L’effroyable bilan de 30 ans d’idéologie antiraciste dévoyée <!-- --> | Atlantico.fr
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L'idéologie antiraciste est venue remplacer celle qui structurait autrefois la gauche socialiste et communiste.
L'idéologie antiraciste est venue remplacer celle qui structurait autrefois la gauche socialiste et communiste.
©Reuters

Effet boomerang

L'attaque menée contre Charlie-Hebdo est tragiquement révélateur de l'impasse dans laquelle 30 années passées à nier la réalité du choc des cultures au sein de la société ont conduit la France.

Vincent Tournier

Vincent Tournier

Vincent Tournier est maître de conférence de science politique à l’Institut d’études politiques de Grenoble.

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Paul-François Paoli

Paul-François Paoli

Paul-François Paoli est l'auteur de nombreux essais, dont Malaise de l'Occident : vers une révolution conservatrice ? (Pierre-Guillaume de Roux, 2014), Pour en finir avec l'idéologie antiraciste (2012) et Quand la gauche agonise (2016). En 2023, il a publié Une histoire de la Corse française (Tallandier). 

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  • L'idéologie antiraciste est venue remplacer celle qui structurait autrefois la gauche socialiste et communiste.
  • L’antiracisme "à la française" est devenu une caisse de résonnance du ressentiment venant de gens qui utilisent cette même idéologie pour nourrir leur frustration.
  • Cette idéologie a contribué à masquer les vrais problèmes de la France, notamment en matière d'immigration.
  • L'antiracisme français a favorisé la fragmentation de la société.

Atlantico : Charlie Hebdo, qui a fait l’objet d’une attaque terroriste ce mercredi 7 janvier, est accusé depuis longtemps de racisme, notamment à cause de ses caricatures de Mahomet. Par quel processus l’antiracisme s’est-il installé en France comme idéologie dominante ? Quel rôle a été joué par des associations comme la Licra ou SOS racisme ?

Paul-François Paoli : Dans mon livre "Pour en finir avec l'idéologie antiraciste" (édition Bourin, 2012), j’ai effectué une généalogie de l’antiracisme. Celui-ci s’est mis en place dans les années 80, au travers de SOS racisme, notamment, qui est né en 1983 avec à sa tête des personnes proches des milieux trotskystes et socialistes. J’interprète cette montée en puissance comme un remplacement de l’idéologie classique qui structurait autrefois la gauche socialiste et communiste, qui était principalement anticapitaliste. Face à l’écroulement du marxisme et de l’espérance révolutionnaire, la gauche avait besoin d’une idéologie sociétale qui s’adresse à des populations nouvelles, cela d’autant plus que son électorat ouvrier traditionnel commençait à passer à droite. Déjà, le FN avait une forte capacité d’attraction populaire.

L’idéologie de la lutte des classes a donc été remplacée par une volonté de transformation sociétale à travers le féminisme, l’antiracisme, etc., et nous en voyons aujourd’hui l’aboutissement. L’antiracisme est devenu une caisse de résonnance du ressentiment venant de gens qui utilisent cette même idéologie pour nourrir leur frustration. Ce qui s’est passé ce mercredi est flagrant : Charlie-Hebdo n’est absolument pas raciste, c’est un journal issu des années 70, de potaches violemment anticléricaux, qui pratiquent la caricature contre toutes les religions. Les catholiques ont une longue expérience de l’humiliation. Or il n’en va pas de même dans la vision islamique. Aujourd’hui, comme en 2011, Charlie-Hebdo paye sa violence anti-musulmane, qui ne doit en aucun cas être confondue avec de la violence raciste. Cette violence pratiquée à l’encontre des religieux est souvent scandaleuse, parfois abjecte et haineuse, mais cela, je me répète, ne relève pas du racisme.

Vincent Tournier : C’est une question compliquée parce que l’antiracisme a une longue histoire, qui trouve sa source dans des valeurs et des événements qui ont façonné en profondeur la culture française et européenne. On peut repérer les grandes étapes. La première, c’est d’abord le christianisme avec l’affirmation que tous les hommes sont à l’image de Dieu, ce qui explique d’ailleurs pourquoi le christianisme a été le premier à abolir l’esclavage (dès le 9ème siècle, avec le pape Jean VIII). La deuxième étape correspond au mouvement humaniste qui émerge avec la Renaissance et les Lumières. Vient ensuite la période post-1945, avec la condamnation du totalitarisme et de la colonisation. Il faut aussi tenir compte, dans le cas de la France, d’une culture républicaine qui conçoit la nation comme un mélange de races (c’est le thème du "chaudron" ou du "creuset" cher à Michelet et à Renan). La dernière étape, c’est celle qui s’ouvre avec l’immigration de masse dans les pays européens, notamment en France. Cette étape va de pair avec une ouverture des frontières qui n’a pas de précédent dans l’histoire des Etats-nations. L’antiracisme reflète alors un mélange singulier de valeurs où se retrouvent l’héritage humaniste (nous sommes tous des hommes) et la marchandisation (nous sommes tous des consommateurs).Mais l’antiracisme se constitue aussi dans une relation conflictuelle avec son alter ego. Aux mouvements antiracistes répond le Front national, tous deux devenant les deux pôles antagonistes dans un jeu de miroir où chacun développe ses vérités, ses obsessions et ses cécités.

Quelle utilisation politique a été faite de cet antiracisme ? Par qui, et pour quelles raisons ?

Paul-François Paoli : L’antiracisme en France a été la roue de secours idéologique d’une gauche en perte de dynamisme historique. Il en va de même pour l’idéologie du genre et la parité des sexes. Tout cela ne sert qu’à pallier un véritable vide idéologique.

Vincent Tournier : Les mouvements antiracistes sont le produit d’un certain contexte culturel et économique, mais ils ont aussi bénéficié d’un soutien politique. La loi Pleven de 1972 leur donne un formidable coup de pouce puisque les associations peuvent se porter partie civile et obtenir des dommages et intérêts, en plus des subventions publiques qu’elles reçoivent. En outre, elles ont été propulsées sur le devant de la scène par les jeux tactiques du Parti socialiste qui, dans les années 1980, après sa reconversion à l’économie de marché et à l’Europe, a eu besoin de reconstituer son corpus idéologique en se trouvant un nouveau "prolétariat". Les immigrés avaient une place toute prête.

La principale retombée politique a été de renvoyer le Front national et le discours anti-immigration hors de la sphère légitime du jeu politique. Une doxa s’est imposée (aidée il faut bien le dire par le Front national lui-même) à savoir que ce parti n’est pas un parti comme les autres, et que les opinions hostiles à l’immigration relèvent non pas du débat démocratique, mais de l’infraction pénale. Il est d’ailleurs intéressant de voir que, dans le roman de Houellebecq, c’est ce rejet qui constitue la cause du basculement électoral vers une république islamisée : si le candidat musulman emporte l’élection présidentielle, c’est parce que le PS et l’UMP préfèrent voter pour lui plutôt que pour Marine Le Pen. C’est parfaitement plausible puisque c’est le fameux "tout sauf le FN". C’est sans doute pour ça que le livre heurte. Sa trame procède d’un raisonnement quasiment expérimental qui prolonge les préférences actuelles : si un candidat musulman arrivait à se qualifier pour le second tour, ce qui n’est nullement impossible puisque l’électorat musulman est très homogène et qu’il pourrait échapper à la droite comme à la gauche, le résultat final aurait de fortes chances de correspondre au schéma imaginé par Houellebecq.  

Dans quelle mesure peut-on parler d’aveuglement de la part de ceux qui agitent la menace raciste en France ? Cela a-t-il conduit à occulter certains problèmes au sein de la société ?

Paul-François Paoli : L’alibi de l’antiracisme a servi à occulter le véritable drame de l’immigration en France. Aujourd’hui nous assistons à un effondrement du politiquement correct, c’est-à-dire cette censure phénoménale qui pèse sur la question de l’immigration en France. Ce sont les idéologues antiracistes du CNRS qui ont cherché à occulter tout débat sur la réalité de l’immigration en France - notamment islamique -, les mêmes qui ont voulu censurer Michèle Tribalat et ses travaux sur la cécité volontaire en France, ainsi que tous ceux qui ont cherché à mettre en évidence les effets pervers de l’antiracisme. Entendons-nous bien, le racisme est un fléau indiscutable, mais l’antiracisme tel qu’il existe en France n’a fait que l’accroître. Le fait de nier que la promiscuité entre des populations qui ne veulent pas vivre les unes à côté des autres provoque des drames ne fait qu’accentuer le mal.

Un fait n’est pas anodin : cette idéologie s’est mise en place lorsque le communisme a disparu du paysage. Rappelons-nous de la lettre stupéfiante envoyée par George Marchais en 1981 au recteur de la mosquée de Pais, dans laquelle il écrit qu’il faut par tous les moyens arrêter l’immigration musulmane en France. C’est à ce moment-là que le PC cesse d’être tendance dans les milieux de la gauche sociétale, et que le FN commence à prendre le relai. Aujourd’hui le discours de Marine Le Pen est bien moins virulent que celui de Marchais ! C’est alors que le PC devient un petit parti croupion qui n’existe plus comme acteur réel. L’antiracisme est devenu puissant au point d’inhiber la droite, jusqu’à empêcher Nicolas Sarkozy de mener une véritable radioscopie de la réalité française. Les militants antiracistes viennent même demander des comptes à cette droite qui a osé se poser la question. Mais aujourd’hui je crois que leur idéologie est en train de s’effondrer.

Vincent Tournier : Il faut d’abord voir le côté positif : l’antiracisme a le mérite de fixer des normes morales positives,fondées sur l’ouverture et la tolérance, donc conformes à notre idéal humaniste.

Cela dit, je pense que le péril raciste a été largement surévalué en France. Une certaine phobie antiraciste a eu pour effet de rendre très difficile toute discussion sereine sur l’immigration et ses effets, contribuant ainsi à la crise de confiance dans les élites politiques car ce n’est pas pour rien si les élites sont accusées de ne pas connaître la réalité du terrain.

Un autre problème est que  la cause antiraciste s’est emballée. Elle est devenue une idéologie, et le propre d’une idéologie, c’est de désigner des victimes et des bourreaux, en partant du principe que ceux qui ne sont pas du côté des victimes sont forcément du côté des bourreaux. C’est exactement la technique qu’utilisait le Parti communiste dans les années 1930 avec la rhétorique de l’antifascisme : "nous sommes les antifascistes, et si vous n’êtes pas avec nous, vous êtes des fascistes".

La réalité est toutefois plus complexe. Les victimes se sont avérées être aussi, à l’occasion, des bourreaux. L’antisémitisme des milieux arabo-musulmans s’est révélé tellement massif que les juifs sont contraints de changer de quartier, voire de quitter la France. Lorsqu’EdwyPlenel écrit son livre Pour les musulmans, il dit vouloir s’inscrire dans les traces d’Emile Zola qui a publié en 1896 un article intitulé "Pour les juifs". La démarche est louable, mais aujourd’hui, l’urgence serait plutôt de faire lire le texte de Zola aux musulmans.

Par ailleurs, l’immigration s’est accompagnée de tout un lot d’incivilités en tout genre (dont le voile islamique n’est finalement qu’une des manifestations) qui ont contribué à segmenter les groupes sociaux et les espaces. Une agressivité quotidienne, gratuite ou crapuleuse,a prospéré au détriment des Français de souche, dont le drame est qu’ils ne peuvent même pas s’en plaindre puisque cette situationne trouve pas sa place dans les schémas de pensée classiques de l’antiracisme. Je prendrais un seul exemple : l’agression antisémite de Créteil, à l’automne dernier, où un couple a été séquestré et violenté pour des motifs pécuniaires, avec un arrière-fond antisémite.Cette dimension antisémite a fait réagir les médias et les responsables politiques. C’est très bien, mais le problème est que, pour les Français de souche, cette situation est devenue tristement banale. L’Observatoire de la délinquance révélait ainsi que, en 2014, il y a eu 2.800 séquestrations, soit 8 par jour, parfois accompagnées d’actes de barbarie. Qui en parle ?

A quelles dérives le fait de voir du racisme dans toutes les déclarations ayant trait à l’islam, l’islamisme, l’immigration ou la délinquance a-t-il donné lieu ? A poser en victime toute une partie de la population, quelle place l’idéologie antiraciste a-t-elle pris dans la fragmentation de la société française ?

Paul-François Paoli : L’idéologie antiraciste est intériorisée comme une forme de mauvaise conscience, notamment chez les journalistes. Beaucoup d’entre eux se censurent au nom du sacro-saint principe qui consiste à ne pas stigmatiser des populations entières. Michel Houellebecq a raison dans son dernier roman de pointer du doigt ce choix de ne pas dire les choses. Les statistiques montrent pourtant que les agressions antisémites, pour ne prendre que cet exemple, sont le fait de personnes qui dans la plupart des cas partagent la même origine. Face à la réalité, l’Etat continuer d’édulcorer. Monsieur Cazeneuve se ridiculise lorsqu’il parle d’un "déséquilibré" qui attaque des policiers, ou quand il appelle à la mobilisation contre les propos prétendument racistes d’Eric Zemmour. L’idéologie antiraciste continue d’agir au plus haut niveau de l’Etat, mais aussi au quotidien. Tout un chacun a déjà fait l’expérience, ou a assisté à un contentieux au cours duquel une personne s’est prétendue victime de racisme au prétexte qu’elle est d’origine étrangère. Il appartient aujourd’hui aux politiques de mettre fin à ce qui est devenu une pathologie sociale.

Vincent Tournier : Sur France Inter, Patrick Cohen demandait récemment à Michel Houellebecq s’il n’avait pas tendance à "essentialiser" les musulmans.Le problème est que l’antiracisme conduit aussi à une forme d’essentialisation : on part du principe qu’une catégorie de la population est parnaturevictime de racisme et de discrimination, qu’elle est par nature victime de la population majoritaire. Mais est-ce vrai ? Combien de Noirs ou d’Arabes sont confrontés au racisme ou aux discriminations ? Si j’en crois des données européennes que j’analyse actuellement, 15% des musulmans en France ont le sentiment d’avoir été discriminé en fonction de leur religion. C’est déjà trop, mais cela ne permet pas de tirer des conclusions générales sur l’hostilité des Français (ce qui estune autre forme d’essentialisation), et encore moins de tout expliquer par le racisme. Par exemple, on dit que le retour du religieux est une réponse au manque d’hospitalité de la part des Français. C’estune thèse bienfragile sur le plan sociologique, qui n’explique pas pourquoi ce revivalisme religieux émerge partout dans le monde, y compris dans les pays européens qui sont supposés être plus ouverts que la France. Inversement, les sociologues envisagent rarement l’hypothèse que l’argument du racisme puisse être exploité par les minorités pour obtenir diverses compensations. Il existe pourtant de nombreux témoignages, chez les enseignants, les fonctionnaires, ou même les magistrats et les policiers, pour dire que l’argument du racisme est mis sur la table pour se dédouaner.

Aujourd’hui, bien que les auteurs de l’attentat ne soient pas encore identifiés, Charlie-Hebdo a-t-il fait les frais de cet antiracisme ? Le peu de défense dont le magazine a fait l’objet en a-t-il fait, aux yeux d’un certain nombre de personnes, le porte-étendard des ennemis de l’islam, alors qu’il se contentait de moquer l’islamisme ?

Paul-François Paoli : Charlie-Hebdo, journal libertaire qui depuis tant d’années a prôné la tolérance, la fin des frontières et l’immigration de masse, subit aujourd’hui de manière dramatique les conséquences de ses prises de position. Ce sont les membres de Charlie-Hebdo qui, d’une certaine manière, se sont ringardisés avec leur vision laïciste. Ils n’ont pas voulu comprendre que nous étions entrés dans un choc des civilisations tel que diagnostiqué par Samuel Huntington. Ce sont des gens qui ont lancé un boomerang, boomerang qui leur est revenu en pleine face.

Vincent Tournier : Tout le monde se désole du sort tragique de Charlie Hebdo, mais son drame, c’est qu’il est bien seul dans ce registre. La solidarité est sur toutes les lèvres, mais elle n’est jamais allée jusqu’à publier les fameuses caricatures, ce qui aurait pu être fait lorsque les locaux du journal ont été dévastés. On est d’ailleurs un peu gêné de voir le CFCM soutenir Charlie Hebdo, alors qu’il a lui-même été l’un des plaignants (avec l’UOIF) lors de son procès en 2006.

On déplore aujourd’hui que la liberté d’expression est attaquée, mais cette liberté s’est déjà bien érodée sous le poids des interdits. Tous ceux qui ont dit des choses désagréables sur l’islamont été écartés ou humiliés, du journaliste Claude Imbert à l’actrice Véronique Genest, sans oublier Eric Zemmour. Qui s’est insurgé quand la militante Christine Tasin a été condamné par un tribunal de Belfort pour avoir dit "l’islam est une saloperie" ? Cette phrase n’est sans doute pas très glorieuse, mais d’une certaine façon, elle relève typiquement de l’esprit de Charlie Hebdo. Et puis, soyons sérieux : si quelqu’un disait "le christianisme est une saloperie", qui s’en offusquerait ?

Les manifestants scandent "Je suis Charlie". Mais que signifie aujourd’hui "être Charlie" ? Je pense par exemple à ce journaliste de Canal Plus, Ali Baddou, qui a déclaré que le livre de Michel Houellebecq lui avait donné "la gerbe". Pourtant, Houellebecq est finalementun bon représentant de cet esprit qu’incarne Charlie, à la fois iconoclaste,provocateur etsatirique, plongeant allégrement dans la trivialité et la bouffonnerie. Si une nouvelle affaire des caricatures éclatait aujourd’hui, que feraient les journalistes ? Est-on sûr qu’ils ne seraient pas tentés de dire : j’ai la gerbe ?

Après le massacre du 7 janvier, la critique de l’islam va se raréfier, ce qui était vraisemblablement l’un des buts des assassins. Car leur message est clair : même si vous êtes protégés par la police, nous vous ferons la peau. La mouvance militante de l’islam va en tirer un énorme bénéfice, pas forcément dans l’immédiat car la situation va sans doute être tendue pour les musulmans dans les mois qui viennent. Mais il n’en reste pas moins que, désormais, les revendications musulmanes pourront plus facilement être plaidées car elles rencontreront moins d’oppositions dans le débat public.Les défenseurs de la laïcité auront du mal à trouver des soutiens.

 Cette évolution sera facilitée par le discours ambiant, dont le thème dominant est finalement que les musulmans sont les premières victimes collatérales du terrorisme. D’où lethème qui est martelé du « refus de l’amalgame », repris en chœur par tous les partis, y compris par Marine Le Pen. Cette volonté de faire la part des choses est compréhensible, mais elleconduit à masquertoute une partie de la réalité. Désormais, l’argument qui est devenu quasi officiel, c’est que 99% des musulmans sont des modérés qui dénoncent la violence. C’est très possible, mais qu’en sait-on ? Quelle est la proportion ? L’université de Milan a récemment calculé que, sur les réseaux sociaux et les forums,20% des messages arabophones publiés en France sont des messages de soutien à Daech (en Belgique, c’est 30%). Une enquête anglaise réalisée en 2007 montrait que 28% des musulmans préféreraient vivre sous la loi islamique que sous la loi anglaise. Un sondage de 2008 indiquait que 54% des musulmans de France souhaitaient l’application de la charia, dont 17% en intégralité.On est certes sur des minorités, mais ce sont des minorités actives et influentes, qui sont susceptibles de peser sur les autres. On aurait donc tort de s’en remettre à des affirmations trop rapides. Comment se fait-il par exemple qu’à Lunel, dans une petite ville du fin-fond de la France, on trouve une filière aussi massive (en proportion) de djihadistes prêts à en découdre ?

Partir du principe que l’écrasante majorité des musulmans rejettent les extrémistes violents met totalement de côté les connexions qui s’opèrent dans les revendications des uns et des autres. Les islamistes radicaux et les musulmans militants ont certes des différences de méthodes, ce qui est évidemment très important, mais ils n’ont pas forcément de désaccord sur les objectifs. On le voit bien avec les revendications sur l’abrogation des lois sur le voile et la burqa : tous vont dans le même sens. Cette convergence est bien le problème : comment les Français ne seraient-ils pas inquiets ? Entre le salafiste pacifiste et le salafiste djihadiste, la menace à court terme n’est évidemment pas de même nature. Mais à plus long terme ?

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