L’Ukraine et l’Europe : un nouveau départ ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Emmanuel Macron, Olaf Scholz et Mario Draghi ont effectué une visite en Ukraine ce jeudi.
Emmanuel Macron, Olaf Scholz et Mario Draghi ont effectué une visite en Ukraine ce jeudi.
©Sergei SUPINSKY / AFP

Diplomatie européenne

En visite à Kiev, Emmanuel Macron, Olaf Scholz et Mario Draghi ont tenté d'effacer les tensions passées avec le président ukrainien. Ils ont notamment confirmé qu’ils soutiennent sa demande d’obtention du statut de candidat à l’Union européenne pour l'Ukraine.

Cyrille Bret

Cyrille Bret

Cyrille Bret enseigne à Sciences Po Paris.

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Atlantico : Emmanuel Macron a effectué une série de déplacements en Europe de l’Est, en Roumanie et en Moldavie, avant de se rendre en Ukraine pour rencontrer Volodymyr Zelensky avec Olaf Scholz et Mario Draghi. Que va-t-on retenir de ce voyage ? Quel bilan tirer de ces visites et de ces déplacements ? 

Cyrille Bret : Sur le plan symbolique et politique, le déplacement collectif de quatre chefs d’État et de gouvernement à Kiev aura un impact durable. En rencontrant collectivement le président ukrainien Zelesnky, ils ont porté le soutien politique européen à l’Ukraine à un niveau encore inégalé. Avec ce déplacement, l’Union européenne apparaît pour ce qu’elle est : le principal soutien de l’Ukraine, et ce au plus haut niveau. Outre ce soutien à l’Ukraine, le déplacement du président français en Roumanie et en Moldavie marque une inflexion dans sa politique européenne : au terme de la Présidence Française de l’Union européenne, il entend retisser des liens avec une région d’Europe où son image n’est pas bonne. Au début de son premier mandat, Emmanuel Macron a en effet choisi la confrontation avec plusieurs gouvernements (Pologne, Hongrie) dont les dirigeants sont beaucoup moins européistes que lui. Ce déplacement prépare peut-être le prochain mandat du président français : président du Conseil européen.

Les objectifs que pouvait avoir le président de la République en se rendant en Ukraine ont-ils été atteints ? Les relations se sont-elles réellement “réchauffées” avec Kiev et Volodymyr Zelensky après les tensions de ces derniers mois créées par certaines déclarations d'Emmanuel Macron ?  

Cyrille Bret : Le président français a cherché à changer son image en Ukraine sans pour autant se renier. Sous la présidence Hollande comme sous la présidence Macron, la France a été un des soutiens les plus fermes et les plus actifs de l’Ukraine, sur le plan financier, diplomatique, symbolique, etc. L’activisme américain dans la zone a éclipsé cet aspect de la diplomatie française. En outre, le dialogue nourri par la France avec la Russie est incompréhensible voire scandaleur à Kiev. C’est que l’Ukraine est engagée dans une lutte pour sa survie, alors que le président français cherche, lui, à dessiner les contours d’une Europe d’après la guerre où la négociation avec la Russie interviendra nécessairement.

Les images d’Emmanuel Macron, de Mario Draghi et d’Olaf Scholz se rendant à Kiev ont fait le tour du monde. Derrière l'image d'unité, quelle réalité géopolitique y-a-t-il ?  Emmanuel Macron avait-il vraiment sa place et une marge de manœuvre ? Quid de l'Allemagne et de l'Italie ?

Cyrille Bret : Emmanuel Macron ne représentait pas seulement la France à Kiev, hier. Il représentait également la présidence du Conseil de l’Union européenne. En ce sens, ses initiatives et son discours se devaient d’être consensuels pour tous les Européens. Son accord avec le président du conseil italien et le chancelier allemand est réel : il exprime le point de vue de trois Etats membres fondateurs de la construction européenne, dont les économies, très importantes pour le continent, pâtissent fortement des sanctions décidées contre la Russie et qui seront appélés à financer la reconstruction de l’Ukraine après la guerre. Italie, Allemagne et France représentent en Ukraine un mouvement d’opinion fort et durable en faveur du soutien à l’Ukraine. Les tensions ou les divisions internes de l’Europe ne séparent pas ces trois pays mais ceux-ci avec les visées maximalistes de la Pologne par exemple.

Emmanuel Macron a conclu sa visite par une interview à la télévision française. Le message et la position française ont-ils évolué ? Emmanuel Macron aborde-t-il un tournant sur le front diplomatique et géopolitique ?

Cyrille Bret : Une inflexion oui, un tournant non. Emmanuel Macron sera bientôt dégagé de plusieurs contraintes, au premier chef la nécessité de dégager des consensus au sein de l’Union européenne. Il pourra alors retrouver une plus grande liberté d’action et exprimer la vision de la France pour cette région. Si la France souhaite la restauration de l’intégrité territoriale et de la souveraineté ukrainienne, elle ne vise ni le changement de régime à Moscou ni la transformatio de la Russie en paria. En effet, la géographie est tétue : la Russie et l’Union européenne sont promises à cohabiter sur le long terme. Le président français le sait et il fait entendre la voix de la raison en préparant les esprits à des négociations de paix futures.

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