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Faut-il croire aux orgasmes cérébraux provoqués par internet ?
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A ne pas lire au bureau

Le phénomène de l'orgasme cérébral se répand sur la toile. Aussi incongrue soit-elle, la technique consistant à regarder une vidéo mettant en scène une personne qui murmure ou qui effectue un geste répétitif fait de plus en plus d'émules.

Sylvain Mimoun

Sylvain Mimoun

Sylvain Mimoun est gynécologue, andrologue, psychosomaticien. Il est directeur du Centre d'andrologie de l'hôpital Cochin à Paris; Il est également chroniqueur radio et TV, notamment au Journal de la santé (France 5) où il tient la rubrique "Questions sexo".

Il est l'auteur de "La masturbation rend sourd : 300 idées reçues sur la sexualité " aux éditions First.

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Atlantico : Un phénomène est apparu récemment sur internet, celui des "whisperers" (les murmureurs) : en visionnant des vidéos dans lesquelles des personnes murmurent ou effectuent un geste répétitif tel que plier des serviettes (cliquer ici), ils atteindraient une extase proche de l’orgasme appelée "ASMR" (autonomous sensory meridian response, soit en français "réponse autonome sensorielle méridienne"). S’agit-il effectivement là d’un orgasme ?

Sylvain Mimoun : Cela crée une transe proche de l’état hypnotique, or certaines femmes parviennent à l’orgasme par ce biais, sans même qu’on les touche. L’hypnose passant par la tête, l’orgasme est uniquement cérébral. Cela est comparable aux personnes qui, dans leur sommeil, ont des orgasmes. A la différence près que le sommeil n’exclut pas les caresses : là, le contact corporel est nul.

L’orgasme cérébral serait donc surtout l’apanage des femmes ?

Chez les hommes, l’orgasme aboutit la plupart du temps à une éjaculation. Il leur faut donc être très bien entraîné pour parvenir à la transe cérébrale. Chez les femmes, il est beaucoup plus classique d’obtenir un orgasme de cette manière. L’hypnose peut être induite de différentes façons : par les mots qu’on emploie, la confusion, la régularité d’un rite… On rentre alors dans une transe un peu plus profonde, ce qui amène à ressentie de nouvelles choses. Le fait de plier ou déplier des serviettes de manière obsessionnelle, par exemple, peut permettre à la personne qui s’adonne à cette activité, ou qui la regarde, d’entrer dans un état second lui permettant de sortir de son état de conscience. En hypnose, on parle "d’état de conscience modifié".

Cet orgasme cérébral serait alors une forme de méditation ?

En effet, sauf que l’hypnose aussi constitue un état méditatif, d’une certaine façon. Dans les deux cas on se concentre sur soi-même, et c’est ainsi qu’on ressent avec plus d’intensité sa propre personne. Sauf que l’ASMR se rapproche tout de même plus de l’état d’orgasme.

Par quel processus psychique en arrive-t-on à jouir de manière exclusivement cérébrale ?

L’hypnose consiste à mettre le cerveau gauche, qui sert à rationaliser les choses, au repos. Ainsi mis en relaxation mentale, il laisse la possibilité au cerveau droit, qui est émotionnel, de s’exprimer.

Certaines vidéos enregistrent plusieurs millions de vues sur Youtube, des forums se créent : comment interpréter l'ampleur du phénomène sur la toile ?

La nouveauté de cette pratique sur le net peut expliquer ce succès, car il suscite la curiosité et l’amusement. Si cela perdure, alors on peut s’interroger. Je dirais que si tel est le cas, cela signifie que les gens s’ennuient, ne savent pas quoi faire d’eux-mêmes et ne jouissent pas tant que cela.

Le fait que les femmes soient majoritairement concernées par le phénomène est-il à mettre en relation avec les 76,8% de Françaises qui se déclarent en manque ou insatisfaites sexuellement (cliquer ici) ? Y trouvent-elles un palliatif ?

Les femmes sont généralement coincées entre deux choses : ce qu’elles souhaitent (elles sont très sensibles aux caresses) et la morale (qui rejette les caresses). De ce point de vue, l’orgasme cérébral est idéal : "rien dans les mains, rien dans les poches", tout vient de la tête. L’homme, dont la sexualité est spatiale et visuelle, y trouvera beaucoup plus difficilement son compte.

Ce qu’il faut comprendre, c’est que cette méthode n’est ni révolutionnaire, ni à jeter : l’essentiel est de se faire du bien et de savoir comment on fonctionne soi-même. Si on sait comment fonctionner, alors on ne peut que s’améliorer  dans la prise de plaisir. Si ces exercices cérébraux amènent un certain nombre d’éléments positifs pour la personne, autant que celle-ci les utilise, tout en évitant de se dire que c’est la seule bonne façon de se donner du plaisir. Cela devient alors une recette, indépendamment de la connaissance de soi.

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