L’Occident fait le pari que les sanctions économiques - et surtout le blocage de Swift - deviennent insupportables à Poutine <!-- --> | Atlantico.fr
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Vladimir Poutine et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, se rencontrent en marge d'un sommet de paix sur la Libye à Berlin, le 19 janvier 2020.
Vladimir Poutine et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, se rencontrent en marge d'un sommet de paix sur la Libye à Berlin, le 19 janvier 2020.
©ALEXEÏ NIKOLSKY / SPOUTNIK / AFP

Atlantico Business

Pour les Occidentaux, l’exclusion de la Russie du système Swift, c’est le degré extrême dans l’ordre des sanctions économiques et financières. Ils en espèrent une déstabilisation interne de Vladimir Poutine.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Le système Swift, c’est un peu le cœur du fonctionnement de la mondialisation. En fait, SWIFT est une société coopérative basée en Belgique, près de Bruxelles qui a été fondée en 1973 par les principales banques mondiales. Swift n’est pas une banque, c’est un système informatique qui permet à toute les banques de la planète de sécuriser l’envoi des ordres de paiement entre les différents établissements financiers, donc entre leurs clients. Chaque titulaire de compte est porteur d’un code Swift, c’est ce code qu'on retrouve sur les RIB, avec les codes BIC ou Iban qui permettent d’identifier celui qui envoie de l’argent et celui qui le reçoit, et qui permet aux acteurs de se renseigner et de se rassurer.

Tous les clients de banques ont un tel code, qui sera actionné à chaque fois qu’un chèque est signé, un virement effectué ou une carte de crédit utilisée. Et le réseau Swift permet de savoir si l'opération peut s’effectuer correctement. Si l’un des acteurs a un problème, si son compte n’est pas couvert, si le titulaire n’est pas le vrai, si la carte de crédit n’est pas garantie, Swift est en mesure de bloquer l’opération dans les secondes qui suivent.

Donc à partir du moment où Swift exclut du système les banques russes, ça signifie que les autres banques dans le monde ne travailleront plus avec les banques russes.

Concrètement, l’économie peut certes fonctionner, mais ceux qui vendent ne peuvent pas être payés. Donc à terme, c’est l’asphyxie à plus ou moins brève échéance. 

Alors, la communauté internationale n’a utilisé le Swift qu‘une seule fois en 2012, pour exclure les banques iraniennes, ce qui a mis l‘Iran en grande difficulté et qui a amené le régime iranien à négocier l’accord nucléaire en 2015. L‘Iran a été reconnectée jusqu’en 2018, année où Donald Trump a décidé de nouvelles sanctions. Faute de relations financières et banquières, l’économie iranienne s’est, par conséquent, retrouvée à genoux.

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La Russie dépend beaucoup de ses exportations en gaz, pétrole, et blé... donc elle est très dépendante de Swift. Mais au-delà, les Russes eux-mêmes subiront les conséquences. La grande majorité des Russes utilisent les moyens de paiement modernes et ils seront là aussi empêchés. Pas de carte de crédit, pas de chèque, pas de virement.

Alors l’asphyxie de l’économie russe est encore très théorique, parce que les Occidentaux ont laissé des trous dans la raquette. L’exclusion ne touchera pas la banque qui travaille pour Gazprom, par exemple, de façon à ce que les factures de gaz soient payées et que la Russie n’arrête pas les livraisons. Ceci à la demande de l’Allemagne qui est très dépendante des livraisons de gaz.

Par ailleurs, pour ce qui est des transactions internes, la Russie pourrait remplacer Swift par un système qui lui serait propre et qui assurerait les transactions domestiques.

Cela dit, combiné aux autres sanctions : gels des avoirs de la banque centrale russe, des actifs financiers ou immobilier des oligarques, suspension de l’accès au marché financier des institutions russes, arrêt des flux d’investissements étrangers, la décision de toucher au système Swift alourdit de façon importante la pression sur le Kremlin, qui se retrouve bani de toute la communauté internationale. Entre le bannissement, l‘impossibilité de circuler dans le monde et la gestion des pénuries et les effets de la guerre, Vladimir Poutine pourra difficilement convaincre son peuple qu‘il travaille pour son bien. En termes clairs, le président russe qui vient de découvrir que la résistance ukrainienne existe, va devoir tenir compte de la grogne des oligarques qui vont avoir du mal à travailler et à voyager, et la colère d’un peuple russe qui a déjà du mal à vivre correctement. 

La Russie va souffrir et le peuple russe va souffrir en premier de cette situation. Vladimir Poutine en sera donc comptable. Et beaucoup d’experts en Occident se demandent comment Poutine peut sortir d’une situation aussi grave dans laquelle il s’est mis tous seul.

Cela étant, le reste de la planète va souffrir aussi, parce qu’au-delà des valeurs occidentales auxquelles les Américains et les Européens sont très attachés, les peuples vont payer le gaz, le pétrole, le blé et d’autres produits beaucoup plus chers.

Et c’est peut-être ce que les dirigeants occidentaux n’ont pas assez expliqué à leur population, à savoir que la paix a un cout et la protection de nos valeurs aussi.

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