Ils ont peut-être perdu le référendum sur leur indépendance mais pas la guerre... Les nationalistes écossais bien partis pour tenir la clé de la prochaine majorité au Parlement britannique<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Europe
Ils ont peut-être perdu le référendum sur leur indépendance mais pas la guerre... Les nationalistes écossais bien partis pour tenir la clé de la prochaine majorité au Parlement britannique
©

Second round

L’élan en faveur du Scottish National Party (SNP) ne faiblit pas à l’approche des élections générales britanniques du 7 mai. En raflant la majorité des sièges écossais, il pourrait bien forcer le Labour à mettre en place un gouvernement de coalition... En négociant chèrement sa participation.

Hugh Schofield

Hugh Schofield

Hugh Schofield est correspondant en France pour la BBC.

Voir la bio »

Atlantico : Le « no » à l’indépendance écossaise est arrivé en tête, avec 55,3 % des voix à la suite du référendum de septembre 2014. Après cet échec cuisant, que reste-t-il du parti national écossais, le SNP ? Le parti a-t-il été mortellement atteint ?

Hugh Schofield : Loin de là ! Le SNP est dans une position de force incroyable. On pourrait même dire que la perte du referendum a été le meilleur résultat - politiquement parlant - pour le SNP. Bien sûr, sa vision d'une Ecosse indépendante a été reportée. Mais tous ceux qui ont dit que l'argument sur l’indépendance était maintenant clos pour une génération se sont sérieusement trompés. Ce qu’il se passe, c'est que le SNP est maintenant, de loin, le parti le plus populaire en Ecosse. Presque la moitié des votants ont choisi l'indépendance - et ayant une fois fait ce choix, comment peuvent-ils retourner vers un parti de l'union comme le Labour ou les Tories ? C'est ça la question. En plus, l'idée de l’indépendance n'est plus une chimère. C'est tangible, parce que raté de peu. Le SNP est devenu un mouvement de masse, avec plus d'adhérents que tous les autres partis confondus. Et les projections pour mai suggèrent qu'il pourrait atteindre 40, ou même 50 des 59 sièges en Ecosse. Véritablement, il est en position de force.

Les analystes affirment que lors des élections de mai prochain pour la Chambre des communes, les conservateurs et les travaillistes pourraient arriver à égalité dans la représentation. Quel serait alors le rôle des nationalistes écossais ? Comment peuvent-ils en tirer profit ?

Effectivement, les élections au Royaume-Uni s'annoncent fascinantes et très déstabilisatrices. Il est tout à fait possible que ni le Labour ni les Tories ne soient capables de gouverner tout seul. Les Tories risquent de perdre beaucoup en Angleterre à cause de l'Ukip. Mais le Labour est confronté à un problème pire. En ce moment, il possède 41 sièges en Ecosse. S’il y a un vrai wipe-out, il pourrait en perdre les trois-quarts - remplacés par le SNP. A ce moment-là, le Labour ne serait plus capable de former un gouvernement sans le SNP. Le SNP a écarté l'idée d'une coalition avec les Tories (qui sont détestés en Ecosse), mais ils entretiennent la possibilité d'une alliance (plus ou moins formelle) avec le Labour. Actuellement, Ed Miliband subit beaucoup de pressions de la part des Tories, mais aussi de certains éléments dans son propre parti, pour déclarer publiquement qu'il ne gouvernera pas avec le soutien du SNP. C'est un bon argument pour les Tories : comment le Labour peut-il envisager de former un gouvernement avec un parti dont la raison-d‘être est l'élimination du pays ?

On imagine que les écossais, plutôt de gauche, pourraient s'allier avec le Labour, mais pas gratuitement. Quelles pourraient être leurs revendications ? Seront-elles fortes ?

Effectivement, comme j'ai dit, le SNP ne s'alliera pas avec les Tories. Quoique, une victoire pour Cameron serait le résultat idéal pour les indépendantistes Ecossais. Pourquoi ? Parce que cela renforcerait plus profondément que jamais la déchirure entre une Angleterre de droite, eurosceptique ; et une Ecosse qui est quelque chose à part. En 2016, il y aura des élections pour le Parlement écossais. Une nouvelle grande victoire là-bas pour le SNP aboutirait certainement à un appel pour un deuxième referendum, et n'en déplaise à tous ceux qui disent que la question a été réglée en 2014, il sera impossible de résister la pression pour un nouveau vote.

Mais pour retourner à la question, si Miliband résiste à la pression et laisse ouverte la porte a un arrangement avec le SNP pour gouverner, ça ne sera pas une coalition formelle, avec Alex Salmond (le vrai poids lourd du parti même si il n'est plus son leader) en Premier ministre adjoint. Le plus probable est un système ou le SNP apporterait ses voix au gouvernement socialiste au cas par cas. C'est une recette pour l’instabilité. Le SNP demanderait certainement plus de pouvoirs pour l'assemblée en Ecosse - sur l'impôt par exemple. En principe, ils vont aussi demander le retrait des sous-marins nucléaires des ports écossais. Mais ça, c’est très difficilement envisageable.

Malgré l'échec du référendum, les nationalistes ne sont-ils pas en passe d'obtenir une certaine victoire grâce à cette situation ? En quoi s’agit-il d'un casse-tête pour la politique britannique ?

Oui absolument. Comme je l'ai dit. Le SNP est dans une position de force incroyable, étant donné qu'il a 'perdu' le referendum. C'est un cas d’école qui montre comment, en politique, ne pas atteindre ses objectifs est préférable, car ça attise l'appétit du public pour ces mêmes objectifs. Je dirais que la dissolution de l'Union est de plus en plus quelque chose à prendre en sérieux. Imaginez un scénario où les conservateurs gouvernent encore en Angleterre grâce à la victoire du SNP en Ecosse, qui a privé les socialistes de 40 sièges. Imaginez un referendum sur l'Europe où les Anglais veulent quitter et les Ecossais veulent rester dans l'UE. Les forces centrifuges peuvent très facilement devenir irrésistibles. On fait la comparaison avec les élections en Irlande en 1918 (l'Irlande faisait toujours partie du Royaume-Uni). C'était le Sinn Fein qui l’a emporté (venant de nulle part), et l'Irlande était en route pour l'indépendance.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !