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H1N1, grippe porcine, variole, SRAS… quand les virus tueurs s'échappent des laboratoires
©REUTERS/Jerry Lampen/Files

Danger

L’Institut Pasteur a annoncé ce dimanche avoir perdu des tubes contenant des fragments du virus du SRAS, une maladie infectieuse des poumons. D'autres cas de ce genre ont déjà eu lieu par le passé.

Alerte évasion ! L'Institut Pasteur a constaté, comme annoncé ce dimanche, que des tubes contenant des fragments du virus du SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) avaient disparu de ses laboratoires. Aucune précision n'est donnée quant au nombre de tubes perdus mais l'Institut indique que leur perte témoigne "d'un défaut de traçabilité sur certains échantillons". Les experts indépendants saisis par les autorités sanitaires ont toutefois qualifié de "nul" le potentiel infectieux des tubes perdus. Une annonce qui laisse perplexe François Bricaire, chef du service Maladies infectieuses et tropicales de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière de Paris, interrogé par Atlantico. "D'une façon générale si un laboratoire perd un virus, le risque d'infection dépend du virus lui-même, de ses capacités de diffusion, de sa virulence. Pour un virus tel que le SRAS  ou d'autres virus respiratoires, il très difficile de certifier qu'il n'y a aucun risque. Cela dépend des conditions de la perte, et si c'est un vol, il faut s'interroger sur les objectifs du voleurs…".

Mais d'ordinaire les conditions de travail des chercheurs sont "extrêmement strictes", assure François Bricaire. "Ces laboratoires sont protégés à des degrés de confinement élevés. Les virus dangereux sont traités en milieu P4 de très haute protection. Tout est fait fait pour que rien ne puisse sortir".  Pourtant, dans le passé, des virus potentiellement pandémiques ont déjà été égarés. En effet, le site Slate(en anglais) a récemment raconté ces "histoires terrifiantes de virus qui s'échappent des laboratoires". Pourtant,

Le site prend par exemple le cas de la grippe H1N1 apparue pour la première fois avec la terrible grippe espagnole de 1918 qui tua plus de cinquante millions de personnes. Si encore à l'heure actuelle, les scientifiques et les médecins ignorent comment ce virus a germé et disparu subitement en 1919, force est de constater qu'il est réapparu à plusieurs reprises depuis (notamment sous une forme beaucoup moins virulente avec la grippe saisonnière).

Désormais, les analyses génétiques modernes permettent d'identifier précisément les agents pathogènes, et parce que tous les agents pathogènes en circulation montrent des changements génétiques au cours du temps, il est possible de déterminer la date d'apparition de celui-ci. Et, selon Slate, si un agent pathogène apparaît dans la nature alors qu'il n'a pas circulé pendant des années, voire des décennies, on peut supposer qu'il s'est échappé d'un des laboratoires dans lequel il était entreposé pour être étudié.

C'est donc le cas pour le virus de la grippe H1N1. Celui-ci est tout d'abord réapparu sous forme de grippe porcine aux Etats-Unis en 1976. Plus précisément, en février de cette année, un soldat basé au Fort Dix dans le New Jersey se plaint d'être très fatigué et extrêmement faible. Le lendemain, il meurt et dans la foulée quatre autres personnes ont été hospitalisées d'urgence car elles présentaient les mêmes symptômes. Deux semaines plus tard, les autorités annoncent que le décès de ce soldat est dû à la grippe porcine. De plus des recherches révèlent que 500 personnes travaillant sur le même site militaire ont contracté la grippe porcine sans toutefois tomber malade. Devant le risque pandémique, le président Gerald Ford lance une campagne de vaccination de l'ensemble de la population. La maladie ne s'est finalement jamais propagée. Le vaccin, lui, est accusé d'avoir fait plus de vingt victimes. Mais, le spectre d'un retour de la grippe espagnole terrorisa pendant de nombreuses semaines la population.

Le virus H1N1 est réapparu sous forme humaine en 1977 en Union soviétique et en Chine. A l'époque, les virologues ont rapidement émis l'hypothèse que la résurgence de ce virus était la conséquence de sa disparition en 1949-50 d'un laboratoire. Comme cela a été confirmé en 2010 grâce à l'avancée des techniques génomiques. Ainsi, dans une étude publiée dans PLOS One on peut lire : "Le cas le plus célèbre de la réapparition d'un virus suite à sa "sortie" de laboratoire est la ré -émergence de la grippe H1N1. En effet, ce virus a été observé en Chine en mai 1977 et en Russie peu de temps après. Un retour qui est la conséquence de son évasion d'un laboratoire visant à préparer un vaccin contre la grippe H1N1 en réponse à la grippe porcine d'alerte pandémique qui avait touché les Etats-Unis en 1976".

Comme l'indique Slate, en 1977, la pandémie s'est rapidement propagée dans le reste du monde mais heureusement le virus était bénin et le nombre de décès relativement faible. Mais celui-ci a continué à circuler jusqu'en 2009 lorsque le virus pH1N1 l'a remplacé. En effet, lorsque le virus H1N1 a fait sa réapparition au Mexique, c'était sous une forme génétique inédite.

Autre cas : celui de la variole en Grande-Bretagne. Si cette maladie a été officiellement totalement éradiquée en 1977, durant la période allant de 1963 à 1978, elle a suscité l'inquiétude au Royaume-Uni puisqu'il a été démontré que ce virus a été responsable de quatre hospitalisations (aucun décès). Une réintroduction qui était la conséquence de retours de voyages de personnes étant allées là où la variole était encore endémique. Au cours de cette même période, au moins 80 cas et trois décès résultent de trois évasions distinctes de deux laboratoires où des échantillons de varioles étaient conservés.

La première évasion de laboratoire reconnue date du mois de mars 1972 avec l'infection d'un assistant du laboratoire de la London School of Hygiene and Tropical Medicine. Celui-ci observait un germe du virus de la variole mais sur une table de laboratoire non confinée. Hospitalisée cette personne avait été placée en isolement mais avait infecté deux personnes venues rendre visites à un patient dans un lit situé à-côté de sa zone de quarantaine. Les deux personnes sont décédées mais ont à leur tour contaminées une infirmière, qui a survécu.

En août 1978, un photographe médical de l'école médicale de Birmingham est à son tour décédé après avoir attrapé la variole. Il a contaminé sa mère qui a survécu. Son lieu de travail se trouvait juste au-dessus du laboratoire de la variole de l'école médicale de Birmingham. Une ventilation défectueuse et des lacunes dans la manipulation du virus sont à l'origine de ces infections.

Enfin, l'encéphalite équine qui frappa le Venezuela en 1995. Il s'agit d'une maladie virale transmise par les moustiques et qui frappe épisodiquement la région et/ou le continent. Le virus affecte toutes les espèces équines, telles que les chevaux, les ânes et les zèbres. Après l'infection, ceux-ci meurent subitement ou présente des troubles du système nerveux central d’évolution progressive. Problème, cette maladie peut aussi être contractée par l'homme. S'il y a eu d'importantes épidémies des années 1930 aux années 1970, une analyse moderne montre que la présence d'un même gène dans tous les foyers de contamination. Celui-ci correspondait à un germe isolé en 1938 pour élaborer les vaccins. Ainsi, de 1938 à 1972, de nombreux cas ont été recensés. Et en 1995, une épidémie d'encéphalite équine frappa le Venezuela et la Colombie. Au Venezuela, on dénombra au moins 10 000 personnes contaminées et 11 décès. En Colombie, il y eu 75 000 cas humains avec 3 000 complications neurologiques et près de 300 décès.

Toutefois, selon François Bricaire, ces virus échappés ne sauraient être considérés comme une vraie menace pour l'humanité. "Il peut y avoir des accidents mais fort heureusement cela s'est plus souvent soldé par des problèmes pour les chercheurs que par des épidémies sur la population. Toutefois, sur le plan théorique, on peut en effet imaginer qu'un virus transformé devienne très virulent se propage rapidement et puissamment. Ce scénario catastrophe se rapproche de la science-fiction. Il est peu probable mais pas impossible."

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