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Il n’y a pas qu’au FBI… ces professions qui n’arrivent pas à recruter des jeunes en raison de leur consommation de drogue
©Reuters

Fumette interdite

James Cowey est directeur du FBI, et il a récemment fait une déclaration assez surprenante. D'après lui, si le FBI ne parvient plus à recruter, c'est en raison de... la consommation de cannabis des jeunes.

Dan Véléa

Dan Véléa

Le Docteur Dan Véléa est psychiatre addictologue à Paris.

Il est l'auteur de nombreux ouvrages sur les addictions, dont Toxicomanie et conduites addictives (Heures-de-France). Avec Michel Hautefeuille, il a co-écrit Les addictions à Internet (Payot) et Les drogues de synthèse (PUF, Que sais-je ?, Paris, 2002).

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Atlantico : Le FBI s'inquiète de ne plus pouvoir dénicher de nouvelles jeunes recrues, leur règlement imposant de ne pas avoir fumé de cannabis les trois années précédant la procédure d'embauche, critère auquel peu de candidats correspondent. Quels sont les métiers qui en France imposent également une "sobriété" et comment sont-ils impactés par la consommation de cannabis des jeunes (les plus gros consommateurs d'Europe) ?

Dan Véléa : Il s’agit en premier lieu de métiers qui impliquent d’avoir sous sa responsabilité des usagers, qui pourraient être victimes d’accidents. Je pense aux pilotes d’avion, aux conducteurs de trains, aux ouvriers qui manipulent des engins de chantier. Certains métiers sont en grande partie fondés sur l’image qu’on donne de soi, il n’est donc pas permis d’arriver sous l’influence de cannabis ou d’alcool. La police, la santé ou les métiers qui impliquent un contact avec les enfants font partie des métiers requérant une certaine exemplarité au niveau de la consommation de stupéfiants.

Dans le cas américain, les critères mentionnés sont aberrants. Le cannabis est une substance dont les effets se dissipent au bout de six heures. Sur la durée, les effets ne sont pas les mêmes que ceux de l’alcool, et dans les discours on en fait la pire des substances. Ces règles relèvent purement du politiquement correct. Même si je ne milite pas pour la légalisation, en l’occurrence on sort du débat intelligent.

Au lieu de cela, je pense que l’éducation et la prévention dans les métiers sensibles est essentielle. Il faut expliquer aux personnes qui, dans le cadre de leur profession, doivent être à 100% de leurs capacités, en quoi le cannabis est dangereux : baisse de la vigilance, des capacités d’attention et de réactivité. On obtient de bien meilleurs résultats ainsi que si on impose des règles arbitraires.

Sans parler d'obligation préalable à l'embauche, quelles sont les professions où la consommation de drogue chez les jeunes les empêche de se stabiliser dans l'emploi et pose de graves problèmes à l'employeur ?

Selon la loi l’usage de substances psychoactives est formellement interdit dans le cadre professionnel. L’employeur est censé le stipuler auprès de ses employés. Et si dans certains métiers des contrôles sont faits, c’est parce qu’ils exigent un fort niveau d’attention. La chose se fait dans une logique de sécurité, et non d’enquête de moralité.

Dans le cas d’une consommation chronique de cannabis, cela peut avoir un effet de désinvestissement, ce que nous appelons le syndrome "amotivationnel". Ramollies, les personnes concernées n’ont plus d’initiative, plus d’attention, et pénalisent donc l’entreprise par leur manque d’efficacité. Ne nous trompons pas, dans toutes les professions ces substances sont consommées. Il n’existe pas un corps de métier plus touché que l’autre. Et à partir du moment où le licenciement est mis dans la balance, c’est aux gens de se soigner.

Y a-t-il un point commun entre les professions les plus touchées ? Y a-t-il des professions plus exposées aux "profils de consommateurs de stupéfiants" ? Pourquoi ?

Des métiers comme ceux de militaire, policier ou pompier, qui exposent à des situations violentes et traumatisantes, peuvent inciter à trouver une automédication dans les substances médicamenteuses, illicites, ou dans l’alcool.

Globalement, les métiers à responsabilité, à forte décharge d’adrénaline, sont les premiers concernés. Pensez à la pression qui pèse sur les épaules d’un pilote de ligne, ou d’un policier ou un pompier au cœur d’une action dangereuse. Sauf qu’on observe que ce ne sont pas seulement ces métiers extrêmes qui sont concernés, et que de plus en plus de métiers sont concernés par une hausse de la consommation de substances.

Quelles sont les possibilités sur les secteurs en tension sur ces questions ? Des employeurs peuvent-ils se prémunir contre une tendance sociale de fond, ou sont-ils condamnés à devoir s'adapter ?

L’entreprise est légalement tenue d’assurer la sécurité et la santé de ses employés. Si jamais une personne ne se sent pas bien sur son lieu de travail et que l’on soupçonne une consommation de substances, il faut contacter la médecine du travail, qui délivrera un certificat d’aptitude, ou au contraire orientera vers des soins. L’employeur ne peut pas contourner sa responsabilité, il est obligé d’intervenir pour se protéger lui-même, protéger ses autres employés ainsi que ses usagers. Cela ne se solde pas forcément par un licenciement, la personne peut se rétablir. Mais si le cas est trop extrême, alors la médecine du travail décrète une inaptitude au travail.

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