Le « made in France » n’est plus une priorité. Et dire que les politiques en rêvaient pour réindustrialiser le pays<!-- --> | Atlantico.fr
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Le « made in France » coûte trop cher et ne permet pas toujours de garantir les approvisionnements nécessaires et réguliers.
Le « made in France » coûte trop cher et ne permet pas toujours de garantir les approvisionnements nécessaires et réguliers.
©LUDOVIC MARIN / AFP

Atlantico Business

Les entreprises font marche arrière et le « made in France » n’est plus leur priorité. Les consommateurs n'en veulent pas parce que c'est trop cher. Les politiques qui voyaient dans le "made in France" la solution pour réindustrialiser le pays vont devoir changer de discours.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Beaucoup s'en doutaient et savaient bien finalement que « le made in France » passerait de mode face à l'inflation et aux difficultés de pouvoir d'achat. Le « made in France » coûte trop cher et ne permet pas toujours de garantir les approvisionnements nécessaires et réguliers. Telles sont les deux raisons qui expliquent le recul des productions "made in France" et l'annulation de certains projets industriels.

Le Conseil National des Achats, qui réalise chaque année avec le cabinet de conseil Agilebuyer une analyse de l'origine des achats de produits et de composants industriels, note que les projets d'achat "made in France" ne représentent plus que 47 % du total des achats, alors qu'ils étaient de plus de 60 % en 2022 et 2023. En fait, on est revenu au niveau d'avant Covid. Concrètement, quand on interroge les directeurs d'achat, ils confessent que le "made in France" n'est plus une alternative aux risques de ruptures d'approvisionnement. Ils ont aujourd'hui beaucoup moins de difficultés d'approvisionnement ou de livraison qu'avant.

Mais le principal facteur du changement stratégique se situe dans le coût de fabrication. La réduction des prix de revient, pour compenser l'inflation, est devenue une priorité qui oblige les entreprises à retourner vers des approvisionnements en provenance de zones géographiques à faibles coûts.

Cette évolution stratégique est imputable au comportement du consommateur. On sait bien depuis presque six mois maintenant que les consommateurs ont découvert que les produits "made in France" étaient beaucoup plus chers, alors que la qualité est très souvent équivalente. Un sondage réalisé l'an dernier par Opinion Way, en plein débat sur le pouvoir d'achat, indiquait qu'en octobre, 67 % des consommateurs ont commencé à se détourner des produits "made in France", 80 % se sont restreints et 65 % des consommateurs en hypermarché y ont renoncé. Deux raisons claires, nettes et précises : les produits "made in France" sont plus chers et pas disponibles en quantité. Le premier label qui a été touché par ce retour en arrière était celui des produits bio de proximité.

Cette évolution, qui était quand même prévisible, va changer beaucoup de stratégies qui ont été, improvisées ces dernières années pour apporter très des réponses politiques à des demandes qui étaient elles aussi très idéologiques.

La pression des écologistes a pesé sur la politique de réindustrialisation lancée à grand frais, mais comme elle ne rencontre pas l'adhésion des consommateurs, il est probable qu'on la rabote un peu.

Les directeurs d'achat qui craignaient des ruptures d'approvisionnement ont diversifié leur sourcing pour éviter les zones géographiques à risque. La Chine est le pays considéré aujourd'hui comme le plus risqué. Plus de la moitié des directeurs d'achat réduisent leur dépendance à la Chine et lui tournent le dos depuis plus d'un an, parce que la situation chinoise est devenue de plus en plus difficile à comprendre et à assumer. Les règles commerciales internationales ne sont pas respectées, la propriété intellectuelle non plus, etc., etc. Donc, les entreprises baissent les bras, encouragées d'ailleurs par le consommateur qui considère que certaines origines sont difficilement fréquentables. Mais les entreprises francaise qui quittent la chine vont chez les voinsins d’asie du sud est .

Cette situation assez cocasse qui évolue actuellement pose deux séries de questions.

La première est de savoir quels sont les produits qui resteront véritablement "made in France" :

  • Les produits agroalimentaires d'origine et d'appellation contrôlée.
  • Les produits de luxe qui sont pour la plupart fabriqués et conçus en France et qui sont vendus très chers parce que l'histoire qu'ils racontent est une composante de l'ADN française. Cette histoire et cette culture ont encore beaucoup de valeurs aux yeux des peuples étrangers.
  • Enfin, peuvent rester les produits "made in France", tous ceux que nous pourrions inventer, développer et fabriquer en France. Mais là beaucoup reste a faire . la recherche est puissante ( grâce au crédit impôt recherche ), le développement de la recherche appliquée un peu moins , l’industrialisation très fragile.

La seconde série de questions, beaucoup plus lourde, revient à s'interroger sur les raisons pour lesquelles la réindustrialisation sera compliquée si la résistance au "made in France" persiste. La résistance est liée au coût de fabrication et à la complexité du fonctionnement des modèles de productions. Pour encourager le "made in France", on peut toujours activer des subventions, mais mieux vaudrait s'organiser pour faire baisser les charges de productions d'une part et alléger les procédures et les normes administratives d'autre part.

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