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Fini la Somalie : le haut lieu de la piraterie maritime mondiale se trouve désormais au large de....
©DR

Captain Hook

Le problème en Somalie est à peu près réglé. Mais dans le golfe de Guinée, la situation empire. Le Nigéria et ses abondantes réserves de pétroles sont en danger. Mais les pays du golfe de Guinée essayent de combattre le problème.

On a beaucoup entendu parler de la piraterie au large de la Somalie. Mais si ce problème est aujourd'hui à peu près réglé, la piraterie commence à exploser dans le golfe de Guinée. Dans un article d’Ozy, Laura Secorun raconte sa rencontre avec Philip Belcher, président de l’Association internationale des propriétaires de tanker indépendants, qui représente une quarantaine de pays. Celui-ci annonce, catastrophé, que la piraterie a quitté le large de la Somalie pour s’installer dans le golfe de Guinée. Depuis une dizaine d’années en effet, les eaux territoriales du Nigéria – le pays le plus riche et le plus peuplé d’Afrique – sont le théâtre d’une activité pirate croissante. En 2013, un rapport publié par trois organisations concernées annonçait que le nombre des attaques à l’Ouest de l’Afrique avait dépassé celui des attaques à l’Est de l’Afrique. Enfin, l’année dernière, 49 bateaux ont été abordés et 37 équipages kidnappés au large du Nigéria, contre une seule attaque dans le golfe d’Aden, qui n’a pas fait d’otages.

En Afrique de l’Est, la menace a fait l’objet d’une décennie d’efforts internationaux. En effet, la Somalie était brisée par des années de guerre civile, et la conjonction de la surpêche et de l’insuffisance policière avait fait de ce pays le paradis des pirates. Près de 500 navires y ont été attaqués depuis 2005. Les patrouilles internationales et l’armement des garde-côtes ont alors permis une pacification progressive de la région. C’est donc ailleurs, sur une autre route commerciale très empruntée, que la piraterie s’est déplacée.

Huit pays sont bordés par le golfe de Guinée. D’après un rapport des Nations Unies, la piraterie coûte à ces huit pays une somme totale de 2 milliards de dollars par an. De plus, le Nigéria fait face à des vols astronomiques de pétrole brut, dont son sous-sol est très riche : selon le contre-amiral Charles Obiora-Medani, quoique la quantité de pétrole volée ait été ramenée de deux millions de barils par mois début 2015 à seulement 800 000 barils par mois fin 2015, la perte s’estime à 2,2 milliards de dollars sur l’année.

Or, le pays est en plein boom économique ; le secteur du pétrole est un des plus porteurs de l’économie nigériane, qu’il est le premier à exporter. De manière générale, la piraterie affecte durablement la santé économique du pays. Par conséquent, les entreprises ayant recours au transport maritime sont crucifiées par une hausse des prix généralisés, tous liés à la piraterie. D’abord, le montant des cotisations auprès des assurances crève le plafond ; et l’inquiétude conduit à une pression à la hausse sur les salaires. « L’idée seule cause une anxiété terrible chez les marins » déclare Tom Holmer, manager du Programme d’action humanitaire pour combattre la piraterie, cité par Ozy. Fait marquant, le programme est quasi intégralement financé par l’industrie des transports sur les océans, et il œuvre en étroite collaboration avec les Nations Unies.

La menace est d’autant plus importante que les réseaux qui sévissent en Afrique de l’Ouest sont d’envergure internationale, capables de fournir des armes automatiques à tous leurs membres. Autre fait distinctif, le chargement du bateau a une valeur bien supérieure à l’équipage. En effet, le montant des rançons est généralement faible ; mais cela ne garantit rien aux marins, qui ont été, dans plus de 40% des cas, utilisés comme boucliers humains.

Les autorités régionales ne sont pas passives. En avril 2015, elles ont mis au point le Centre africain pour le respect de la loi et de l’ordre en mer (CEMLAWS), chargé de coordonner les efforts. A sa tête, le Commander ghanéen Kamal-Deen Ali, dont le grade équivaut celui de capitaine de frégate. Une de ses missions consiste à mettre en place des lieux d’ancrage sûrs, protégés par de nouveaux navires achetés pour l’occasion. En échange, les entreprises doivent offrir une formation rigoureuse à leur équipage ; les bateaux doivent être protégés par du fil barbelé, des lances à eau, etc. Nouveauté très onéreuse : ils possèdent également une « citadelle », sorte de panic room capable d’accueillir tout l’équipage en cas d’attaque. Ces actions conjuguées ont permis la diminution du nombre d’attaques en 2015, de l’ordre de 29% par rapport à l’année précédente.

Cependant, Laura Secorum affirme que, de l’avis des spécialistes, la piraterie se développe dans la région précisément grâce au contexte politique, instable et corrompu. Quoique le Ghana semble affermi, et que le Nigéria ait récemment tenu son élection la plus paisible, ce dernier et la République du Congo font partie des pays les plus corrompus (respectivement classés 136e et 154e par l’ONG Transparency International).

De plus, malgré les capacités de coordination des pays du golfe de Guinée, ils ne sont pas en mesure d’éradiquer la piraterie sans l’aide occidentale, comme cela s’était fait pour la corne de l’Afrique, que l’Europe avait désigné comme un de ses intérêts stratégiques. A titre personnel, la France s’est prononcé à plusieurs reprises en faveur de l’armement des équipages menacés (ce qui équivaut à une milice privée). L’Union européenne a implicitement adopté la même position. Mais les abordages de tankers en Afrique de l’Est se faisaient dans les eaux internationales. De l’autre côté du continent, ils se produisent généralement dans les eaux territoriales nigérianes, où les milices privées sont interdites : tout n’est pas joué

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