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Entre le feu et les canicules à répétition : voilà à quoi pourrait ressembler la végétation du sud de l’Europe dans les prochaines années
©OLIVIER LABAN-MATTEI / AFP

Phénomène

Depuis le 05 aout, l'Espagne et le Portugal subissent d'importants incendies qui ravagent la végétation rendue sèche par la canicule.

Thierry  Gauquelin

Thierry Gauquelin

Thierry Gauquelin est professeur à Aix Marseille Université et chercheur à l’Institut Méditerranéen de Biodiversité et d’Ecologie marine et continentale (IMBE)

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Atlantico : Quelles conséquences les canicules à répétition et le réchauffement climatique, peuvent-ils avoir sur la végétation ? 

Thierry Gauquelin : Les épisodes de canicules, qui vont très probablement devenir (et deviennent déjà) plus fréquents avec le changement climatique, et plus généralement les fortes températures, assèchent la végétation - et ce, d’autant plus qu’ils s’accompagnent d’épisodes de sécheresse estivale comme les modèles le prévoient par exemple pour le bassin méditerranéen. La végétation est ainsi rendue plus inflammable et donc plus sensible aux incendies naturels ou provoqués par l’homme. Ces canicules peuvent aussi entrainer un dépérissement voire une mortalité d’un certain nombre d’arbres dans les peuplements. Mais il ne faut pas mésestimer pour ces tragiques incendies d’Espagne ou du Portugal de l’été dernier et de cette année le fait qu’ils ont concerné pour beaucoup des plantations monospécifiques de pins ou d’Eucalyptus, hautement inflammables, « cultivés » pour la pâte à papier !

A quoi pourrait ressembler la végétation du sud de l’Europe dans les prochaines années ?

A court terme, dans les prochaines années, les forêts, qui, on le rappelle, sont, au Sud de l’Europe, en plein développement du fait de la déprise agricole et pastorale, devraient à première vue garder un aspect similaire avec les mêmes espèces dominantes, même si la mortalité des arbres pourra être plus importante. Moins visible, ce sont sans doute les relations qui existent entre tous les organismes, végétaux, animaux, microorganismes qui sont rapidement modifiées par le changement climatique et qui peuvent influer sur les cycles de matière et d’énergie qui sont à la base du fonctionnement de ces écosystèmes et de leur productivité. C’est aussi la durée de la saison de végétation qui pourra aussi être modifiée et rallongée dans certains cas.

A plus long terme, à l’horizon 2080 ou 2100, les paysages seront sans doute modifiés. L’un des moyens pour les organismes de réagir au changement climatique est de se déplacer, de migrer pour trouver des conditions plus propices et moins difficiles. Les arbres présents au Sud de l’Europe tel que le Chêne vert, voir le Pin d’Alep, pourront ainsi progressivement gagner plus au Nord… mais la migration des arbres se fait très lentement au fil des nouvelles générations…et dans tous les cas plus lentement que celle des insectes par exemple.

Il faut aussi évoquer la question cruciale des espèces exotiques envahissantes dont la première cause de propagation n’est pas le changement climatique mais l’intensification des échanges transcontinentaux, même si leur propagation peut être favorisée par le changement climatique. Ceci constitue un défi considérable tant en ce qui concerne la biodiversité que les enjeux socio-économiques.

Comment gérer les modifications que génère le changement climatique ? Peut-on-protéger notre végétation ou va-t-elle s'adapter d'elle-même (mutation par exemple) ?

On sous-estime certainement la capacité importante d’adaptation des essences forestières, liée notamment à la diversité génétique des individus qui constituent une population. Si cette diversité existe – et c’est le cas dans les forêts qui n’ont pas été plantés artificiellement – il faut faire confiance à la capacité de la nature à s’adapter et dans tous les cas ne pas craindre des changements, changements qui se produisent dans les milieux naturels au gré de l’évolution des climats depuis des millénaires (à une vitesse moindre certes !). Mais on peut aussi accompagner dans certains cas cette évolution climatique en anticipant et en faisant appel à ce que l’on appelle la migration assistée, c’est-à-dire par exemple planter en région méditerranéenne française des chênes provenant d’Andalousie ou planter dans les Vosges des sapins provenant de populations pyrénéennes mieux « adaptées » à la sécheresse. Mais la question est largement débattue ! Est-ce raisonnable de planter en France des Cèdres de l’Atlas, sous prétexte qu’il résiste particulièrement bien à la sécheresse, alors même que c’est une espèce que l’on peut qualifier d’exotique et qui, de plus, peut se développer au dépend de la végétation autochtone.

Concernant les incendies, la prévention reste au cœur des dispositifs, avec l’utilisation d’essences moins inflammables et la préconisation de forêts mélangées.

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