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La fonte des glaces en Arctique se fait désormais au rythme le plus rapide depuis au moins 1500 ans
©Reuters

L'âge de glace qu'ils disaient...

Les changements climatiques en Arctique s'accélèrent à une vitesse bien supérieure à d'autres endroits de la planète. Un rapport annuel de la NOAA alerte sur l'accélération de la fonte des glaces et l'apparente fin du permafrost. Jeremy Mathis, le directeur de la NOAA a déclaré en conférence de presse : «Les observations de cette année confirment que l'Arctique ne montre aucun signe de retour à l'état congelé de manière fiable ».

Nicolas Imbert

Nicolas Imbert

Nicolas Inbert est directeur exécutif de Green Cross France et Territoires.

Co-auteur de l'ouvrage "OCEAN: des clés pour agir " www.desclespouragir.com 

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Atlantico : En moins de vingt ans, l'Arctique a perdu 1,6 millions de km2 de glace. Comment expliquer cette accélération manifeste de la fonte des glaces et la fin du permafrost en région Arctique ? Quels sont les risques ?


Etendue de la glace de mer (en km²) Copyright : NOAA

Étendue mensuelle moyenne de la glace de mer dans l'Arctique entre janvier 1979 et 2018 
(en millions de km&) Copyright: 
NSIDC

Nicolas Imbert : Le dérèglement climatique est maintenant constaté depuis plusieurs dizaines d'années. Nous sommes exactement sur la trajectoire la plus haute prévue par les experts du GIEC,  par rapport à nos émissions de carbones actuelles, trop hautes quant aux engagements mondiaux de l’Accord de Paris. De plus, on se rend désormais compte que nous sommes dans une phase extrêmement rapide de la fonte des glaces et que la situation qui était inquiétante jusqu' à il y a trois quatre ans est en train de devenir dramatique. Ces millions de kilomètres carrés qui fondent sont catastrophiques, non seulement par rapport aux habitats naturels des ours polaires qui ne sont plus en état d'assurer leur survie, mais aussi et surtout par leur impact sur l’activité planctonique, et l’effet révélateur et accélérateur qu’ils jouent dans le dérèglement climatique. Cela signifie également que des surfaces entières sur lesquelles la banquise était homogène, praticable et reflétait le rayonnement solaire, deviennent des magmas de petits glaçons indissociées qui modifient l’albedo – la capacité de réflexion du sol – et bouleverse les écosystèmes locaux. L’explorateur Yvan Bourgnon a été à la rencontre du passage du nord-ouest cet été et a été lui-même impressionné par l'ampleur de cette fonte, et la différence constatée en 30 ans. Son exploit doit nous alerter sur la fragilité de l’Arctique.

Quelles sont les conséquences directes de cette diminution sur le reste de la planète (montée des eaux, risques pour les villes côtières…) ?

Il y a plusieurs enjeux dont la fonte des glaces et l'un des révélateurs.

Mais l'enjeu qui me semble le plus inquiétant et qui va nous impacter dans le court terme, c'est que cette accélération de la fonte des glaces en Arctique, les phénomènes extrêmes de sècheresse et les températures anormales qui ont été constatés sont assez similaire à ce que l'on constate sur la côte atlantique. Nous sommes régulés, dans l'est européen, par un courant qui s'appelle le Gulf Stream dont tout nous porte à croire qu'il s'affaiblit.

Cet affaiblissement ainsi que la fonte des glaces sont deux signes avant-coureurs qui nous font dire que nous sommes sur une pente d'accélération des effets visibles du réchauffement climatique. Il y a une urgence absolue à réduire beaucoup plus fortement nos émissions carbones et il faut le faire avec des moyens qui soient à la hauteur des enjeux. C’est-à-dire, pour la France et l'Europe, sortir de l'électricité, du fossile et du nucléaire. Et enclencher rapidement le virage vers plus d’efficacité énergétique, et des énergies renouvelables plus importantes en nombre et en diversité que ce que l'on voit aujourd'hui. Les pays scandinaves nous montrent que c'est tout à fait possible sur différents types d'échelle. Concrètement, pour atténuer le plus possible tous ces phénomènes, il faut faire tous les trois à quatre ans ce que nous avons réussi à accomplir ces vingt dernières années.

La vulnérabilité du littoral, et les risques pour les villes côtières, sont désormais des préoccupations du quotidien, et notamment en France. Dans le sud de la Bretagne nous pouvons constater que sur un certain nombre de tempêtes d'hiver, il y a eu des reculs de la bande côtière. Des villes comme Dunkerque pourraient avoir 15 à 20% de leurs surfaces submergées si le niveau de la mer montait ne serait-ce que de 20 centimètres. Mais ce n'est rien à côté de ce que l'on constate dans les outre-mer français et les îles du pacifique et de l'océan Indien. Rappelons-nous les inondations et les cyclones dans les Caraïbes qui sont également des effets du dérèglement climatiques. 

Face à des relevés aussi alarmants que penser de l'intérêt public et politique qui est porté à l'observation des pôles et au réchauffement climatique tant au niveau international que national ?

L'intérêt ? Je vous trouve optimiste. Il se trouve que l'Arctique est régulé par le Conseil de l'Arctique. On se rend compte depuis une dizaine d'années maintenant que ce conseil a beaucoup de mal à être une instance de gouvernance environnementale qui prenne des décisions à la hauteur des enjeux. Nous avons besoin de plus d'actions pour préserver les territoires polaires, et accélérer la mise en place de l’Accord de Paris. Qu’il s’agisse de mettre en place des Aires Marines Protégées dans l’Arctique, d’éviter l’exploitation déraisonnée des fonds marins ou l’ouverture de routes marines aussi risquées que polluantes, les enjeux sont immenses et nous savons quelles clés activer pour agir des maintenant. Nous devons également à la fois nous adapter et nous protéger quant à la montée des eaux, passer d’une situation de vulnérabilité du littoral à une meilleure résilience, ce qui passe par moins minéraliser les villes côtières, moins bétonner le littoral,  et mieux insérer la nature dans la ville. Les habitants du Pacifique, comme les peuples arctiques, ont beaucoup à nous apprendre en ce sens. Et, plus que jamais, accélérer la transition énergétique vers plus d’efficacité, la fin des énergies fossiles et nucléaire, et la transition vers les énergies renouvelables, qui sont des choix économiquement très avisés, et les mieux à mêmes d’atténuer les effets du dérèglement climatique et de nous adapter facilement.

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