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Croates et Turcs ont eux subi des violations de leurs droits humains sans que personne ne s’en émeuve.
Croates et Turcs ont eux subi des violations de leurs droits humains sans que personne ne s’en émeuve.
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Bonnes feuilles

La première guerre de l'OTAN au Kosovo a été menée au nom des droits de l'homme : frapper fort pour "prévenir un génocide" et stopper les troupes serbes menaçant les populations civiles. Elle était pourtant illégale. Pierre Péan démontre la terrible duplicité de la communauté internationale, Etats-Unis en tête. Extrait de "Kosovo : une guerre juste pour créer un état mafieux" (1/2).

Pierre Péan

Pierre Péan

Pierre Péan est un journaliste d'investigation français. Il a publié une vingtaine d'ouvrages depuis 1975. Certains ont été des succès, comme TF1, un pouvoir, écrit en collaboration avec Christophe Nick, ou l'Argent noir ou encore Une jeunesse française – François Mitterrand, 1934-1947, qui a été son best-seller.

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Après l’accord de Kumanovo, au début du mois de juin 1999, le nombre des actes d’épuration ethnique et des crimes a explosé. Majoritairement commis par les Serbes ? Non, par les Albanais de l’UÇK qui visaient les minorités non albanaises (1). Et ces drames se sont déroulés en présence des soldats de l’OTAN. Ce n’est ni le colonel Hogard ni le chef d’escadron Houzel qui l’affirment, mais les enquêteurs de l’OSCE.

Dans son second tome, le rapport publié en décembre 1999 par l’OSCE rend compte de ce qui s’est passé au Kosovo après la fin de l’intervention de l’OTAN, entre la mi-juin et la fin octobre (2). La tonalité générale de ce document n’est pas différente de celle du précédent tome, à ceci près, toutefois, que les exactions qu’il recense ont été perpétrées le plus souvent contre les Serbes (et non plus par eux), et plus généralement contre l’ensemble des minorités non albanaises du Kosovo. Et que ces actes ont été commis après le déploiement des hommes de la KFOR, et alors que la province était administrée par la « communauté internationale ».

Les auteurs de ce compte rendu soulignent d’abord que toutes les communautés kosovares ont enduré, dans la période envisagée, d’insignes brutalités. Cependant, précisent-ils, « les preuves les plus accablantes » montrent principalement des violations massives, et systématiques, « des droits des non-Albanais ». Pour prévenir ces nouvelles exactions, explique l’OSCE, il aurait fallu mettre en place au Kosovo, immédiatement après la fin de l’intervention alliée, de rigoureux contrôles. Mais cela n’a pas été fait par les « libérateurs » occidentaux de la province, qui l’ont au contraire laissée basculer dans une « violence incontrôlée ».

Le rapport souligne ensuite que le groupe qui a « de toute évidence » le plus souffert de ces attaques est celui des Serbes, car, « en dépit du fait que ceux qui avaient pris part aux exactions perpétrées pendant la guerre avaient quitté le pays avec les forces de sécurité serbes et yougoslaves, l’hypothèse de leur culpabilité collective a prévalu ». De sorte que l’ensemble de ceux qui sont restés au Kosovo ont été « considérés comme des cibles par les Albanais », et que de très nombreux « Serbes âgés et vulnérables », en particulier, « ont été victimes de violences » épouvantables. « Les Roms et les musulmans slaves » – principalement des Bosniaques – ont également été persécutés. Les premiers ont été systématiquement « chassés de chez eux », et leur communauté a été « décimée ». Les seconds, concentrés dans l’ouest du Kosovo, partageaient quant à eux « la même foi que les Albanais », mais ont tout de même été regardés comme des « suspects », car ils parlaient le serbo-croate. Et cela « suffit » dans le nouveau Kosovo « à déchaîner la violence ».

Enfin, d’« autres non-Albanais », Croates et Turcs, ont eux aussi subi des violations de leurs droits humains. Sans que personne ne s’en émeuve. Après cette édifiante entrée en matière, le rapport de l’OSCE détaille un premier bilan, arrêté à la date du 31 octobre 1999, de ce qui s’est passé au Kosovo après l’arrivée des troupes de l’OTAN.

(1). Outre les Serbes du Kosovo, les minorités non albanaises de la province sont composées par les Roms, Tziganes parlant la langue rom, les Ashkalis, Tziganes albanophones, les Gorani, dits « Bosniaques », des Slaves islamisés parlant le serbe, les « Turcs », surtout présents dans le Sud, descendants des Turcs qui n’ont pas quitté le Kosovo à la fin de l’Empire ottoman en 1912, et les catholiques albanais, surtout présents dans l’Ouest.

(2). Rapport de l’OSCE, Human Rights in Kosovo. As Seen, As Told. 14 June-31 October 1999 (« Droits de l’homme au Kosovo. Choses vues, Choses dites. 14 juin 1999-31 octobre 1999 »), 5 novembre 1999 (disponible à l’adresse : http://www.osce.org/odihr/17772), qui présente une analyse des découvertes de la mission de l’OSCE. Le premier tome confirmait, on le rappelle, l’ampleur des crimes commis par les Serbes avant le déclenchement de l’opération « Force alliée ».

 Extrait de "Kosovo : une guerre juste pour créer un état mafieux" (Fayard), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.


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