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Incendie meurtrier à Paris : comment savoir si votre immeuble est à haut risque quand un feu se déclare
©STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

Prévention

Dans la nuit du 4 au 5 février, un incendie s'est déclaré dans un immeuble du XVI arrondissement de Paris. Il s'agit de l'incendie, le plus meurtrier depuis 14 ans dans la capitale française avec un 10 morts et 37 blessés. Une femme suspectée d'être à l'origine du sinistre a été interpellée. Elle aurait derrière elle un lourd passé psychiatrique selon RTL.

Philippe Schultz

Philippe Schultz

Philippe Schultz est président de la société Défifeu.

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Atlantico : La nuit dernière dans le XVIe arrondissement de Paris, un incendie a provoqué la mort d'une dizaine de personnes. Si la piste criminelle semble être privilégiée, la question de la sécurité des immeubles face aux risques d'incendie reste centrale dans cette affaire. Quelles sont les choses à connaître pour savoir si son logement est bien sécurisé ?

Philippe Schultz : Il importe avant tout de savoir quel niveau de sécurité l’immeuble prend en compte, en fonction de sa date de construction.
Les réglementations de sécurité incendie des immeubles d’habitation sont relativement récentes, par rapport à l’âge de beaucoup de nos immeubles. Avant 1955, il n’existait aucune réglementation incendie en France dans le domaine de l’habitat. Progressivement, en 1960, puis 1970 et, enfin, en 1986, des arrêtés imposent des règles constructives qui doivent permettre la protection des résidents contre les risques d’incendie. 
Toutefois, le principe de non rétroactivité du droit, fait que des bâtiments anciens ne sont pas soumis à des prescriptions réglementaires parues postérieurement à la date de construction. 
La seule obligation rétroactive, quel que soit l’âge d’un immeuble, consiste à devoir protéger les cages d’escalier des locaux communs à risques. Autrement dit, il faut installer, à ce niveau, des portes coupe-feu. S’ajoute à cela l’obligation d’installer, dans chaque logement, un détecteur autonome avertisseur de fumée (DAAF).
Mais dans tous les autres domaines, aucune obligation rétroactive d’améliorer le niveau de sécurité n’existe à vrai dire, sauf si le bâtiment devait être classé insalubre et dangereux. Il s’agit là d’une procédure qui doit être préalablement engagée auprès de la mairie.

Pour en revenir au logement, l’objectif est de le préserver au mieux, par rapport à un incendie qui se déclarerait dans son environnement proche (logement voisin, cage d’escalier, locaux communs, caves privatives etc.). La porte palière du logement constitue, dans ce sens, une protection primordiale. Beaucoup de portes palières anciennes ne disposent que d’une résistance au feu limitée. Leur remplacement par des portes palières pare-flammes ½h constitue déjà un pas important dans la sécurisation d’un appartement, même s’il n’existe aucune obligation dans ce sens.

La sécurité contre les risques d’incendie en habitat collectif passe également par une conduite adaptée des résidents, en cas de feu. Quand une cage d’escalier est enfumée, on ne tente pas d’évacuer, mais on reste chez soi et on se calfeutre dans son logement, en se manifestant à la fenêtre. Le principe d’évacuation, en habitation ancienne, n’est donc pas systématique, contrairement aux locaux de travail ou aux établissements recevant du public. 
C’est une question de culture du risque qui, malheureusement, est trop défaillante en France.

Que faire si on se rend compte que des facteurs à risques (incendies, écroulement) sont présents ? 

Un immeuble relève d’un propriétaire qui peut être un bailleur public ou privé, ou d’une copropriété. La plupart du temps, une copropriété est gérée par un syndic. Ce sont ces personnes qui doivent être sollicitées, dans la mesure où elle sont directement concernées par la sécurité de leurs résidents.
En cas de non réponse, ou si le doute subsiste, la mairie peut être alertée.

A rebours, quels sont les équipements qui vous semblent les plus intéressants pour sécuriser un immeuble ?

Il est très difficile de répondre à une telle question, tant les conceptions architecturales sont nombreuses et variées, en fonction des périodes de construction. Et avec elles, les risques que peuvent présenter certains immeubles.
Avant tout, il faut éviter d’encombrer les communs, bloquer les portes coupe-feu qui existent. C’est une mesure de prévention à laquelle chacun peut contribuer. 
Il est possible d’améliorer le niveau de sécurité de nos immeubles anciens. Cela passe préalablement par un audit, si possible réalisé par un spécialiste. Dès lors, un programme de mise en sécurité progressive peut être décidé (portes palières de logements, désenfumage des cages d’escalier, isolement des locaux à risques etc.). Le propriétaire ou la copropriété peuvent alors, en fonction de leur capacité d’investissement, étaler ces travaux sur plusieurs années, afin d’atteindre un meilleur niveau de sécurité.

C’est essentiellement une question de volonté, bien davantage qu’une affaire de faisabilité technique !
Allier l’amélioration du bâti, tout en développant la culture du risque des résidents, représente la démarche idéale.

Dans le cas de l'incendie d'hier à Paris, la progression des pompiers a été freinée par la disposition spécifique du bâtiment. Comment peut on prendre en compte ces facteurs de risques "environnementaux" ?

L’absence d’une façade de l’immeuble donnant sur la voie publique est probablement la difficulté majeure à laquelle les sapeurs-pompiers ont eu à faire face. Le bâtiment est construit en retrait de la rue. On n’y accède qu’en traversant l’immeuble voisin. Ce mode constructif est d’ailleurs très fréquent en milieu urbain et à Paris en particulier.

Dès lors, l’usage des échelles aériennes (grandes échelles sur véhicules), est impossible.

L’arrêté du 31 janvier 1986 relatif à la protection contre l’incendie des bâtiments d’habitation, toujours en vigueur de nos jours, prescrit, dans de tels cas de figure, des mesures constructives spécifiques (protection des cages d’escalier etc.). Mais les bâtiments construits avant entrée en vigueur de ce texte ne peuvent, bien entendu, pas être mis en conformité, au risque de devoir être restructurés fondamentalement, voire démolis et reconstruits.

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