La guerre en Ukraine va obliger les démocraties libérales à accepter un nouvel ordre mondial<!-- --> | Atlantico.fr
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Pékin, plus que Moscou, a besoin non seulement des marchés occidentaux mais surtout Pékin a besoin d’un accès à des innovations technologiques.
Pékin, plus que Moscou, a besoin non seulement des marchés occidentaux mais surtout Pékin a besoin d’un accès à des innovations technologiques.
©Sergei BOBYLYOV / SPUTNIK / AFP

ATLANTICO BUSINESS

L’année 2022 qui s’achève a mis un terme à l’organisation du monde qui avait été définie après la chute du mur de Berlin. L’année 2023 devra inventer un nouvel équilibre et sortir les gouvernements des contradictions dans lesquelles ils sont tombés.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Lannée 2022 aura au moins un mérite. Celui davoir révélé au monde entier que son organisation conçue après la deuxième guerre mondiale, puis à la fin de la guerre froide après leffondrement du mur de Berlin, na pas réussi à maintenir la paix.

Le monde entier sest trompé parce quil sest illusionné sur la capacité du système défini par la Charte des Nations unies, puis par lOMC, à garantir un équilibre de longue durée.

A la fin du 20e siècle, les grandes démocraties libérales pensaient que l’économie de marché et les principes du capitalisme mondial pourraient simposer à la planète toute entière et diffuser les principes de libertés individuelles comme valeurs universelles dans les principales organisations et gouvernances. Les grandes démocraties libérales se sont trompées face à deux paradoxes.

Dun côté, le développement économique na pas permis de diffuser les principes de liberté dans des pays qui sinscrivaient dans une autre culture que la culture occidentale. Ils ont pris largent du libre échange, mais pas les responsabilités que cet argent supposait. Les pays comme la Russie et la Chine sont restés fidèles à des organisations très autoritaires et centralisées, en résistant à la tentation de libéraliser leur fonctionnement interne quitte à freiner la diffusion des effets de la prospérité économique.

Le premier paradoxe est que les pays autoritaires (comme la Russie ou la Chine) ont compris la nécessité de proposer à leur peuple une prospérité économique, sans pour autant assumer les changements de mode de vie que ça impliquait. Plus grave, beaucoup de pays émergents en Afrique, en Asie, en Amérique du Sud considèrent encore les dirigeants de la Russie ou de la Chine avec empathie.

Dun autre coté et cest le deuxième paradoxe, les grandes démocraties libérales ont été fragilisées par les effets de la concurrence internationale à lextérieur et par le creusement des inégalités à lintérieur qui ont alimenté des populismes.  

Le paradoxe, cest que la Russie et la Chine espéraient que ces fragilités leur soient fatales, en réalité, ces difficultés ont fabriqué des solidarités nouvelles. LOtan, qui était selon lexpression du président Français en état de mort cérébrale, sest renforcée autour des États Unis. Et l’Union européenne, qui était minée par les courants identitaires et le poids dune bureaucratie inefficace sest redressée autour de ses principes fondateurs, à savoir la défense de ses valeurs des libertés individuelles et de respect des frontières.

La guerre en Ukraine a donc réveillé les grandes démocraties libérales pour défendre par tous les moyens ce quelles avaient de plus chères : la liberté. 

A la surprise de beaucoup danalystes et de gouvernants, les grandes démocraties se sont mises daccord très rapidement pour fournir des armes et surtout pour freiner les flux financiers à destination des pays autoritaires et même bloquer lenvoi des produits hautement technologiques dont ils avaient besoin. Les efforts demandés aux démocrates ont été pour linstant acceptés

Les sanctions économiques auxquelles personne ne croyaient ont été déterminantes pour obliger la Russie et la Chine à réfléchir aux types dactions à mener. La Russie, par exemple, comptait sur lappui des Chinois, mais elle sest trompée, ce qui va lempêcher de réussir son opération spéciale en Ukraine.

 Le gouvernement de Pékin a visiblement renoncé à constituer un bloc de pays pour sattaquer aux pays occidentaux. Pékin, plus que Moscou, ne veut pas prendre le risque de sanctions économiques et financières. Pékin, plus que Moscou, a besoin non seulement des marchés occidentaux mais surtout Pékin a besoin dun accès à des innovations technologiques. La pandémie de Covid a mis la gouvernance chinoise dans limpossibilité de se défendre. La Chine navait ni le savoir, ni les vaccins qui lui auraient évité cette paralysie du pays en appliquant la thérapie du confinement. La leçon lui a couté très cher.

Pékin a compris quelle ne deviendrait jamais la première puissance mondiale si elle ne devenait pas une grande puissance économique. Et elle ne pourrait pas le devenir si elle ne possédait pas les processus innovants.

Le paradoxe des paradoxes dans lhistoire de 2022 est sans doute que lAmérique a pu se garantir quelques vingt années pendant lesquelles les Etats-Unis resteront la première puissance mondiale. Les Etats-Unis ont la technologie, les moyens de produire de linnovation et lambition de se doter aujourdhui dun nouvel appareil industriel. LEurope, elle, na pas encore intégré ce changement de paradigme. 

Il faudra donc bien en 2023 que les grandes nations remettent à jour la Charte des nations unies autour de quelques grands principes qui doivent transcender les clivages idéologiques, culturels ou religieux. Si le monde entier a besoin de prospérité économique, il aura besoin de partager les innovations technologiques sans détruire les moyens qui permettraient de générer ces technologies , cest-à-dire  la concurrence, les formations et la liberté individuelle. Ça ne peut fonctionner que dans le respect des accords internationaux, des traités et des contrats.

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