Droite année 0 : mort conjointe du sarkozysme et du chiraquisme, victimes collatérales du premier tour<!-- --> | Atlantico.fr
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Valérie Pécresse salue la foule à l'issue de son meeting au parc des expositions de la Porte de Versailles, à Paris, le 3 avril 2022.
Valérie Pécresse salue la foule à l'issue de son meeting au parc des expositions de la Porte de Versailles, à Paris, le 3 avril 2022.
©Ludovic MARIN / AFP

Election présidentielle

Après l’échec de Valérie Pécresse et la prise de position de Nicolas Sarkozy en faveur d’Emmanuel Macron, sur quelle matrice idéologique peut se reconstruire Les Républicains ?

Joseph-Macé Scaron

Joseph Macé-Scaron

Joseph Macé-Scaron est consultant et écrivain. Ancien directeur de la rédaction du Figaro magazine et de Marianne, il est, notamment, l'auteur de La surprise du chef (2021) et Eloge du libéralisme (2020), aux éditions de L'Observatoire. 

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Atlantico : Alors qu’il ne s’est pas exprimé pendant la campagne de premier tour, Nicolas Sarkozy a, dans un communiqué, décidé de soutenir Emmanuel Macron. Ce soutien marque-t-il la mort de ce qu’a pu être jusqu’à présent le sarkozysme ?

Joseph Macé-Scaron : En apparence, c’est indéniable. R.I.P. le sarkozysme et les Républicains. L’ancien président de la République a beau faire d’Emmanuel Macron son continuateur, tout comme en son temps François Mitterrand avait adoubé un Jacques Chirac par mépris de sa famille politique, personne n’est dupe.  Bien sûr, il peut influencer à la marge après la présidentielle et retrouver avec un livre son fan club de lecteurs (et non plus d’électeurs) mais il faut bien parler de ralliement au Président sortant. Dans un entretien récent, Nicols Sarkozy explique qu’il  faut accompagner l’évolution du Président candidat vers le centre-droit. C’est la nouvelle version de l’adage célèbre : « puisque les événements nous échappent, feignons d’en être les organisateurs ». Reste que l’on a du mal à reconnaître dans le macronisme d’entre les deux tours, la flamboyance du sarkozysme. La volte-face du chef de l’Etat sur les retraites, une des mesures phares de son programme afin, de ne pas indisposer les électeurs de Jean-Luc Mélenchon, suffit à nous rappeler que le macronisme n’est rien d’autre qu’une forme de blairisme. On n’a jamais vu un tel renoncement programmatique entre les tours d’une élection présidentielle.

Et cela n’empêche nullement Nicolas Sarkozy de recommander à ses amis de se présenter aux législatives sous la marque ombrelle de la majorité présidentielle. Comprenne qui pourra. Ou pas.

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Dans le même temps, le mauvais score de Valérie Pécresse à la présidentielle marque-t-il la mort du chiraquisme dont elle se revendiquait, tant sur le plan idéologique et humain?

C’est tout aussi indiscutable. Tout au long de sa campagne, Valérie Pécresse s’est présentée comme une héritière du chiraquisme. Ce qu’elle était. Elle a même tenu à associer dans un même projet le chiraquisme d’opposition et le chiraquisme présidentiel. Ce qi était une position difficilement tenable. Et vous avez raison d’ajouter l’humain car, même si elle n’est pas parvenue à laisser transparaître cet aspect-là, elle est bien, là aussi, la digne héritière de Jacques Chirac, énarque à sa manière, pudique comme lui, amoureuse des plaisirs de la table, de la Corrèze et ayant tissé le même rapport à la culture.

D’ailleurs, son seul et véritable soutien est venu de la fille de Jacques Chirac qui n’a pas hésité à prendre parti pour la candidate des Républicains quand tant d’autres hommes de ce camp étaient aux abonnés absents. Le problème est que le chiraquisme ne fait plus recette dans la chapelle de la droite. Il s’apparente à ces génuflexions dans les églises que l’on fait automatiquement en passant devant l’autel.

Face à ce constat, quel avenir idéologique et quelle matrice pour la droite maintenant ? Quelles sont les forces et les idées en présence ?

Le sarkozysme et le chiraquisme sont morts et remords. Mais reconnaissons honnêtement que, de toute manière, ils ne laisseront pas une grande place dans l’histoire des idées politiques. Et pour cause ! Ces deux « ismes » sont, avant tout, deux projets de conquête et de conservation du pouvoir et pas autre chose.Ce sont deux discours portés par des animaux politiqueshors normes mais quelle est leur vision, leur projet de société ? J’ai connu personnellement un Nicolas Sarkozy qui a été tour à tour partisan d’un travaillisme à la française, puis reaganien, puis étatiste avec Edouard Balladur, puis libéral, puis...avec toujours la même fougue et la même faim politique. Son appétit a, aujourd’hui, disparu. Est-ce à dire que sa famille politique doit se laisser mourir de faim ?

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Quelle matrice pour la droite ? Je sais que le libéralisme n’a pas bonne presse. Il est vrai qu’il est soumis à rude épreuve entre ceux qui l’utilisent pour justifier leurs lâches abandons et ceux qui s’en servent pour déconsidérer leurs adversaires en le réduisant aux soubresauts d’une économie dérégulée. Il n’empêche : le droite si elle veut se reconstruire doit le faire en partant des idées comme elle a su le faire après 1981 à partir des associations, de clubs et de médias qui avaient résisté aux sirènes du pouvoir. Nous en sommes là, aujourd’hui. Le chantier est immense.

Si ce n’est plus la tendance chiraquienne ou sarkozyste, quel socle peut-il rester à LR pour se reconstruire ?

Mais il n’y a plus de socle ! Il n’y a plus rien. C’est droite année zéro, tout est, en effet, à reconstruire. Tout. Depuis une bonne vingtaine d’années, la droite, en refusant le libéralisme, a ardemment œuvré à son actuel naufrage. Il faut maintenant œuvrer à trouver le cheminement souterrain d’une source et comprendre combien le libéralisme s’inscrit dans le cours le plus intérieur de la droite mais aussi dans l’histoire dans notre pays avec Tocqueville et Raymond Aron, La Boétie et Jean-Baptiste Say, mais aussi Madame de Staël, benjamin Constant et Stendhal qui lançait comme un défi : « Je suis un chien de libéral ». Il faut que les libéraux qui sont encore nombreux dans ce pays sortent de leur placard, relèvent la tête et soient fiers de leur tradition et de la vision de l’avenir qu’ils portent. Comme le disait Kant : « Si tu te fais ver de terre, ne te surprend pas, si on t’écrase avec le pied ».

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Joseph Macé-Scaron est consultant et essayiste. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages, notamment Éloge du libéralisme aux Éditions de l’Observatoire

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