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Homosexualité : éternel humain ou création contemporaine ?
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Fausses évidences

La chasse aux clichés est ouverte. Dans l'esprit de la série d’émissions "Les Évidences universelles" diffusée sur France Culture, un livre écrit par Raphaël Liogier s'attaque avec humour aux préjugés. En voici quelques bonnes feuilles. Premier épisode : l'homosexualité

Raphaël Liogier

Raphaël Liogier

Raphaël Liogier est sociologue et philosophe. Il est professeur des universités à l'Institut d'Études Politiques d'Aix-en-Provence et dirige l'Observatoire du religieux. Il a notamment publié : Le Mythe de l'islamisation, essai sur une obsession collective (Le Seuil, 2012) ; Souci de soi, conscience du monde. Vers une religion globale ? (Armand Colin, 2012) ; Une laïcité « légitime » : la France et ses religions d'État (Entrelacs, 2006).

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Il n’y a pas toujours eu d’homosexuels. Tout simplement parce qu’il n'y a pas, non plus, toujours eu d’hétérosexuels. Ce qui ne veut pas dire que l’humanité a pu un jour se passer de sexualité, mais que la classe des individus proprement homosexuels, opposée par nature à une autre classe d’individus appelée hétérosexuels, est récente. Le mot homosexuel apparaît à la fin du XIX siècle, en 1869, sous la plume d’un journaliste hongrois, Karl Maria Kertbeny, alors que le terme hétérosexuel n’existait pas encore. Il sera inventé plus tard pour désigner la classe de ceux qui se considèrent comme sexuellement normaux. Même si les doctrines chrétiennes, musulmanes et judaïques, tout comme le bouddhisme d'ailleurs (bref la plupart des dites grandes religions), condamnent sévèrement la sodomie, une action particulière répréhensible, pécheresse, comme le serait l’acte de mentir ou de voler, il n’existe pas dans ces religions une catégorie de la population considérée par essence, intrinsèquement, comme sodomite.

Certes, l’on parle des sodomites, à l’instar des voleurs ou des menteurs, mais, comme pour ces derniers, qui ne sont pas voleurs ou menteurs par essence mais seulement tant qu’ils volent et qu’ils mentent, le sodomite n’est pas sodomite par nature mais seulement par destination, conjoncturellement, à la mesure d’un acte déviant qu’il aurait pu éviter. On dira qu’untel est sodomite parce que l’on croit savoir qu’il s’adonne à cette pratique et tant qu’il s’y adonne, mais l’on ne dira pas que cette pratique révèle sa nature de sodomite, qu’il a toujours été ainsi, même si nous ne le savions pas et que lui aussi l’ignorait, comme si son action ne faisait que manifester sa vraie nature. L’idée d’un sodomite par nature et refoulé eût été proprement inconcevable au Moyen Âge.

Un penchant, rien de plus

Du reste, dans nombre de sociétés, l’homosexualité ne servait pas à désigner des individus intrinsèquement différents ni, d’ailleurs, à décrire des actions répréhensibles. C’est le cas de la Grèce antique où, pour certains auteurs, l’amour des beaux garçons, ou éphèbes, est la plus haute manifestation de l’éros, plus puissante que celle du couple homme-femme, car elle est gratuite, indépendante des nécessités de la reproduction biologique. La plus haute expression de cette amitié non soumise à la reproduction biologique, amitié métaphysique donc, étant le fameux amour platonique.

La pédagogie pouvait se confiner à la pédophilie, non pas au viol, au profit et à la manipulation de l’enfant, mais à l’amitié des jeunes garçons, à l’amour de leur croissance intellectuelle, physique et morale. Le plaisir homosexuel était empreint de poésie. Les plus grandes poétesses grecques, dit-on, vivaient sur l’île de Lesbos, qui donna le mot lesbienne.

L’homosexualité peut donc être un penchant tout à fait légitime, parfois même re-commandé, expression d’une hauteur de sentiment, de raffinement et de grandeur d’âme, à l’opposé de la sordide esthétique monothéiste, stigmatisant le sodomite.

Extrait de "Les évidences universelles" de Raphaël Liogier, publié aux Editions de la Librairie de la Galerie (avril 2011)

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