrement explosé. Pour Berlin, la France peut écrire une  version européenne de Lehman Brothers… Et ce jour-là tout le monde sautera.

3e raison

La 3e raison  de la colère allemande réside dans le fait que la gouvernance française continue de raconter des histoires. La présentation du budget est pour Berlin une caricature et une erreur. Une caricature parce que les engagements pris ne peuvent pas être tenus. Une erreur parce que les seules économies sérieuses de dépenses publiques annoncées avec précision en viennent à sabrer la politique familiale, qui est une des grandes réussites françaises et que les Allemands nous envient au point de préparer un système identique pour soutenir leur démographie. "Les français nous réclament une relance de la demande et ils suppriment chez eux l’un des outils de soutien qui a sans doute été le plus pertinent et le plus performant."

Ajoutons à ce dialogue de sourds,que les Allemands, qui ont laissées Pierre Moscovici aller à la Commission, estiment qu’ils pourraient  s’abstenir de donner des leçons de bonne conduite… sans parler de la montée des critiques à l’encontre de la politique allemande. Que la gauche, l’extrême droite et l’extrême gauche s’en prennent à la Commission européennes, à la rigueur allemande et à la Banque centrale  pour masquer sa difficulté politique, passe encore… Mais que les candidats de droite qui se disputent déjà pour 2017 ne soient pas capables de tenir un langage de vérité sur les défaillances et les lâchetés françaises, là c’est un comble...

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !