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La dissolution de l’Assemblée nationale vient parachever de manière spectaculaire ce qu’a montré la campagne pour les élections européennes : l’Europe est secondaire
La dissolution de l’Assemblée nationale vient parachever de manière spectaculaire ce qu’a montré la campagne pour les élections européennes : l’Europe est secondaire
©JOHN THYS / AFP

Grande oubliée

La dissolution de l’Assemblée nationale vient parachever de manière spectaculaire ce qu’a montré la campagne pour les élections européennes : l’Europe est secondaire.

Bruno Alomar

Bruno Alomar

Bruno Alomar, économiste, auteur de La Réforme ou l’insignifiance : 10 ans pour sauver l’Union européenne (Ed.Ecole de Guerre – 2018).

 
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Car quelles que soient les opinions politiques, il est clair pour tout le monde que cette campagne européenne s’est, une nouvelle fois, traduite par la pauvreté des débats et des propositions quand il s’agissait de traiter de ce qui était pourtant bien l’objet du vote des Français : l’Europe. Dans un mouvement freudien, E.Macron, par la dissolution, a remis l’église au centre du village et reposé la question centrale, celle du pouvoir en France.

Bien sûr, personne n’a jamais cru qu’une élection européenne ne devait traiter que d’Europe. Les Français, plus intelligents que les pro et les anti européens enragés, ont toujours saisi les sujets européens pour faire entendre leur voix sur le sujet essentiel : leurs gouvernants nationaux. Le référendum de 2005 portant sur le projet de Traité constitutionnel pour l’Union européenne a à l’évidence exprimé le refus par les Français (des Néerlandais quelques semaines plus tard) de l’augmentation des pouvoirs de l’UE. Mais il a aussi – surtout – été pour les Français l’occasion d’exprimer leur rejet de Jacques Chirac et de sa majorité, en déliquescence avancée.

Est-ce à dire que le 9 juin les Français n’ont rien dit qui mérite d’être entendu à propos d’Europe ? A l’évidence non. Leur message est très clair.

Les Français, massivement, rejettent l’Europe qu’Emmanuel Macron souhaite et qui se résume en un trajectoire simple : donner toujours plus de pouvoirs au niveau européen au détriment du niveau national. Les Français ne pensent pas que leur diplomatie doit être progressivement vidée de sa substance avec le passage à la majorité qualifiée en matière de politique étrangère européenne. Les Français, s’ils sont attachés à la défense de l’Europe, veulent enrayer la course à l’abîme imaginée par Emmanuel Macron en matière de transfert progressif des pouvoirs militaires à l’UE, jusqu’à évoquer l’arme atomique. Les Français, qui comprennent sans nécessairement savoir l’exprimer clairement le fonctionnement de l’UE, perçoivent combien l’élargissement que soutiennent leurs dirigeants jusqu’à peut-être 35 pays membres signifie immanquablement la poursuite de la dilution des intérêts de la France et une plus grande inefficacité de l’UE. 

Est-ce étonnant ? Les Français réitèrent juste le message du « non » au référendum de 2005 qui signifie une chose simple : ils ne veulent pas sortir de l’UE comme les britanniques, mais ils ne veulent pas non plus que l’UE s’approfondisse. Ils souhaitent juste qu’elle fonctionne mieux, car ils estiment, à juste titre, que cela est possible. Surtout, ils veulent que cessant de se vouloir plus grosse que le bœuf, elle reste ce qu’elle est, à sa place : une organisation internationale non souveraine à qui l’on confie des responsabilités strictement limitées par le Traité, que l’on peut lui reprendre si nécessaire. En un mot, l’UE, pour les Français, doit être un outil à leur service, et non un maître.

Observons d’ailleurs, pour nuancer un quelconque exceptionnalisme cocardier, que les Français ne se distinguent pas vraiment des autres peuples européens. Car le fait majeur de cette élection, à l’échelle UE, c’est la montée en puissance de la droite européenne, dont le message, avec des nuances, est le refus du fédéralisme.

Le message des Français a-t-il une chance d’être entendu alors que la dissolution écrase tout l’agenda politique ? Rien n’est moins certain. L’adoption du Traité de Lisbonne en 2008 qui reprenait largement les dispositions du Traité constitutionnel pourtant écarté montre que les dirigeants Français font souvent leur l’idée exprimée lors de la crise grecque de 2015 par Jean Claude Juncker « il ne peut pas y avoir de choix démocratique contre les traités européens ». Il ne faudra pas attendre longtemps pour commencer à être fixés. Le 17 juin le Conseil européen a commencé à se pencher sur la nomination des grands postes à l’UE. Et le 27 juin la presse se fait l’écho de la volonté de M.Macron, sans tenir aucun compte des élections en cours, de reproposer T.Breton – quels que soient ses mérites - comme commissaire. Pense-t-on qu’il soit de bonne politique – pour l’UE, pour la démocratie et pour les élections parlementaires imminentes - de persévérer dans une voie qui a est précisément l’incarnation de l’UE que les Français viennent de rejeter ? 

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