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Et Trump relança l'interventionnisme américain : mais au fait dans quels partis sont aujourd’hui les néoconservateurs français prêts à la suivre ?
©REUTERS/Kai Pfaffenbach

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Paradoxalement, le retour de l'interventionnisme américain pourrait satisfaire certains partis et personnalités qui ne portent pas le Président Trump dans leur cœur. En matière de politique internationale, les néoconservateurs français ne sont pas ceux qu'on croit !

Florent Parmentier

Florent Parmentier

Florent Parmentier est enseignant à Sciences Po et chercheur associé au Centre de géopolitique de HEC. Il a récemment publié La Moldavie à la croisée des mondes (avec Josette Durrieu) ainsi que Les chemins de l’Etat de droit, la voie étroite des pays entre Europe et Russie. Il est le créateur avec Cyrille Bret du blog Eurasia Prospective

Pour le suivre sur Twitter : @FlorentParmenti

 

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Atlantico : Les frappes surprises de l'armée américaine en Syrie dans la nuit du 7 avril ont marqué un revirement important dans la politique internationale de Trump. Mais comment le monde politique français accueille-t-il ce changement de cap ?

Florent ParmentierEn effet, les frappes américaines marquent un changement notable dans l'action internationale de Donald Trump. Il faut remarquer que le président américain avait fait part, dans le cadre de sa campagne,  de sa volonté de ne pas poursuivre les politiques  jugées aventuriste de ses prédécesseurs, et particulièrement celles menées par Hillary Clinton. L'idée de « rendre la puissance à l'Amérique » (Make America Great Again), selon le slogan du président, passait par un encouragement aux idées d'inspiration isolationniste. Ce qui lui a d’ailleurs valu, dans un premier temps, une certaine popularité en Russie. 

De ce point de vue, il est donc vrai que les frappes américaines ont véritablement constitué une surprise pour les observateurs internationaux. Le Président américain montre ainsi que les États-Unis sont capables de prendre une initiative au sujet d'un pays dont la Russie a montré  qu’elle était directement concernée. Cette action montre que les spéculations autour d'un alignement de la politique de Donald Trump sur celle de Vladimir Poutine étaient sans doute prématurées, compte tenu de la résistance de l'appareil d'État américain aux nouvelles orientations voulues à Donald Trump. 

Alors que Vladimir Poutine apparaît aujourd'hui presque comme le véritable « 12e homme » de la campagne présidentielle française, l'intervention américaine prend le monde politique français de revers. Les plus atlantistes ont jusqu’à présent rejeté de manière véhémente la personnalité même de Donald Trump et ce qu'il représente. Dans le même temps, les partisans d'un éloignement de l'Union européenne ont souligné le caractère volontiers populiste de l’ancien candidat républicain. 

 Aujourd'hui, qui en France est tenté de s'aligner sur les positions néoconservatrices américaines en terme d'interventionnisme ? Pour quelles raisons ? Et existe-t-il des candidats "néocons" dans cette campagne présidentielle ?

Brièvement, on peut définir le néoconservatisme comme une doctrine d'intervention dont le but consiste à opérer des changements de régime dans des pays considérés comme hostiles aux intérêts américains. Cette idéologie s'est développée pendant la guerre froide, naissant de la critique de la politique de détente, et a connu un regain d'intérêt après la Guerre froide dans le moment unipolaire américain. Il faut aussi constater que le néoconservatisme ne se limite pas à une frange du parti républicain lisant le Weekly Standard de Rupert Murdoch, puisqu’il compte également de nombreux partisans parmi les rangs démocrates. 

A l'extérieur des Etats-Unis, c'est moins la primauté américaine qui est défendue que l'idée selon laquelle les valeurs occidentales sont supérieures à toute autre forme de valeurs, et doivent primer sur toute autre considération. Il faut toutefois noter que l'application de ces valeurs peut tout à fait s'avérer n'être qu'une politique à géométrie variable en fonction des intérêts américains. La politique américaine au Moyen-Orient  n'en n'est que l'exemple le plus  fameux. Ce courant néoconservateur  s'appuie en France sur des inconditionnels l'atlantisme ainsi que sur des vétérans et des héritiers des luttes antitotalitaires et des mouvements des droits de l’Homme des années 1970. 

On peut donc avancer qu’en France le néoconservatisme peut se caractériser par une volonté de renverser le régime syrien de Bachar el-Assad, en espérant le voir remplacer par des partisans d'une transition démocratique dans le pays. De ce point de vue,  certains candidats semblent en phase avec les conclusions proposées par les néoconservateurs : Emmanuel Macron appele à des représailles contre le régime d'Assad, tandis que Benoît Hamon a rendu directement responsable Bachar el-Assad des frappes américaines qui font suite à la question de l'attaque chimique. Le néoconservatisme s’exprime également chez une partie des partisans des Républicains, mais François Fillon s’en trouve aujourd’hui éloigné. 

A l'opposée, dans quelle position se trouvent ceux qui regardaient de plus en plus vers Poutine après cette intervention qui marque la fin d'une période d'apaisement américano-russe ?

Par contraste à ces partisans d’une intervention française aux côtés des États-Unis, position portée par une partie du Quai d'Orsay, d'autres candidats à la présidentielle se montrent volontiers  plus critiques vis-à-vis de l'intervention américaine. François Fillon souhaite par exemple rappeler qu'il convient de ménager les intérêts de la Russie et de l'Iran dans la région. Marine Le Pen, fervent soutien de Donald Trump et de Vladimir Poutine, se trouve aujourd'hui prise en porte-à-faux. En effet, comment se fait-il que Donald Trump, qui ne souhaitait pas faire des Etats-unis le gendarme  du monde, puisse se retrouver aujourd'hui à la tête d'une armée belligérante en  Syrie ? Quant à Jean-Luc Mélenchon, il critique l'attitude suiviste de François Hollande et d’Angela Merkel vis-à-vis de l’incursion américaine dans le conflit. Pour leur part enfin, le candidat souverainiste Nicolas Dupont-Aignan dit souhaiter attendre la preuve de l'implication réelle de Bachar el-Assad dans l’utilisation des armes chimiques, tandis que Nathalie Arthaud condamne l'opération impérialiste des États-Unis. 

Toutefois, de même qu’il était prématuré de considérer que le rapprochement russo-américain était inéluctable, on peut tout aussi bien affirmer aujourd'hui que leur éloignement n'est pas nécessairement durable et définitif. En effet, la Russie a pu elle-même trouver dans Bachar el-Assad un partenaire important, mais parfois difficilement contrôlable. Et rien ne dit, en outre, que la montée des tensions à laquelle nous risquons d'assister ne viendra pas se conclure par un accord sur des domaines relativement consensuels et néanmoins importants comme celui du désarmement nucléaire. 

On le voit donc, ces frappes américaines en Syrie font l'objet de controverses importantes parmi les candidats, plus encore peut-être que parmi la presse. 

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