Violences conjugales : Des paroles aux actes<!-- --> | Atlantico.fr
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Tous les deux jours, une femme meurt sous les coups de son conjoint.
Tous les deux jours, une femme meurt sous les coups de son conjoint.
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Bonnes feuilles

Cet essai livre une analyse des liens ténus entre violence et passion pour mieux les dissocier. L'auteur explique tous les processus, à la fois intimes et sociétaux, de la violence conjugale "ordinaire" aujourd'hui. Extraits de "Je suis à toi, tu es à moi. Violence et passion conjugales" de Maryse Jaspard aux éditions Payot 2/2

Maryse Jaspard

Maryse Jaspard

Sociologue et démographe féministe

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Le crime étant l’infraction la plus grave du code pénal, le criminel encourt les peines les plus lourdes. Les peines prononcées prennent en compte la notion d'intention de donner ou non la mort. Entrent également en ligne de compte les circonstances aggravantes et les circonstances atténuantes. Jusqu’à une période récente, « être sous l’emprise de la passion » était considéré comme une circonstance atténuante, au même titre que l’emprise de l’alcool ou d’une drogue, ou l'altération des facultés mentales. L’état de dépendance ou d’addiction – la passion est dans ce cas considérée comme telle – du meurtrier peut être considéré comme inhibant sa conscience, réduisant ainsi sa responsabilité. Le verdict dépend souvent de la réponse à la question : le criminel était-il entièrement responsable de ses actes au moment des faits ?

Dans nombre de procès d’assises, les débats tournent autour de la santé ou des facultés mentales de l’accusé. Un diagnostic de pathologie mentale ou de dépression a pour effet d’annihiler la responsabilité du criminel, l'expulsant du cadre pénal pour une prise en charge médicale, prise en charge psychiatrique plus ou moins coercitive.

Les données publiées par l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) indiquent une hausse de la proportion de personnes souffrant de troubles psychiatriques et/ou psychologiques parmi les auteurs et victimes d’homicides conjugaux : en 2011, cette proportion était d’une sur cinq, elle atteignait une sur trois en 2012. Soit une forte surreprésentation de personnes présentant des pathologies mentales. Ces diagnostics médicaux émanant de statistiques de la Délégation aux victimes du ministère de l’Intérieur (Dav) ne préjugent aucunement des circonstances plaidées aux assises.

Des critères, comme le tempérament violent ou la culture machiste de l’accusé, qui, dans le passé, constituaient des circonstances atténuantes, sont maintenant plutôt analysés en tant que circonstances aggravantes. Parmi les circonstances aggravantes, la plus fréquente et la plus lourde de conséquences réside dans le lien familial qui unit agresseur et victime. Depuis 1994, le code pénal reconnaît la qualité de conjoint ou concubin comme une circonstance aggravante pour toutes les formes d’infraction ; depuis 2004, l’application est élargie aux « ex » et aux pacsés.

L’évolution de la qualification des circonstances en tant qu’aggravantes ou atténuantes change totalement la pénalisation du meurtre conjugal. Les jurés populaires, expression de l’opinion publique, se montrent plus sévères, au fur et à mesure que la réprobation de la violence conjugale s’étend sur l’ensemble du corps social. La qualification d’un crime comme crime passionnel n’est plus une question linguistique ou littéraire, elle est devenue une question de justice sociale.

Néanmoins, la justice sociale est souvent sous-jacente à une justice de classe perdurant en dépit des fortes contestations citoyennes qui ont émaillé l’histoire de notre République.

Extraits de "Je suis à toi, tu es à moi. Violence et passion conjugales" de Maryse Jaspard aux éditions Payot, 2015

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