Conseil stratégique de la dépense publique : les rapports qu’il suffirait de relire pour identifier les solutions les plus efficaces<!-- --> | Atlantico.fr
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Lire les rapports existants serait déjà une bonne chose.
Lire les rapports existants serait déjà une bonne chose.
©Reuters

Pot-pourri

Le Conseil stratégique de la dépense publique se réunit pour la première fois ce jeudi. Plutôt que d'inventer de nouvelles mesures, celui-ci gagnerait peut-être à piocher dans les propositions déjà avancées dans les multiples rapports existants sur le sujet. Ainsi, le non remplacement de 2 fonctionnaires sur 3 sur la période 2012-2017 préconisé par France Défi.

Jean-Michel Rocchi

Jean-Michel Rocchi

Jean-Michel Rocchi est président de Société, auteur d’ouvrages financiers, Enseignant à Sciences Po Aix et Neoma.

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"Conseil Stratégique de la Dépense Publique", le nom même appelle à la méfiance sinon au scepticisme, au regard de la situation des finances publiques il aurait été plus judicieux d’appeler un chat un chat et de préférer le nom de « Conseil Stratégique de la Réduction de la Dépense Publique ». Les choses sont déjà mal parties d’ailleurs un président qui émane du secteur public sera probablement prisonnier de la très corporatiste administration française. Bien plus, sociologiquement le parti socialiste est le parti des fonctionnaires, mais il n’est jamais trop tard pour des mesures courageuses en faveur de l’intérêt général (toute la Nation incarnée par la population française et non pas les seuls agents de l’Etat au sens large du terme). D’ailleurs n’oublions jamais que l’Etat n’est qu’une fiction juridique, « nul n’a jamais rencontré l’Etat » disait Georges Burdeau. Il en résulte que toute dépense publique (légitime ou non) finira donc invariablement dans une poche privée. Le gaspillage des deniers publics n’en est que plus insupportable car il s’assimile au pillage de la Nation au profit de personnes privées (salariés, fonctionnaires, entrepreneurs, actionnaires).      

1) Faire des économies c’est facile lorsque la volonté existe et que l’on est prêt à être courageux politiquement

Le niveau d’endettement en France est insupportable alors que nous sortons d’une longue période de paix (l’Allemagne se trouve dans une situation guère plus brillante).

A)La France à su le faire dans le passé : pourquoi ne pas le refaire ?

Dès la fin de la première guerre mondiale on essaie de lutter contre les excès de dépenses publiques (comité supérieur d’enquête de 1920), puis après la crise de 1929 des tentatives plus ou moins couronnées de succès vont apparaître : comité supérieur des économies et ses commissions tripartites (1932), commission des retraites et des offices (1933), et le comité de réorganisation administrative de Paul Reynaud (1938) qui essaie de redresser les choses après le Front populaire. En 1946 est créée une « Commission de la Hache » qui n’aura qu’une très faible portée en raison de l’hostilité du communiste Maurice Thorez en charge de la « réforme administrative », en pratique celui de la non réforme et du culte des avantages acquis. Le 25 juin 1947 est instituée la « Commission de la Guillotine », cette fois le courage politique est au rendez vous ainsi que les résultats : le nombre de fonctionnaires est réduit en trois ans de 100 000 sur 1,3 millions et les dépenses militaires passent de 33 % du budget à 21 %. En 1949, la France a rétabli ses finances publiques. Nous verrons vite si nous sommes dans l’enfumage habituel d’une multitude de micro mesures ou de vœux pieux ou si l’on s’attaque sérieusement à la sous-productivité et aux gaspillages de l’Etat car nous allons droit dans le mur de la dette. Si le Front de Gauche, Lutte Ouvrière  et la LCR n’appellent pas à descendre dans la rue au nom de la défense du service public en dénonçant l’ultralibéralisme c’est qu’il n’y aura eu aucunes économies. D’ailleurs M. Jean-Luc Mélenchon a l’honnêteté et la cohérence d’une alternative aux économies : le non remboursement de la dette publique. Solution qui relève d’un autre paradigme, si tant est qu’elle soit une solution : qui accepterait de financer les nouveaux déficits d’un Etat défaillant? 

B) Nos voisins ont su le faire : il faut s’attaquer dans le dur au nombre de fonctionnaire

En France nous parlons de réductions d’effectifs, nos voisins l’on fait. Il y auraitdonc une spécificité française ? Elle est liée au fait que la classe politique provient majoritairement de la haute administration, pourtant des présidents (de Chirac à Hollande) qui émanent de la Cour des Comptes savent que l’Etat n’est pas infaillible, que la sous-productivité est très répandueet parfois qu’existe aussi le gaspillage voire les malversations.

Source : Institut Montaigne, Redonner sens et efficacité à la dépense publique, Décembre 2012

1) Peut-on avoir des objectifs chiffrés ?

A) Une technique pour ne pas faire d’économies : se donner des objectifs ridiculement bas ou non chiffrés et avoir des tabous

Lorsqu’on ne veut pas faire d’économies on entretien le flou et les vœux pieux : depuis 40 ans les dépenses publiques ont augmenté sans discontinuité, seul parfois le rythme de hausse annuelle s’est ralenti (gouvernements Balladur 3 %, Juppé 2,6 %, Fillon 2,5 %, et dans une moindre mesure Jospin 3,5 %).

N’y a t-il pas une fascination irrationnelle dans le culte (de la dérive) des dépenses publiques? En 1960 les dépenses publiques par rapport au PIB étaient de 35 % contre 57 % aujourd’hui : les Français sont-ils plus heureux et vivent-ils mieux ? Leurs perspectives sont elles meilleures ? Au-delà des considérations idéologiques il y a une impuissance manifeste de la dépense publique. Par rapport à 1960 la dette publique a explosé, le chômage aussi, la croissance à disparu en dépit des prétendus effets des déficits (prétendus) keynésiens (il n’a jamais conseillé le déficit permanent, y compris en haut de cycle) qui ont fait piteusement pschitt.

A) Quelques objectifs simples et significatifs : les gouvernants successifs par lâcheté nous ont menti sur un point, ce n’est pas si difficile car « plus on part de haut plus c’est facile »

Pour France Défi sur la période 2012 – 2017 il faut faire 6% d’économies, et comme ils le notent n’importe quelle entreprise pourrait le faire aisément. Leur nombre cible de fonctionnaire est de 4,6 millions comme en Allemagne contre 5,3 à ce jour (soit une baisse de 13 %). Deux fonctionnaires sur trois ne doivent pas être remplacés, les gains de productivité pourront pour partie servir aussi à une revalorisation des fonctionnaires. Un jour un haut fonctionnaire de mes amis m’a expliqué que faire des économies « portait atteinte à l’image et à la splendeur de l’Etat » ! Quelle splendeur il y t-il à afficher 1 900 milliards d’OAT de dette publique, soit 92,7 % du PIB ? 

Il n’existe aucune justification sérieuse entre l’écart en la France et l’Allemagne (en dehors de 1 % sur la défense) sur le montant de la dépense publique par rapport au PIB.

Source : Institut Montaigne, Redonner sens et efficacité à la dépense publique, Décembre 2012

Les citoyens allemands n’ont rien à envier Français et pourtant la pression fiscale est moindre. De notre côté les choses sont claires nous avons des gains de productivité à faire, de 15 à 20 % par grande fonction budgétaire. On remarquera aussi que l’on parle beaucoup des entreprises (Affaires économiques), mais qu’une fois n’est pas coutume, nous sommes très économes s’agissant des activités qui créent de vrais emplois !

L’objectif de dépenses publiques par rapport au PIB doit être très vite de revenir à 50 % puis d’essayer de tendre vers 48 % et idéalement 45 %. La correction du nombre excessif de fonctionnaires doit porter sur la fonction publique d’Etat, territoriale et hospitalière. Les dépenses de santé peuvent être mieux maîtrisées, de même que le système d’indemnisation du chômage, l’aide personnalisée au logement est également particulièrement coûteuse et inefficace. Il existe en outre historiquement des dizaines sinon des centaines de comités théodule qui peuvent être supprimés immédiatement (environ 600 dans une liste annexée à chaque loi de finance).    

Il ne faut pas avoir peur des économies budgétaires car le déficit budgétaire français relève du mauvais déficit (à 97 % des dépenses de fonctionnement), puisque les dépenses d’investissement ne portent que sur 3 %, c'est-à-dire des dépenses économiquement inefficaces ayant une incidence sur la croissance et l’emploi.  

Enfin, n’oublions pas un « cadeau » un peu paradoxal de la sortie de crise, les taux d’intérêts augmenteront et la charge de la dette explosera.

Il est plus qu’urgent de réduire les dépenses publiques et la dette publique, la France n’a plus aucune marge de manœuvre. Afin de rester optimiste, le rapport de l’Institut Montaigne, probablement le plus réaliste (quoique manquant d’ambition) chiffre les réductions possibles à 57 milliards d’euros selon le détail ci-dessous :

Source : Institut Montaigne, Redonner sens et efficacité à la dépense publique, Décembre 2012

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