Le prix Nobel d’Économie attribué à deux experts mondiaux de la théorie des enchères <!-- --> | Atlantico.fr
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Prix Nobel d'économie Paul Milgrom et Robert Wilson
Prix Nobel d'économie Paul Milgrom et Robert Wilson
©Anders WIKLUND / TT News Agency / AFP

Atlantico Business

Sans les travaux de ces deux Américains sur le mécanisme des enchères, la vente récente des fréquences de la 5G n'aurait sans doute jamais pu rapporter aux États l’argent record qu’ils ont tous gagné.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Le dernier des prix Nobel, qui récompense traditionnellement le travail d’un ou de plusieurs économistes, va donc aller cette année à deux américains, Paul Milgrom et Robert Wilson, pour leur travail sur l’optimisation des enchères.

On aurait pu attendre des experts en pandémie capable d’évaluer l’impact économique des virus sur le développement des inégalités en période de contamination. Le jury du prix de la Banque de Suède en sciences économiques a choisi de récompenser deux chercheurs dont les travaux ont pris une importance considérable dans l’économie moderne. Ils sont partis du mécanisme des enchères qui est vieux comme le monde puisque très tôt, les hommes en compétition n’ont su départager un bien ou un service qu’en en offrant le prix le plus élevé. Ces deux économistes ont donc étudié les moyens d’optimiser le résultat d’une enchère au-delà de la maximisation du prix au seul bénéfice du vendeur. Ils ont surtout inventé de nouveaux formats d’enchères.

Ces deux professeurs sont donc à l’origine du concept utilisé pour la vente de licences des fréquences de télécommunication. Avant eux, les fréquences étaient gratuites (comme l'oxygène de l’air qu’on respire) ou considérées comme des biens publics inaliénables et appartenant à l’Etat (en général, l’armée).

Paul Milgrom, qui a aujourd’hui 72 ans et Robert Wilson, 83 ans, tous les deux enseignants à Stanford, ont donc développé un concept pour permettre de valoriser (ou de fixer un prix) à des produits ou des services qui n’en avaient pas parce qu‘ils n’étaient pas dans la sphère concurrentielle telle qu’on la connaît. Et pourtant, ils ont une valeur économique certaine.

C’est ainsi qu’ils ont, les premiers, proposé de mettre les slots d’aviation aux enchères. Les slots, ce sont les heures et créneaux d’atterrissage ou de décollage des avions dans les aéroports. Ces slots sont des produits rares, le mécanisme des enchères très encadré a permis de leur donner une valeur au bénéfice de l’aéroport bien sûr, que cet aéroport soit public ou privé.

Mais leur titre de gloire, ils le doivent à l’application du mécanisme d’enchères pour l’attribution des fréquences télécom et dernièrement les fréquences de la 5G, très prisées, très recherchées. En dépit des critiques dont elles sont l’objet ou des effets pervers dont elles sont soupçonnées, ces fréquences rapportent beaucoup d’argent aux Etats qui en cèdent l’usage. En France, les enchères de la 5G ont rapporté près de 3 milliards d’euros au budget.

Ce qui est intéressant, c’est que ces deux chercheurs ont montré que l’enchère ne produit pas nécessairement le prix le plus élevé pour le vendeur, mais plus sûrement le prix optimum pour la collectivité. Dans le cas des enchères de fréquence, c’est très net. Si on régule l'information sur les offres, on parvient à déterminer un prix d’enchère qui protège à la fois la collectivité et l’investisseur. Un prix d’enchère trop élevé oblige l’investisseur à optimiser son exploitation au détriment du consommateur. Si le prix d’acquisition est plus modéré, la pression sera moins forte, au bénéfice de tout le monde.

Ce système d’enchères est évidemment utilisable dans l‘attribution de lots de matières premières ou d’énergie, de concessions d’exploitation d’un domaine public ou même d’éléments clefs sur le marché de l’environnement. Le prix du carbone et l’attribution de droits à polluer peuvent être gérés demain de cette façon pour éviter que le marché de la pollution fasse l’objet d’une spéculation néfaste.

On touche donc à la vie quotidienne et les Nobels se retrouvent de fait dans l‘actualité. Et ils sont souvent en plein cœur de l’actualité. L’année dernière, la banque de Suède avait récompensé un trio avec la Française Esther Duflo et les Américains Abhijit Banerjee et Michael Kremer, pour leurs travaux sur la réduction de la pauvreté dans le monde.

Cette année, pandémie oblige sans doute, le prix Nobel de médecine a été décerné à trois chercheurs en virologie pour leur découverte du virus de l'hépatite C : le Britannique Michael Houghton et les Américains Charles Rice et Harvey Alter. Mais ce qui est intéressant c’est que Ie virus de l’hépatite C a été découvert en 1989 et qu’il n’existe toujours pas de vaccin efficace contre l'hépatite C. C’est pourquoi tous les travaux liés à la prévention de l'infection par la réduction du risque d'exposition à ce virus dans les lieux sensibles et au sein des populations à risque sont à regarder.

Le message des Nobel, dans ce climat actuel, est on ne peut plus clair. 

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