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La chute continue des emplois "exposés" dans les pays développés
©Reuters

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Un constat s’impose : l’imbrication de l’industrie et des services est devenue si forte qu’elle rend de moins en moins pertinente la distinction traditionnelle entre les emplois industriels et les emplois tertiaires. À l’heure de la globalisation, il est en revanche très instructif de distinguer les emplois exposés à la concurrence internationale, qui concourent à la production des biens et services échangeables par-delà les frontières, de ceux qui en sont abrités. Extrait de "Dynamique des emplois exposés et abrités en France" Philippe Frocrain et Pierre-Noël Giraud, publié aux Presses des mines. 2/2

Philippe Frocain

Philippe Frocain

Philippe Frocrain est doctorant en économie

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Pierre-Noël  Giraud

Pierre-Noël Giraud

Pierre-Noël Giraud est professeur d’économie à Mines ParisTech

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Nous avons montré qu’en France, l’emploi exposé est minoritaire, en recul, et se tertiarise. C’est un phénomène que l’on observe dans de nombreux pays développés. Sur la même période (1999-2013) aux États-Unis, Hlatshwayo et Spence (2014) estiment que l’emploi exposé passe de 30 % à 26,3 % de l’emploi total, et se réduit en effectifs absolus (-3.4 millions) en raison d’un très fort repli de l’emploi manufacturier et agricole, non compensé par la progression des services exposés. S’agissant des rémunérations aux États-Unis, Jensen et Kletzer (2005) ont montré qu’elles sont en moyenne plus élevées dans le secteur exposé, en particulier dans les services. Ces auteurs mettent par ailleurs en évidence une baisse généralisée de l’emploi peu qualifié entre 1998 et 2002, associée à une forte progression des plus qualifiés dans les services exposés et le secteur abrité. Les tendances dégagées par Eliasson et al. (2012) dans le cas de la Suède sont également comparables aux nôtres.

Ils soulignent en particulier l’impressionnant dynamisme de l’emploi dans les activités de services échangeables (exposés). Au Royaume-Uni, l’emploi exposé s’est réduit de 770 000 entre 1996 et 2010 alors que l’emploi abrité augmentait de 3,29 millions (IPPR, 2011). Enfin, les estimations de Gonzales et al. (2012) indiquent que, même si entre 2000 et 2007 l’emploi exposé est beaucoup plus dynamique en Inde et au Chili qu’aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en France21, son poids dans l’emploi total a cependant décliné en Inde et à peine progressé au Chili. Dans tous ces pays, la rémunération est la plus élevée dans les services exposés.

Aux États-Unis comme en Inde, seuls pays pour lesquels Gonzales et al. (2012) peuvent décomposer l’emploi par niveau de qualification, les services exposés ont connu la plus forte augmentation de la part des plus qualifiés. Si l’on applique notre classification des emplois exposés et abrités aux autres pays européens (UE-27)22, on observe des tendances comparables. On assiste au déclin de la part de l’emploi exposé dans tous les pays, sous l’effet d’un repli de l’emploi agricole ou manufacturier. L’emploi exposé est partout minoritaire, sauf en Roumanie où une grande partie de la population active travaille dans l’agriculture. L’Allemagne, première puissance économique européenne, compte 30% d’exposés, composés majoritairement d’emplois industriels (57 %), même si les emplois de services exposés (37 %) ont progressé sur la pé- riode 1999-2013.

L’Italie, l’Autriche, la Finlande et la Suède, présentent une structure de l’emploi exposé proche de celle de l’Allemagne. À l’Ouest (Espagne, France, Royaume-Uni, Belgique, Pays-Bas), les services exposés dominent et l’industrie recule. En Europe centrale, l’emploi exposé avoisine les 40%, et correspond à une base industrielle forte. En Europe comme aux États-Unis, c’est donc l’emploi abrité qui affiche le plus fort dynamisme. Mais le repli de l’emploi exposé ne s’opère pas partout au même rythme ni à partir des mêmes niveaux, et les spécialisations varient sensiblement d’un pays à l’autre. En schématisant, on peut distinguer trois grandes zones en Europe : l’Ouest où l’emploi exposé est largement minoritaire et composé d’un grand nombre d’emplois de services; une partie centrale, comprenant aussi l’Italie et la Scandinavie, où l’emploi exposé est mieux représenté grâce à la résistance de l’emploi industriel ; et enfin une partie Sud-Est (Roumanie, Bulgarie, Grèce) où l’emploi exposé correspond d’abord à des emplois agricoles.

Extrait de "Dynamique des emplois exposés et abrités en France" Philippe Frocrain et Pierre-Noël Giraud, publié aux Presses des mines.

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