« Global Britain » : Boris Johnson à la conquête de l’Asie<!-- --> | Atlantico.fr
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Le Premier ministre britannique, Boris Johnson, lors de la cérémonie de clôture du deuxième jour du Sommet mondial sur l'éducation à Londres, le 29 juillet 2021.
Le Premier ministre britannique, Boris Johnson, lors de la cérémonie de clôture du deuxième jour du Sommet mondial sur l'éducation à Londres, le 29 juillet 2021.
©TOLGA AKMEN / PISCINE / AFP

Royaume-Uni

« Global Britain » est la nouvelle vision pour définir le projet britannique pour 2030. Il propose aux Britanniques un projet de société. Sous la conduite de Boris Johnson, le Royaume-Uni ne se veut plus seulement grand, mais se rêve global. Face à la montée en puissance de l’Asie, le Royaume-Uni réoriente ses priorités stratégiques.

Emeric  Guisset

Emeric Guisset

Emeric Guisset est secrétaire général adjoint du think-tank Le Millénaire.

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Florian Le Cron

Florian Le Cron

Florian Le Cron est analyste du Millénaire.

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Théophile Braud

Théophile Braud

Théophile Braud est analyste du Millénaire.

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« Global Britain » est la nouvelle vision détaillée dans la revue “The Integrated Review of Security, Defence, Development and Foreign Policy”, qui a cette année pour titre « Global Britain in a competitive age », pour définir le projet britannique pour 2030. Il est le prolongement à l’échelle internationale du concept du « Take back control » et propose aux britanniques un projet de société pour bâtir un Royaume-Uni prospère, rayonnant sur tout le globe. Sous la conduite de Boris Johnson, le Royaume ne se veut plus seulement grand, mais se rêve global.

Une réorientation stratégique

Face à la montée en puissance de l’Asie, tirée par la croissance chinoise, le Royaume-Uni réoriente ses priorités stratégiques. Il s’adapte à une nouvelle ère géopolitique et géoéconomique qui voit le barycentre du monde se déplacer vers l’Est. Dans un monde devenu plus compétitif, où s’affronte États démocratiques, États autoritaires, groupes criminels et multinationales, Boris Johnson réarme son pays afin qu’il puisse défendre efficacement les intérêts du peuple Britannique. Ainsi, d’ici la fin de l’année le Royaume-Uni menera  une série d’exercices militaires d’ampleur, l’opération Fortis. Sous commandement de la Royal Navy, le nouveau porte-avion HMS Queen Elizabeth missionne la traversée de Gibraltar, de Suez, et de l’Océan Indien, pour finalement atteindre la Mer de Chine méridionale. Un long périple qui est l’occasion d’exercices conjoints avec les marines occidentales et de la région Pacifique, indiennes, australiennes ou encore japonaises.    

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Si les intérêts du peuple Britannique se déportent de plus en plus vers l’Asie, c’est aussi dans cette région du monde que leur plus grande menace prospère.  Fidèle à son histoire de peuple de commerçants, les Britanniques ambitionnent de  conquerir de nouveaux marchés. L'accent est dès lors mis sur les liens commerciaux, par l’adhésion à l’Accord de partenariat transpacifique, et l'obtention du statut d'observateur au sein de l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est. En ce sens, c’est une erreur d’analyser le projet de Boris Johnson comme un repli sur soi en raison du Brexit. « Global Britain » est en réalité un projet d’ouverture qui vise offrir un Royaume-Uni des partenaires tout autour du globe. Pourtant dans la zone du monde qui sera la plus dynamique, la République Populaire de Chine fait office de défi, voire d’adversaire. La Chine est en effet un adversaire pour les britanniques, tant les projets de société et valeurs promues par les deux pays sont opposées. Mais parce que le temps où elle pouvait être ignorée est révolu, la Chine est aussi un partenaire indispensable sur les problématiques mondiales comme la lutte contre le réchauffement climatique.

Une nouvelle doctrine pour conquérir le monde 

Au-delà de multiplier les partenariats à travers le monde, la philosophie du projet « Global Britain » expression la volonté de rendre au Royaume-Uni son rayonnement, son influence et sa grandeur. Il s’agit pour Boris Johnson d’offrir à son pays une place de choix dans le concert des nations au sein d’un monde en mutation et de plus en plus compétitif. Une aspiration gaullienne, à la mesure de la reprise en main de son destin par le peuple Britannique. « Global Britain » est à la fois un projet défensif et conquérant. Il répond au besoin de protection du peuple Britannique face à des menaces extérieures nombreuses et participe à la conquête du monde des sociétés démocratiques et du libre marché. Dans ce nouveau conflit entre deux systèmes politiques antagonistes, États démocratiques contre États autoritaires, le Royaume-Uni fait le choix d’un projet ambitieux pour réarmer son modèle de société et rejoint les États-Unis dans la lutte face au modèle Chinois.

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Plutôt qu’une fermeture, Global Britain propose une vision positive et une aspiration à renouer avec un glorieux passé. Il est le pendant Britannique  du célèbre Make America Great Again américains et tente de réenchanter le rêve Britannique. Inspiré par une vision Churchillienne, Johnson mobilise la nation, ravive le souvenir d’un Commonwealth puissant et uni sous l’Union Jack afin de pousser à l’action des citoyens qui ont désormais leur destin en mains. Ainsi, l’influence du Royaume-Uni ne doit pas se restreindre aux frontières de la Grande-Bretagne mais bien s’affirmer « en mer, sur terre et dans les airs ». Il s’agit pour Boris Johnson de libérer le potentiel du Royaume pour lui permettre un retour au premier plan sur l’échiquier mondial.

Les clés du succès

Pourtant, l’ère victorienne n’est plus et le Royaume-Uni ne peut plus se rêver en puissance hégémonique. Dans cette nouvelle ère, où la citoyenneté Britannique s’ouvre aux résidents hongkongais et où le Brexit ferme la porte aux Européens, le Royaume-Uni a choisi les leviers de sa puissance. Les ambitions affichées sont de faire du Royaume une superpuissance scientifique et technologique, incitant à la collaboration étroite avec les universités et entreprises, notamment le long du red wall. Ne pouvant compter sur le nombre, le Royaume-Uni compte sur la qualité pour faire des sciences et de la technologie un avantage comparatif. Dans un monde en mutation permanente, c’est sa capacité à innover rapidement qui doit garantir la souveraineté du Royaume. Pour cela il dispose sur son sol d’université parmi les plus réputées au monde, lui permettant ainsi d’attirer aussi les meilleurs talents.

Pour partir à la conquête du monde, le Royaume-Uni dispose avec le Commonwealth d’un atout important et de partenaires sur tous les continents. Afin d’amplifier l’attractivité du Royaume, Boris Johnson souhaite tirer à  son avantage la promesse d’une Singapour-sur-Tamise, une zone franche aux portes de l’Union Européenne. Ainsi, huit freeports sur le modèle Thatchérien s’apprêtent à voir le jour, notamment à proximité des ports de fret côtiers de Liverpool, Southampton et Londres. De même, le chancelier de l’Échiquier est quant à lui chargé de mettre en place d’une politique d’allègements fiscaux ambitieuse, afin d’attirer les capitaux internationaux.

Gouverner c’est choisir, disait François Mitterrand et Boris Johnson choisit l’Asie. « Global Britain » est probablement le projet Britannique le plus ambitieux depuis la seconde guerre mondiale. Il doit parvenir à faire rayonner le Royaume-Uni sur l’emsemble du globe alors que pour la première fois de l’ère moderne le barycentre du monde ne se trouve plus en Occident mais en Asie. Avec Boris Johnson, le peuple britannique exprime le souhait de renouer avec le cours de son Histoire, et la défense de ses eternal and perpetual interests, selon la formule de Lord Palmerston.

Emeric Guisset , Secrétaire Général Adjoint du Millénaire, thinktank spécialisé en politiques publiques, Gaulliste et réformateur

Florian Le Cron, analyste du Millénaire

Théophile Braud, analyste du Millénaire

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