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Jean Castex discours d epolitique générale assemblée nationale
Jean Castex discours d epolitique générale assemblée nationale
©MARTIN BUREAU / AFP

Nouveau Premier ministre

Florian Silnicki analyse le discours de politique générale de Jean Castex devant les députés à l'Assemblée nationale. Le message de Jean Castex semble être une synthèse politique qui s'enracine dans le discours de ses prédécesseurs.

Florian  Silnicki

Florian Silnicki

Florian Silnicki est Expert en communication et Président Fondateur de l'agence de communication de crise LaFrenchCom (https://www.lafrenchcom.fr)

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Le discours de politique générale de Jean Castex est d'abord l'illustration d'une synthèse politique qui s'enracine dans le discours de ses prédécesseurs. Il fait ainsi miroir dans certains aspects de sa construction au discours prononcé par Jacques Chaban-Delmas en 1969 qui marqua l'histoire de la communication politique.

Il emprunte également au Président Chirac la lutte contre la fracture sociale qui fut l'un des principaux thèmes de sa campagne pour l'élection présidentielle française de 1995 en reprenant l'axe de communication politique "La "machine France" ne fonctionne plus".

Sur le fond du discours, il emprunte au style de Jean-Pierre Raffarin notamment en vantant une écologie plus proche du terrain, plus concrète et une valorisation des atouts des territoires et de leurs élus.

Ce discours de politique générale est marqué par une introduction en forme de bilan trop élogieux pour être efficace sur l'opinion publique. Un méa culpa sur les résultats aurait sans doute été plus efficace, il y a une volonté manifeste de rendre un hommage sans nuance au gouvernement précédent.

Le Premier Ministre a fait face efficacement à une assemblée nationale qui a tenté de la chahuter tout le long de son discours.

Le discours s'organise autour de la thématique de la fracture sociale qui est une sorte de ligne jaune à laquelle le premier ministre est souvent revenu. C'est utile, à l'heure où le Président de la République cherche un nouveau souffle politique pour les dix prochains mois. Au fond, le reste du temps sera consacré à l'élection présidentielle.

Alors qu'Emmanuel Macron avait marqué le début de son quinquennat par une action très centralisée, se privant des élus locaux qui sont pourtant un thermomètre politique précieux pour le pouvoir central, Jean Castex a tenté d'offrir de l'épaisseur au projet politique du Président de la République en s'appuyant sur les territoires ce qui est aussi un moyen habile de rendre l'action publique proche du citoyen. Il a également tenté de créer du consensus autour des grandes valeurs républicaines. Ce discours de politique générale marque aussi la fin de la communication verticale d'Emmanuel Macron.

Ce discours est un enjeu essentiel pour le premier ministre car il est son entrée en matière. Le discours de politique générale est la première mise en scène de son action politique.

L'enjeu profond de cet exercice oratoire est de redonner du souffle à l'action politique que la communication politique d'Emmanuel Macron a abimé.

Jean Castex réussit plutôt l'exercice même si le discours est (comme souvent) très (trop?) long. C'est d'abord un discours politique qui tente de s'enraciner dans un pacte républicain. Le Premier Ministre semble avoir compris que la communication politique, c'est d'abord de la politique puis de la communication alors que ces dernières années, nos dirigeants avaient semblé pensé que la communication politique. 

C'était d'abord de la communication pour la communication. Le Premier Ministre n'est d'ailleurs pas tombé dans le piège de la petite phrase.

Il a enlevé les paillettes pour revenir à un discours classique de politique générale. Il joue ainsi efficacement la carte de la prudence sur la forme en étant volontairement un peu vieillot dans son style mais plus solennel... un mélange de Chirac et de Raffarin dans la sobriété.

Les discours de politique générale sont systématiquement très compliqués et souvent ratés. Celui-ci est d’autant plus compliqué qu’il intervient le lendemain du Grand Oral du 14 juillet du Président de la République. De manière générale, il est très rare de briller lors d’un tel exercice. C’est le sommet du discours politique, avec celui du Président de la République en Congrès. L’art de devoir tout dire, tout en restant synthétique. 

Sur la forme, le discours est plutôt austère, plat et technocrate. Jean Castex met en lumière le fait qu’il était maire de Prades. Il assoit sa légitimité sur ce mandat d’élu local. « Je sais pour la côtoyer tous les jours qu’il existe une France qui ne dit rien mais qui n’en pense pas moins » et à de nombreuses fois il se réfère au code communal pour qualifier des faits, tels que « le trouble à tranquillité public ». Il est évident que le choix de Castex est aussi de renouer avec les élus locaux avec qui il a eu tant de conflits.

Un bon discours de politique générale ne doit pas être trop long, synthétique et globale. Le danger est d’en faire un catalogue fastidieux de mesures. C’est ce qui est arrivé avec Castex, mais aussi à de nombreux prédécesseurs. Nous n’arrivons pas vraiment à comprendre clairement la ligne, qui aurait dû être simplement annoncé. A noter qu’il a félicité son prédécesseur, ce qui n’est pas commun.

Dans ce discours de politique générale, il y a un mixte de différents discours de politique générale : du Raffarin dans la France des territoires et dans la libération des énergies et du Villepin sur l’emploi. Mais également du Hollande dans la concertation systématique et du Sarkozy avec le partage de la valeur dans l’entreprise. 

En terme de sécurité, bien meilleur notamment sur la lutte contre le terrorisme avec rhétorique guerrière avec de nombreuses référents aux combats, à la lutte, à la mobilisation. Cette rhétorique fonctionne sur l’opinion publique.

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