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Des chercheurs de l’Université du Colorado, à Boulder, soutiennent que cette sagesse proverbiale est fausse, basée sur les résultats de leur étude de septembre, publiée dans la revue Nature Human Behavior.
Des chercheurs de l’Université du Colorado, à Boulder, soutiennent que cette sagesse proverbiale est fausse, basée sur les résultats de leur étude de septembre, publiée dans la revue Nature Human Behavior.
©Ludovic MARIN / AFP

Tendance à la ressemblance

Des chercheurs de l’Université du Colorado, à Boulder, soutiennent que cette sagesse proverbiale est fausse, basée sur les résultats de leur étude de septembre, publiée dans la revue Nature Human Behavior.

Gérard  Neyrand

Gérard Neyrand

Gérard Neyrand est sociologue, est professeur à l’université de Toulouse), directeur du Centre interdisciplinaire méditerranéen d’études et recherches en sciences sociales (CIMERSS, laboratoire associatif) à Bouc-Bel-Air. 

Il a publié de nombreux ouvrages dont Corps sexué de l’enfant et normes sociales. La normativité corporelle en société néolibérale  (avec  Sahra Mekboul, érès, 2014) et, Père, mère, des fonctions incertaines. Les parents changent, les normes restent ?  (avec Michel Tort et Marie-Dominique Wilpert, érès, 2013).
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Atlantico : Nous avons tous entendu la sagesse populaire commune que lorsqu’il s’agit de former des partenariats romantiques, les contraires attirent. Des chercheurs de l’Université du Colorado, à Boulder, soutiennent que cette sagesse proverbiale est largement fausse, basée sur les résultats de leur étude de septembre, publiée dans la revue Nature Human Behavior. Cette étude montre que le niveau d'éducation et la consommation de substances psychoactives sont les caractéristiques les plus fréquemment partagées par les couples. L’adage selon lequel les opposés s’attirent est-il biaisé ? 

Gérard Neyrand : On a effectivement une tendance sans doute dominante à l'homogamie, c'est-à-dire à ce que des personnes qui se ressemblent se mettent en couple, notamment du point de vue du niveau socioculturel et des études, même s'il faut faire attention aux comparaisons entre les pays anglo-saxons et notamment américain et la France, qui sont des contextes culturels très différents. Ce qui peut être valable aux États-Unis n'est pas forcément valable en France.  

Comme le dit l'étude, d'autres critères de l'homogamie sont possibles, dont la consommation de substances psychoactives. Et effectivement, on constate que les consommateurs de substances, quelles quelles soient, qui peuvent aller de l'alcool à la cigarette jusqu'à des drogues plus ou moins illicites, sont plus fréquemment en couple ; que leur consommation soit préalable à leur mise en couple ou qu'ils se soient mis à consommer ensemble alors qu'ils étaient déjà en couple. Il y a tout un ensemble de facteurs qui font qu'aujourd'hui la constitution des couples se fait plus facilement, à partir de facteurs de ressemblance qui ne sont pas forcément des facteurs socio-culturels, mais qui sont des facteurs qui peuvent être une même pratique, comme la randonnée, ça donne une occasion de se rencontrer et éventuellement de de se mettre en couple sur la base de cette pratique. Donc ça peut être des loisirs, ça peut être des formes d'orientation sexuelle, ça peut être des choses très différentes.

Il y a effectivement dans nos sociétés qui se sont énormément complexifiées, la possibilité de trouver un point commun avec des partenaires, qui ne renvoie pas seulement au milieu social, que ce soit la profession ou le niveau d'étude, mais qui diversifie beaucoup plus les possibilités de proximité. Ce qui va de pair avec le deuxième facteur que je voulais évoquer tout à l'heure concernant le contexte français, mais aussi mondial ou mondialisé, c'est l'ouverture des possibles par Internet notamment par les réseaux sociaux et la possibilité de se rencontrer sur Internet. La multiplication des sites de rencontres a ouvert quand même considérablement les possibilités de rencontres, y compris avec des personnes avec lesquelles on a une différence sensible. C'est intéressant de voir qu'avec le développement des rencontres sur Internet deux logiques ou deux mouvements coexistent tout en étant divergents.

C'est-à-dire ? 

En fait, un premier mouvement est une diversification des rencontres possibles, lié au fait qu'internet permet d'ouvrir des rencontres avec des personnes qu'ordinairement on a peu de chances de rencontrer dans la vie quotidienne. Là, l'ouverture peut être maximale. Mais, dans un deuxième temps, avec la constitution de sites qui sont des niches, c'est-à-dire qui spécifient le type de rencontre selon un critère particulier qui peut être une appartenance politique, une appartenance religieuse, une pratique de loisir,même une pratique alimentaire… De fait, il peut y avoir énormément de critères à partir desquels se constituent des sites de rencontre. Là, au contraire, on a eu des tendances à une homogamie partielle, c'est-à-dire de personnes qui se rencontrent sur la base d'une ressemblance particulière. 

Les différents facteurs évoqués sont-ils les mêmes qu'il y a plusieurs dizaines d'années ? Comment cela a-t-il évolué ?

Aujourd'hui, le positionnement des individus est beaucoup plus centré sur eux-mêmes et on demande au conjoint d'être un facteur de réalisation personnelle et d'épanouissement personnel. Il y a un niveau d'attente à l'égard du conjoint plus élevé qu'autrefois, et, bien sûr, plus le niveau d'attente est élevé, plus il est difficile de le satisfaire, ce d'autant plus qu'il est réciproque. Donc, ça favorise les séparations conjugales, c'est-à-dire qu'on va être amené à rechercher ailleurs ce qu'on ne pense pas trouver dans la personne avec laquelle on est.

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