La chute de Kaboul ? Beaucoup moins dangereuse pour l’Occident que nos fractures politiques internes<!-- --> | Atlantico.fr
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Des soldats américains montent la garde alors que des Afghans attendent de monter à bord d'un avion militaire pour quitter l'Afghanistan, à l'aéroport militaire de Kaboul le 19 août 2021.
Des soldats américains montent la garde alors que des Afghans attendent de monter à bord d'un avion militaire pour quitter l'Afghanistan, à l'aéroport militaire de Kaboul le 19 août 2021.
©SHAKIB RAHMANI / AFP

La Fin de l'histoire et le Dernier Homme

C’est en tous cas la thèse défendue par Francis Fukuyama, l’auteur qui avait marqué le monde avec son essai -souvent mal compris- sur la fin de l’Histoire.

Edouard Husson

Edouard Husson

Universitaire, Edouard Husson a dirigé ESCP Europe Business School de 2012 à 2014 puis a été vice-président de l’Université Paris Sciences & Lettres (PSL). Il est actuellement professeur à l’Institut Franco-Allemand d’Etudes Européennes (à l’Université de Cergy-Pontoise). Spécialiste de l’histoire de l’Allemagne et de l’Europe, il travaille en particulier sur la modernisation politique des sociétés depuis la Révolution française. Il est l’auteur d’ouvrages et de nombreux articles sur l’histoire de l’Allemagne depuis la Révolution française, l’histoire des mondialisations, l’histoire de la monnaie, l’histoire du nazisme et des autres violences de masse au XXème siècle  ou l’histoire des relations internationales et des conflits contemporains. Il écrit en ce moment une biographie de Benjamin Disraëli. 

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Atlantico : Dans un récent article paru dans The Economist, Francis Fukuyama, célèbre théoricien de la fin de l’histoire, explique qu’à ses yeux la défaite d’Afghanistan ne marque pas la fin de l’ère américaine, mais que la polarisation interne aux Etats-Unis pourrait en revanche jouer ce rôle. Partagez-vous ce constat ?

Edouard Husson : Le terme de polarisation n'est pas le plus adéquat. La polarisation est une bonne chose pour la démocratie. En revanche les Démocrates entretiennent depuis l'élection de Donald Trump en 2016 un climat de guerre civile. Et Fukuyama a raison. Les États-Unis en sont très affaiblis. Lui-même appartient à l'establishment.  Donc il pense risquer l'auto-exclusion en disant du bien de Trump. Mais il faudrait ajouter à son point de vue que l'ancien président avait trouvé un moyen de contrer le déclin. Diminution de l'engagement extérieur, intelligente diplomatie au Proche-Orient, remise à sa place de la Chine et protectionnisme intelligent, baisse fiscale plus forte que sous Reagan. Trump a laissé à Biden un pays en bon état. Mais les Démocrates sont tellement idéologiquement obsédés qu'ils dilapident en quelques mois l'héritage de Trump: le fiasco d'Afghanistan en est l'illustration. Yves Roucaute a magnifiquement montré dans ces colonnes l'aveuglement des Démocrates incapables de voir l'ensemble des parties avec lesquelles il aurait fallu négocier, à commencer par les héritiers de Massoud. 

Dans quelle mesure la polarisation politique peut-elle nuire aux pays occidentaux ? Quels sont les risques qu’elle fait peser sur la société ? A terme est-ce le modèle de la démocratie libérale qui est menacé ?

Encore une fois, nous ne sommes pas confrontés à une polarisation.  Mais au refus des partis autrefois au centre-gauche de jouer le jeu démocratique. En fait les partis à positionnement démocrate, ou macronien, sont prisonniers de l'extrême-gauche. La politique néototalitaire de Xi Jinping, l'islamo-gauchisme, l'hyperindividualisme sexuel sont autant de phénomènes internationaux fonctionnant sur un mode léniniste et auxquels les néo-libéraux ayant dû renoncer à leur modèle après la crise de 2008, ont eu recours pour compenser le vide de leur politique socio-économique. On confine comme Xi Jinping, on tolère les talibans parce que leurs homologues ont déjà gagné dans la tête de notre establishment. On fait passer des lois transhumanistes qui relèvent d'un eugénisme de confort. Face à cela, l'opposition a du mal à se structurer parce que les Démocrates & Cie préfèrent désormais le centralisme démocratique, le "bolchevisme consultatif" au débat républicain. 

A quel point la polarisation politique est-elle marquée en France ? Que peut-on faire pour y remédier ? 

Si seulement il y avait une polarisation ! Mais il y a un parti à tendance hégémonique et face à lui une opposition dispersée. Le problème est d'abord intellectuel ! Les partis d' opposition sont incapables de dénoncer le mal qui ronge notre démocratie. C'est pour cela qu'un article comme celui de Fukuyama fait du bien. Il oblige à réfléchir. 

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