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Euro : avec ou sans la BCE,
il n'y aura pas de solution miracle
sans la rigueur
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Potion (pas) magique

Mario Draghi, le président de la BCE a laissé entendre jeudi qu'il était prêt à prendre des mesures supplémentaires pour soutenir l'économie de la zone euro. Le rachat de la dette européenne par cette dernière ne saurait toutefois suffire...

Guillaume Lagane

Guillaume Lagane

Guillaume Lagane est spécialiste des questions de défense.

Il est également maître de conférences à Science-Po Paris. 

Il est l'auteur de Questions internationales en fiches (Ellipses, 2021 (quatrième édition)) et de Premiers pas en géopolitique (Ellipses, 2012). il est également l'auteur de Théories des relations internationales (Ellipses, février 2016). Il participe au blog Eurasia Prospective.

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Alors que la crise de l’euro ne cesse de s’aggraver, le débat porte aujourd’hui sur le rôle de la banque centrale européenne (BCE), l’institut qui gère la monnaie commune depuis sa création en 1999. Les Français veulent qu’elle rachète la dette des États européens, incapables de se financer à des taux raisonnables sur les marchés, tandis que les Allemands répugnent à cette perspective.

Une intervention massive de la BCE comme solution miracle ?

Le rachat massif des emprunts de l’Espagne, de l’Italie ou, demain, de la France pourrait dissuader les spéculateurs de s’attaquer à ces États. Dotée d’une puissance de feu considérable, puisqu’elle créée de la monnaie, la BCE deviendrait le prêteur en dernier ressort de la zone euro.

Depuis 2010, l’institution basée à Francfort a d’ailleurs lancé un programme, limité dans le temps, de rachat d’obligations d’États européens. L’idée actuelle serait d’aller beaucoup plus loin et de suivre l’exemple des États-Unis et du Royaume-Uni, où la Réserve fédérale (la Fed) et la Banque d’Angleterre détiennent aujourd’hui 17% des dettes américaines et britanniques.

Certes, de telles politiques ont des effets inflationnistes : en créant artificiellement de la monnaie pour prêter aux États, on augmente les prix. Au Royaume-Uni, les prix ont cru de 5 % en 2011 contre 2 % en France. Pour certains économistes, ce n’est pas un problème : l’inflation va favoriser la croissance… et réduire la valeur des dettes publiques.

La « planche à billets » ou le retour du spectre de l'inflation

L’augmentation des prix à la suite de politiques monétaires accommodantes (dites de « quantitative easing » en anglais) peut gravement perturber l’économie. L’utilisation de la « planche à billets », en augmentant les prix, réduit la valeur de l’argent. Bien sûr, on rembourse les créanciers en « monnaie de singe ». Mais c’est tout le système économique qui s’en trouve perturbé, et en premier lieu les salariés dont le pouvoir d’achat se réduit.

C’est la leçon de la stagflation (contraction des mots inflation et stagnation) des années 1970. Durant cette « décennie perdue », la France a conjugué forte inflation et croissance anémique. Et, quand la confiance dans la gestion de la monnaie n’existe plus, l’inflation peut s’emballer. Au début des années 1980, plusieurs pays d’Amérique latine (Argentine, Brésil) ont connu des augmentations de prix de plus de 50 % par mois. Les Allemands n’ont pas oublié que l’hyperinflation des années 1920 (les restaurants augmentaient leurs prix au cours du repas) avait miné la démocratie, et favorisé la montée du nazisme.

La réduction des dépenses publiques, seule solution viable à la crise de l'euro

Le recours à la BCE ne ferait que décaler les échéances. Les États européens vivent à crédit depuis le déclenchement du premier choc pétrolier (1973). La France n’a pas équilibré un seul de ses budgets depuis 1974. Cette année encore, malgré l’action du gouvernement, un tiers des dépenses de l’État (90 milliards sur presque 300) est financé par l’emprunt.

Compte tenu du niveau des prélèvements obligatoires en France (43%, contre 34 % en 1970), il n’est pas raisonnable de croire que de nouvelles recettes puissent être dégagées. Pour rassurer les marchés, c’est-à-dire les banques, c’est-à-dire au fond tous les citoyens dont l’épargne est investie dans des obligations du Trésor, il n’est guère d’autres voies qu’une sévère cure d’amaigrissement de l’État-providence (40 % de la dépense publique concerne la protection sociale), et une redéfinition de ses missions.

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