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A-t-on raison de confier la responsabilité de la communication de crise à une entité privée comme Twitter ?
A-t-on raison de confier la responsabilité de la communication de crise à une entité privée comme Twitter ?
©OLIVIER DOULIERY / AFP

Système d'alerte

L'un des usages les plus utiles de la plateforme était de permettre la transmission d'alertes en cas de catastrophes naturelles. Ses nouvelles règles l'ont remis en cause.

Didier  Heiderich

Didier Heiderich

Didier Heiderich est président de l’Observatoire International des Crises et directeur général d’un cabinet international spécialisé dans la gestion des enjeux sensibles.

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Atlantico : Depuis le rachat de Twitter par Elon Musk, la politique du réseau social a beaucoup évolué, notamment en matière de publications automatiques de tweets... Ce qu'il n'est plus possible de faire sans payer. Hélas, c'était là une fonctionnalité souvent utilisée à l'occasion de catastrophes naturelles. Dans quelle mesure ce changement de gouvernance pourrait-il s'avérer préjudiciable à l'avenir, en cas d'urgences ou de désastres ?

Didier Heiderich : Payer pour être sauvé ? C’est une question qui se pose depuis longtemps, il semblerait qu’Elon Musk a répondu indirectement à cette question. Rappelons qu’en cas de catastrophe naturelle le Préfet à un devoir d’information et un droit de réquisition, mais pas d’un réseau social. Mais l’autre problème est celui de l’impermanence des règles qui régissent Twitter, particulièrement depuis l’arrivée d’Elon Musk. Protéger des populations exige de limiter les incertitudes, Twitter en crée de nouvelles.

Il serait naïf de penser que le seul problème de Twitter, en matière de communication d'urgence, relève de la nécessité de payer pour gagner en visibilité. A l'heure de la fake news et de potentielles images truquées, quels sont les risques qu'abrite un tel réseau social ? Particulièrement quand il devient possible de payer pour obtenir une certification ?

Les cartes sont totalement brouillées à l’heure où chacun peut affirmer être une autorité par l’achat du macaron ou tout simplement se dire témoin d’une situation de crise. Nous avons pu le voir avec le COVID alors que les antivax étaient surreprésentés sur Twitter, donnant le sentiment qu’ils étaient majoritaires en France. En cas de catastrophe, de nombreux messages contradictoires peuvent nuire au comportement à adopter, voire tromper les secouristes sur les interventions à effectuer. C’est d’autant plus inquiétant que n’importe qui peut créer de fausses images qui seront très rapidement relayées, d’autant plus si elles mettent les pouvoirs publics en cause dans leur action. Aujourd’hui, il n’y a plus une seconde de répit, dès qu’il y a une situation de crise, les polémiques et fake news se font jour.

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Elon Musk a récemment décidé de supprimer le pôle associé aux relations publiques de Twitter, chargé notamment de répondre aux journalistes. Selon nos confrères de The Verge, qui alertent sur ce problème, c'est là l'une des preuves qui permettraient d'affirmer qu'en matière d'informations, le réseau social devient de moins en moins fiable. Qu'en pensez-vous ? Faut-il penser que ces problèmes n'existent que depuis le changement de gouvernance ? Peut-on réellement se contenter de blâmer Elon Musk comme s'il était le seul responsable à lui seul ?

Est-ce que Twitter a été fiable un jour ? Depuis ses débuts nous avons vu une dérive progressive entre information, opinion, désinformation jusqu’à Donald Trump appelant ses partisans à refuser les résultats de l’élection présidentielle. Elon Musk, n’en déplaise, ne sert que ses intérêts et c’est son droit dans les limites imposées par des législations disparates avec une réactivité du législateur qui sera toujours en retard sur les évolutions du réseau social.

A-t-on raison, selon vous, de confier la responsabilité de la communication de crise à une entité privée, Twitter en l'occurrence, et étrangère ? Ce type de situation ne soulève-t-elle pas d'importantes questions, en matière d'ingérence (et pourtant, à l'heure où Twitter a su devenir ce qu'il est, peut-on vraiment faire autrement) ? 

Non, en aucun cas il est envisageable d’abandonner l’alerte et l’information en cas de catastrophe à une plateforme étrangère qui en plus n’a aucun contrat avec l’État. Il s’agit d’un problème de souveraineté dans un domaine qui concerne directement la vie des citoyens. Rappelons que la sécurité des populations est une fonction régalienne de l’État. De mon point de vue, cela fait trop longtemps que l’on se trompe sur toute la ligne : je le répète, non les réseaux sociaux étrangers ne peuvent être des supports fiables en cas de crise. Il faut par conséquent prévoir d'autres canaux.

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