Dans l'enfer des municipales : Paris vaudra-t-il une explosion à l'UMP ? <!-- --> | Atlantico.fr
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La campagne UMP à Paris tourne à la guerre des droites.
La campagne UMP à Paris tourne à la guerre des droites.
©Reuters

Paris brûle-t-il ?

La candidature de Nathalie Kosciusko-Morizet à Paris peine à décoller et divise de plus en plus dans son propre camp. Au-delà des affrontements traditionnels au sein de la droite parisienne, sa personnalité et ses orientations politiques cristallisent un certain nombre de tensions qui traversent l'UMP.

 Atlantico : La campagne  UMP à Paris tourne à la guerre des droites : la menace d'une liste dissidente face à NKM pèse, tandis que Jean-Louis Borloo accuse cette dernière de ne pas respecter l'accord UMP-UDI-MoDem. Quel est le pouvoir de nuisances des municipales parisiennes sur l’UMP ?

Thomas Guénolé :Certes, Paris n'est pas la France. Néanmoins, au soir du second tour des municipales, les médias listeront victoires et défaites de la gauche et de la droite tout particulièrement dans les vingt plus grandes villes de France. A cet égard, Paris étant la plus grande de toutes, gagner ou perdre Paris est le score le plus important de tous.

Christian de Villeneuve : Nous ne sommes qu'au mois de décembre et les municipales sont dans trois mois. Aujourd'hui, on assiste à un exercice de gros bras pour déterminer les rapports de force. Néanmoins, il  y a un vrai problème de leadership aussi bien à Paris qu'à l'UMP. Courageusement, NKM a voulu se débarrasser d'un certain nombre d'archaïsmes, mais elle a du mal  à imposer ses choix, de même que Jean-François Copé peine à imprimer son leadership. Les résultats des élections municipales seront lus en fonction des résultats de Paris et Marseille. En cas de défaite à Paris, il y aura forcément des répercussions sur l'UMP.

L'UMP peut-il exploser ?

Thomas Guénolé :Non. Dans toute la France, à toutes les élections, c'est la marque qui fait l'essentiel du score du candidat ou de la liste de candidats. Donc, faire scission de l'UMP, c'est s'engager soi-même dans une impasse électorale et tuer la poule aux œufs d'or. Fort d'une assise électorale personnelle, pouvoir être élu sur son propre nom en dehors d'un grand parti est possible, mais cela reste l'exception : c'était le cas par exemple de feu George Frêche à Montpellier.

Christian de Villeneuve : L'UMP ressemble de plus en plus au parti socialiste, avec des sensibilités différentes qui s'organisent en courants différents. La question est de savoir si l'intérêt du parti l'emportera sur l'intérêt des clans. A la veille des échéances importantes, le parti socialiste parvient toujours à se mettre en ordre de bataille.

Au-delà des affrontements de personnes, cette crise politique à Paris traduit-elle de profondes fractures idéologiques et sociologiques à droite ? Lesquelles ?

Thomas Guénolé : Anne Hidalgo mène une campagne de sortante quasi-muette : se faire élire au même titre que si Bertrand Delanoë postulait pour un troisième mandat. NKM devrait donc avoir un boulevard pour exprimer son message de candidate, d'autant plus facilement que Paris est la seule ville dont la campagne municipale soit à ce point nationalement médiatisée. Or, si le débat public est à ce point focalisé sur les jeux d'appareil, c'est à cause du quasi-silence de NKM sur le fond. De fait, on attend toujours la dizaine de grands thèmes de campagne de la candidate, avec pour chaque grand thème sa proposition-choc, clivante et bien identifiable, pour mobiliser les électeurs. 

A cela s'ajoute une gestion globalement à l'emporte-pièce des cadres et militants de l'UMP parisienne par le staff de campagne de NKM, gestion caractérisée par une légèreté dont NKM n'a pas nécessairement connaissance elle-même. C'est un vivier à dissidences en soi, alors que déjà, il y a des candidats à la dissidence par simple mécontentement de la position promise sur telle liste dans tel arrondissement.

Enfin, effectivement, il y a un clivage à l'intérieur de la droite parisienne. Cependant, ce n'est pas la confrontation entre droite sécuritaire et droite gaulliste, entre partisans et adversaires de la droitisation de l'UMP, qui caractérisait le duel Copé-Fillon. Ici, NKM, pour cause d'alliance dès le premier tour avec l'Alternative UDI-MoDem, et pour cause d'image personnelle "bourgeois-bohème," donne l'impression d'une candidature globalement de droite très modérée, voire de centre-droit. Cela ouvre un espace pour une ligne plus ancrée à droite, et c'est d'ailleurs explicitement ce que propose le dissident le plus potentiellement dangereux pour NKM : Charles Beigbeder, dont les idées et le parcours incarnent la droite libérale.

Christian de Villeneuve : Certes, NKM  a l'image d'une bobo de droite et certains parisiens qui ont défilé contre le mariage pour tous ne voteront pas pour elle. Mais, à Paris comme à l'UMP les divergences idéologiques ne me paraissent pas profondes et les conflits de personnes prennent le dessus, comme on peut le voir à travers la rivalité NKM-Rachida Dati. De même, le choix d'écarter le fils Tibéri est davantage une question de principe qu'un choix idéologique. Question de principe plus que de choix idéologique.

Sans aller jusqu'à parler d'explosion, peut-on parler de profonde recomposition idéologique à droite et au centre ?   

Thomas Guénolé : Les quatre familles de la droite restent stables sur le fond : droite libérale, droite gaulliste, droite moraliste, droite sécuritaire. Les quatre familles du centre le restent elles aussi : centre-droite, extrême centre, centre-gauche, et centre écologiste. De fait, la recomposition ne joue pas sur leur contenu, mais plutôt sur le rapport de forces entre ces courants d'idées. A droite, ce sont surtout la droite libérale, plus forte à Paris qu'en province, et la droite moraliste, qui a beaucoup mobilisé dans certains arrondissements au moment des manifestations contre le mariage gay, qui ont le vent en poupe. Au centre, le centre-droit, de par l'UDI, et l'extrême centre, de par le MoDem, sont incarnés et alliés dans l'Alternative, mais le centre-gauche et le centre écologiste ne sont pas mis en avant, quand bien même telle ou telle personnalité de l'Alternative en aurait les idées. 

Il faut bien comprendre que l'électorat parisien est fondamentalement différent de celui du reste de la France. Pris dans sa globalité, il est plus jeune, il a un niveau de vie plus élevé, il a majoritairement voté oui au référendum constitutionnel européen, le PS local y est l'un des plus sociaux-démocrates de France, le FN y fait l'un de ses scores les plus faibles de France, et au second tour de 2007 Ségolène Royal y a quasiment fait le même score que Nicolas Sarkozy.

Christian de Villeneuve : La droite est confronté à la poussée réelle ou virtuelle du Front National. Elle doit adopter un positionnement stratégique par rapport à cette percée. Mais fondamentalement je ne vois de fracture idéologique forte. Encore une fois, l'UMP ressemble de plus en plus au PS. Si la confrontation entre les différents courants peut paraître violente, la majorité du parti se retrouve sur l'essentiel : les valeurs de droite et la ligne économique. 

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