Flirt Borloo-Bayrou : un rapprochement porteur d’une potentielle résurrection d’un centre qui compte<!-- --> | Atlantico.fr
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Borloo a opté pour une position plus classique de centre-droit potentiellement allié d’une droite classique alors que Bayrou a tenté une aventure davantage autonomiste qui a eu un certain succès en 2007.
Borloo a opté pour une position plus classique de centre-droit potentiellement allié d’une droite classique alors que Bayrou a tenté une aventure davantage autonomiste qui a eu un certain succès en 2007.
©Reuters

Union du centre

Après une série de mains tendues, François Bayrou et Jean-Louis Borloo ont déjeuné ensemble la semaine dernière. Un rapprochement important à un an des élections européennes.

Alexis Massart

Alexis Massart

Alexis Massart  est directeur d'Espol, école européenne de sciences politiques et sociales de l'Université catholique de Lille.

 

 

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Atlantico : Francois Bayrou et Jean-Louis Borloo ont « officiellement » déjeuné ensemble jeudi dernier après une série de mains tendues réciproques, laissant ainsi imaginer une réunion de « la famille centriste ». Le Modem et l’UDI appartiennent-ils réellement à une même famille idéologique ?

Alexis Massart : La proximité idéologique entre les deux ne fait absolument aucun doute. Si aujourd’hui Jean-Louis Borloo, ancien porte-parole de François Bayrou lors de la présidentielle de 2002, et François Bayrou ne sont plus dans la même formation politique, c’est avant tout à partir d’une lecture stratégique différente. L’un, Borloo, a opté pour une position plus classique de centre-droit potentiellement allié d’une droite classique alors que l’autre, Bayrou, a tenté une aventure davantage autonomiste qui a eu un certain succès en 2007. Par contre, une investigation sur le fond ne laisse apparaître que peu de différences. Qu’il s’agisse de l’Europe, de la décentralisation, d’une approche sociale-libérale de l’économie…. Il n’y a pas réellement de différence majeure entre les deux.

Ce rapprochement est-il, comme certains observateurs l’ont déjà dit, la tentative désespérée de deux mouvements politiques qui peinent à attirer ?

Il n’y a pas de désespoir dans cette démarche. L’UDI, qui existe depuis une année maintenant, a réussi en peu de temps, et en dehors d’une période électorale, à faire réapparaître ce qu’était l’UDF il a quelques temps. 70 parlementaires, des maires de grandes villes, des responsables d’exécutifs locaux, de nombreux élus locaux ont déjà rejoint l’UDI. Du coté du Modem la situation est un peu différente. Autant l’UDI est en phase de croissance, autant le Modem vit une situation difficile liée à l’extrême présidentialisation de son leader. L’échec de François Bayrou en 2012 a mis les cadres de son parti dans une position assez délicate pour les prochaines échéances locales. Beaucoup d’entre-eux, en conformité avec le dialogue Modem-PS de 2007, ont conclu des alliances avec la gauche lors des élections de municipales de 2008. La chute de Bayrou en 2012 les met dans une situation difficile pour les élections de l’an prochain. Le rapport de force sur lequel ils avaient conclu ces alliances il y a 5 ans n’existe plus aujourd’hui…. Le rapprochement UDI – Modem est donc davantage un lien qui pourrait se recréer, dans une idéologie clairement partagée, au sein d’une fratrie provisoirement divisée par une divergence de vue.

Jean-Louis Borloo considère que Francois Bayrou, et son parti avec lui, est « entré dans l’opposition ». Cependant, ce dernier n’a jamais choisi le camp de l’UMP dont l’UDI est pourtant très proche. Cette alliance pourrait-elle supporter ce clivage au-delà des Européennes de 2014 ?

François Bayrou est effectivement de plus en plus critique à l’égard du gouvernement, notamment face à une pression fiscale qui ne cesse de croître. Les opportunités de rapprochement entre le Modem et la majorité actuelle sont donc de plus en plus improbables. Ceci étant, le dialogue UDI – Modem ne peut avancer qu’avec une clarification des liens UDI – UMP. A ce stade Jean-Louis Borloo est relativement clair. Autant il affirme un positionnement historiquement inspiré de celui de l’UDF dans les années 80-90 dans une logique de rapprochement Droite – Centre Droit, autant il reste très ferme sur les questions de droitisation de l’UMP. Le rejet, par l’UDI, de certaines des positions de l’UMP donne une crédibilité plus forte à son autonomie dans l’espace politique qui par voie de conséquence vient conforter les possibilités de dialogue avec le Modem.

Si cette alliance venait à se concrétiser, quelle forme pourrait-elle prendre ? Peut-on imaginer que le Modem entre dans l’ « Union » ? La coexistence de deux fortes personnalités peut-elle poser un problème de représentation ?

La question structurelle n’a à ce stade que peu d’importance. Ce qui est essentiel est le choix stratégique que feront les deux leaders centristes dans leur rapprochement potentiel. Cette question, qui peut entraîner une restructuration de l’échiquier politique français est à traiter de manière assez urgente car les échéances locales et européennes, historiquement favorables à la famille centriste, peuvent permettre une forte croissance de cette famille politique réunifiée.

Une fois alliés, les deux grands centres français pourraient-ils constituer une potentielle force dirigeante crédible sans alliances ?

Le fait d’être majoritaire est un véritable confort pour une formation politique mais l’essentiel est avant tout d’être en position majoritaire au sein d’une coalition. S’il est peu probable que le centre devienne à lui seul majoritaire, il n’est pas totalement impossible qu’il atteigne un poids politique tel qu’il puisse être en position de force pour pouvoir gouverner. Michel Rocard, comme par hasard figure « centriste » du PS a su gouverner sans majorité absolue de 1988 à 1991, Jean-Louis Borloo pourrait très bien arriver dans l’avenir. Le rapprochement UDI – Modem pourrait être une première étape pour une telle configuration politique. Entre un PS de plus en plus impopulaire et une UMP davantage droitisée que ne l’imaginait son pacte fondateur, le Centre reste un rempart face à la montée en puissance du couple Le Pen – Mélenchon.

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