Echec du 49-3 : ceux qui se sont suicidés, ceux qui se sont tiré une balle dans le pied, ceux qui n'ont pas gagné grand-chose<!-- --> | Atlantico.fr
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Manuel Valls jeudi 20 février à l'Assemblée nationale.
Manuel Valls jeudi 20 février à l'Assemblée nationale.
©Reuters

Analyse

La motion de censure déposée par l'opposition contre le gouvernement Valls a été votée jeudi soir par 234 députés, alors qu'il en fallait 289 pour qu'elle soit adoptée. Conséquence : la loi Macron est considérée comme adoptée.

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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Certes, le projet de loi Macron, qui porte le nom du inistre de l'Economie, mais qui avait été largement initié par son prédécesseur Arnaud Montebourg, a finalement été adopté. Le gouvernement n'a pas été renversé et l'opposition s'est à peine fissurée : l'UMP a fait bloc et seulement sept députés centristes n'ont pas voté la censure. Ce sont les communistes qui se sont divisés, les uns, (au nombre de six), à l'instar de leur président André Chassaigne, joignant leurs voix à celles de la droite, les autres (quatre) préférant s'abstenir. Car les conséquences de ce vote négatif pourraient être terribles pour leur parti lors des élections départementales qui se dérouleront dans un mois. Le PC ne détient plus que deux départements (le Val-de-Marne et l'Allier). Déjà, le sénateur Carvounas, élu du Val-de-Marne et proche de Manuel Valls, a prévenu que le PS pourrait "reconsidérer l'accord historique qui lie le Parti socialiste et le Parti communiste dans notre département", ce qui veut dire que le PS ne s'effacerait pas ou plus devant ceux qui restent ses partenaires au niveau local. Et dans ce cas, ce vote aura été un véritable suicide politique.

Quant aux opposants socialistes, difficile de prédire aujourd'hui s'ils se sont tiré une balle dans le pied à l'occasion de ce débat en se mettant en quelque sorte en marge de la majorité, ou si au contraire, leurs points de vue vont désormais être davantage pris en considération. Il faut être un fin connaisseur de la palette du PS pour savoir lesquels de la soixantaine d'élus qui, soit refusaient de voter pour le texte, soit menaçaient de s'abstenir, font partie des amis de Martine Aubry, du club de Benoit Hamon, Un Monde d'Avance, voire de l'aile gauche du PS Maintenant la Gauche. Ce qui est sûr, c'est que nombre d'entre eux verraient sans déplaisir Manuel Valls remplacé par un autre Premier ministre. Mais dans ce jeu compliqué, certains se positionnent aussi pour devenir ministre.

A l'inverse, il se trouve des socialistes, comme le député de Paris, Christophe Caresche, pour estimer que ces députés n'ont plus leur place au PS. Mais où est la majorité de rechange ? Pas à l'UDI, même si sept députés centristes se sont abstenus, au nom de leur cohérence, car ils considéraient que la loi Macron contient quelques avancées utiles pour la croissance. C'était aussi le point de vue d'une poignée de députés UMP qui souhaitaient voter pour la loi. Mais ceux-là ont voté la censure, car il ne s'agissait surtout pas pour eux de venir au secours d'une majorité mal en point. Ce qui a permis à leur président de groupe Christian Jacob d'attaquer durement le Premier ministre à la tribune en le qualifiant de "chef de gouvernement qui chaque jour se coupe davantage de ses troupes" et en prédisant que "pour votre gouvernement, c'est au mieux le début de l'immobilisme, au pire le début de la fin... Cette censure aura une réplique. Le 22 mars, dans les urnes, aux élections départementales, les Français vous censureront". Manuel Valls a eu beau jeu de lui répliquer : "vous n'êtes que dans la posture et dans l'obstruction" et de se poser en champion de la réforme car "l'UMP n'a pas de projet alternatif".

Mais dans ces attaques, le Premier ministre visait aussi les frondeurs "irresponsables" qui préfèrent "l'immobilisme". Manuel Valls a-t-il pour autant conforté son autorité en déclenchant le 49-3 pour passer en force ? Pas vraiment. Ses opposants internes continuent de déplorer l'absence de dialogue, ou plutôt d'ouverture du gouvernement sur la question de la compensation du travail du dimanche, ce qui signifie que le gouvernement ne dispose pas d'une majorité à l'Assemblée pour mener à bien des réformes structurelles puisqu'il n'a plus droit qu'à un seul 49-3 par session. Ce qui veut dire que le gouvernement ne pourra pas faire voter de réformes qui impliquent des concessions de la part des salariés, même si les sondages montrent que dans leur globalité les Français y sont favorables. Il pourra d'autant moins le faire que le PS est engagé dans la préparation de son Congrès et que dans cette perspective l'assouplissement n'est pas de mise.

Quant à l'UMP, si elle peut se féliciter de sa cohésion, elle n'a pas, à ce jour, de projet alternatif à présenter aux Français et ses porte-paroles ne font que de l'incantation lorsqu'ils dénoncent une "petite loi" ou une "mauvaise loi" en espérant que la  course de lenteur qui attend la loi Macron ne lui permettra pas de produire d'effets positifs pouvant compromettre leur propre victoire.

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