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Gilets jaunes : ce plan de sortie de crise concocté par les militants de la réappropriation citoyenne de la politique
©JEAN-PIERRE CLATOT / AFP

Participatif

Le mouvement des Gilets jaunes est le symptôme d’une crise sociale et écologique mais surtout d’une crise démocratique profonde, selon le collectif Démocratie ouverte, qui propose un scénario de sortie de crise.

Jean Massiet

Jean Massiet

Jean Massiet est le fondateur de la chaîne youtube Accropolis, qui décrypte l'actualité politique française.

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Atlantico : Face à la crise des Gilets jaunes, l’association Démocratie Ouverte, collectif d’acteurs de l’innovation démocratique en France, se mobilise pour proposer une méthode de co-construction qui permettra in fine d'adopter une réforme de la Constitution. En quoi consiste ce plan de sortie démocratique de la crise que vous proposez ?

Jean Massiet : C'est un scénario proposé collectivement aux institutions et aux Gilets jaunes. Nous sommes un collectif nommé Démocratie Ouverte qui rassemble plusieurs dizaines d'innovateurs démocratiques : des projets, des start-ups, des associations, qui travaillent sur le thème de la démocratie participative pour redonner la parole aux citoyens. Suite à la crise des Gilets jaunes et à la demande démocratique portée par ce mouvement, nous avons décidé de répondre à l'Élysée qui voulait avoir des éléments de proposition. Nous avons élaboré une idée de scénario qui permet de sortie de la crise démocratiquement. Le but est d'être une note politique, pas un communiqué de presse ou un billet, mais une note opérationnelle avec quatre étapes en six mois.

Tout d'abord une annonce par le président de la République d'un grand chantier de réforme de la démocratie. Il faut porter un choix politique très fort, qui intègre tout le pays. Le président de la République propose en janvier une réforme de la constitution et surtout l'annonce d'un processus démocratique qui va permettre cette nouvelle constitution. En même temps il nomme des garants du processus, de sa transparence. Ils peuvent être issus des institutions qui existent déjà mais aussi du débat public, du groupe de recherche sur la démocratie, de l'association Démocratie Ouverte… Il faut mettre beaucoup de monde autour de la table afin de se constituer en grands garants. Enfin, un grand événement de lancement à l'Élysée de ce processus, des événements dans les préfectures ou dans les ministères. Ce sera le démarrage de la machine.

Deux mois plus tard, l'étape suivante est la consultation des citoyens. Elle passe par trois choses : une plateforme numérique qui propose aux citoyens de penser une réforme constitutionnelle avec des amendements, des propositions, une méthodologie déjà proposée par le passé. Il faut également des réunions physiques dans les territoires avec des technologies semblables. Les corps intermédiaires doivent avoir une importance au niveau social, économique et environnemental dans l'élaboration de cette constitution.

La troisième étape consiste en la nomination d'une chambre citoyenne tirée en partie en sort. Il existe un débat autour du tirage au sort mais il est important de nommer au minimum une centaine de personnes qui seraient des Gilets jaunes, des citoyens tirés au sort - mais aussi des élus non tirés au sort des députés ou des sénateurs. Cela fonctionnerait sur le même principe qu'une chambre parlementaire qui ferait des amendements, des propositions à partir desquelles ils débattraient. L'ensemble de ces travaux serait entièrement transparent et diffusé en direct sur internet. L'Assemblée auditionnerait des experts, des constitutionnalistes, des juristes, toute personne qu'elle estimerait devoir écouter. Elle travaillerait en lien avec la plateforme numérique. Pendant que l'Assemblée travaille, les citoyens pourraient participer afin d'éviter de fonctionner en vase-clos.

La quatrième étape en juin 2019 serait un référendum organisé par le pouvoir public : "Pour ou contre cette nouvelle constitution issue de cette Assemblée et de cette plateforme ?". C'est similaire à ce que l'on a déjà vu en Tunisie après le Printemps arabe ou en Islande. C'est un scénario qui permet en 6 mois de rapprocher la population et surtout de ne pas opposer les citoyens aux institutions. On ne fait pas table-rase, on propose un processus qui associe les institutions et les Citoyens.

Dans cette logique, en quoi cela permettrait-il de réimpliquer les citoyens dans le processus démocratique ? Ne serait-ce pas considéré comme un énième gadget ?

Ce que je vais dire est paradoxal mais en même temps évident : on ne peut pas imaginer réformer la participation des citoyens sans faire participer les citoyens directement dans la réflexion de ce processus. Il n'est pas question que l'on refasse "à l'ancienne" un petit groupe de travail avec des experts qui se réunissent pendant trois mois et qui proposent un rapport. Ça n'est plus pensable, les Gilets jaunes l'ont montré, ils ont l'envie de participer et de proposer. Ils mettent en avant des initiatives citoyennes, ils proposent le vote blanc. C'est intéressant, il faut juste le mettre en débat.

Le but est de se baser sur les initiatives des citoyens. Un gadget est justement le meilleur moyen de ne pas les associer à cette idée. On l'a remarqué, lorsqu'une réunion publique ne sert à rien, les citoyens ne viennent pas. Soit l'on fait les choses avec eux dès le début soit ça n'est pas la peine de faire quoi que ce soit.

En quoi ces propositions s'inspirent-ils et se rapprochent-ils des Gilets jaunes ?

Une des premières revendications des Gilets jaunes, il y a un mois, était la création d'une Assemblée citoyenne tirée au sort. C'était évidemment mal défini mais cette volonté existait et c'est ce que l'on reprend. De plus en plus les Gilets jaunes sont en train de se diriger vers la revendication d'un référendum d'initiative citoyenne et c'est exactement ce que l'on propose.

Faire un référendum dans les six mois permettra d'associer les citoyens dans la construction du projet. L'idée n'est plus de se prononcer sur quelque chose élaboré dans un bureau mais construit par tous les citoyens. Les réunions dans les territoires dont je parlais s'intègrent également dedans. Tous les Gilets jaunes ne sont pas sur les réseaux sociaux même si le mouvement s'est entièrement bâti sur Facebook. Il faut organiser des réunions publiques sur les territoires pour que les citoyens puissent aussi aller simplement dans leur mairie. C'est semblable aux cahiers de doléance mis en place par plusieurs maires. On reprend le même principe : aller voir le maire, aller déposer ses doléances, allez proposer ses projets. Cela correspond parfaitement à la philosophie des Gilets jaunes.

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